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Mireille Podchlebnik – Passante


peinture : Markus Lupertz musée d’art moderne de Paris

Je ne suis que passante

La passante du rêve

La passante d’un soir

La passante du désespoir

Sur la feuille volante

J’existe et je n’existe pas

L’écriture s’efface sans laisser de traces

Comme un écho à travers le temps

Illusion

Je partirai un jour à pas de loup sur le chemin.

—————

( texte de 2008 extrait de la revue « Comme en >Poésie »


Poèmes du Gévaudan – I (Susanne Derève)


      Photo-montage RC 

 

 

Entre chien et loup

j’ai rêvé de toi, ouvert les yeux 

et fermé la fenêtre

 

Un chien aboyait doucement 

et le grand loup du Gévaudan

projetait son ombre noire sur les cimes

 

au delà des murs de la maison 

au delà du portail

où tinte la cloche au matin 

 

entre chien et loup

à l’instant où le coq a lancé 

son refrain 

 


L’ép(r)ouvante – ( RC )


Image associée

peinture – Frida Kahlo

  Epouvante,
qu’il pleuve ou qu’il vente,
tu t’échappes des contes pour enfants,
et ris de toutes tes dents:
et si c’était une comptine,
on verrait luire tes canines  …

   Et encore, l’épouvante , chante
comme la cigale de La Fontaine,
mais trouves avec peine
l’hiver étant venu, ( air connu ),
où se loger dans les arbres dévêtus
que l’on sait trouver fort dépourvus.

        Voila qu’elle a caché la lumière,
et qu’elle effraie la bergère,
avec des histoires de loup,
ou à dormir debout :
on peut presque palper la peur,
distinguer au loin le château la Terreur.

        Pendant que tes pas s’égarent
tu erres dans les idées noires :
Si les arbres ont perdu leurs feuilles,
l’épouvante a répandu son deuil,
et les racines d’une forêt ingrate,
multiplient les croche-pattes .

        La fontaine s’est refermée,
oubliée dans les ronces et l’églantier :
les fées sont capturées
pieds et poings liées
prisonnières
au coeur de l’hiver.

  •      Les eaux obscures m’ont bu
    tu n’en as rien su :
    je me suis noyé
    dans l’eau glacée :
    mes yeux te regardent
    et ma peau est blafarde:

elle a pris les couleurs de la cendre
dans le long bain de décembre :
il m’a été ôté la joie :
nous n’irons plus au bois :
j’ai pris pour compagne l’épouvante ,
dans la forêt   –  – désormais je la hante.

         Mais les années s’étant écoulées,
et tu m’as désormais oublié:
tu as délaissé tes terreurs d’enfance :
la vie a pris une autre consistance,
elle t’emmène vers d’autres horizons,
( c’est maintenant une autre chanson ) .

        Tu as remisé toutes ces fadaises,
et t’en vas cueillir des fraises :
Cigale, cigale,         il te faut rechanter :
les lauriers des bois ont bien repoussé !
la fontaine est garnie de fleurs d’églantiers,
… tu en accroches une sur ton chemisier…

       Attention quand même aux épines :
elles sont restées assassines ! ,
voila qu’une fleur de sang grandit sur ta poitrine ,
alors… te revient en tête la comptine :
l’épouvante et la peur de mourir…
(     je me rappelle à ton bon souvenir… )


RC – mars 2018


Le bestiaire – ( RC )


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Tu ne les as jamais vus
mais tu t’en fais une idée
à ce qu’on t’a colporté :
        Ils ont tendance, à leur insu
à se cristalliser
pour prendre consistance,
se construire une existence,
et se matérialiser.

Ce sont des récits épiques
avec des animaux hors norme
aux curieuses formes :
          des bêtes fantastiques…
que l’on dessine
et dont aucun dictionnaire
ne comporte d’exemplaire ,
               car tu l’imagines

aussi bien que je te vois :
un griffon sanguinaire ,
un aigle t’emportant dans ses serres,
des reptiles à trente doigts …
             Ils sèment l’inquiétude
dans les récits bibliques ,
( sans précision anatomique
ni grande exactitude ) .

Autun Cathedral Choir Capital - The First Temptation of Christ 12265096776.jpg

 

 

Cela remonte au plus profond des âges :
ce dragon a une mauvaise haleine   :
          compter neuf têtes à l’hydre de Lerne :
les légendes demeurent et voyagent .
Et si on parle d’animal,
on voit dans les fresques comme à travers le temps :
               ainsi ces figures d’éléphants
de l’armée d’Hannibal .

Ils nous semblent bien bizarres,
eux qu’on trouve sculptés dans les chapiteaux ,
par rapport à ceux qu’on voit en photo :
                l’imaginaire nourrissant l’art.
La comparaison n’est pas de mise :
Si on les reconnait pourtant
c’est bien que des éléments
rappelent leur présence grise…

Ce n’est pas un corps de libellule ,
et de grands yeux étonnés
côtoient une trompe ressemblant davantage à un nez
avec des oreilles minuscules .
               Les hommes les représentant
ne l’ont fait           que par ouï-dire
un vague récit pour les décrire ;
un souvenir persistant

de légendes terribles :
de ces récits rapportés,
                il a suffi de les interpréter
et de les rendre plus visibles
( et donc plus concrets
dans leur apparence ):
de quoi nourrir les croyances,
les faisant passer pour des faits .

Toutes les variations étant permises ,
il n’est pas étonnant que l’imaginaire
abonde dans le bestiaire ,
et qu’on l’utilise
souvent dans la religion :
               la bête,          opposée à l’humain
( et à plus forte raison aux saints )
est objet de suspiscions

et de hantise
pour l’inconscient collectif ,
             voila donc le motif
qui les place en dehors de l’église
souvent agressifs
et symboles de terreur ,
beaucoup plus rares à l’intérieur.
Des moutons, et autres inoffensifs

accompagnent les humains .
Ce sont des animaux domestiques
beaucoup plus pacifiques
qui occupent le terrain
            Pas de vautours
ni oiseaux de proie
autour de la croix
ce serait plutôt basse-cour.

On voit bien , avec les rois mages
             l’âne et le boeuf,
avec un petit Jésus ( tout neuf ),
réunis pour une belle image
             comme une photo de groupe
par contre pas de loup , ni de renard :
ce n’est pas pas hasard
qu’ils ne sont pas dans la troupe !

Il fallait bien faire une sélection :
on ne pouvait pas rassembler tout le monde
à des kilomètres à la ronde :
            ne sont venus à la réunion
que les animaux familiers
qui accompagnent
les paysans de nos campagnes
( pas les fourmiliers

ni les dromadaires
pourtant sympathiques ):
          les exotiques
du bout de la terre
pouvant rester chez eux ,
car ceux des tropiques
ne correspondent pas à la symbolique
décidée par les dieux

et puis de toute façon
on a beau faire des prouesses,
on ne peut y mettre toutes les espèces :
        —- il y en a à foison  !
– on a choisi les plus communs
>          les résultats de cette élection
mènent bien à une discrimination:
on en prend       quelques uns

que chacun peut identifier :
               entre les allégoriques
            les fantastiques,
        les carnassiers
    et herbivores,
il y a abondance
et même concurrence :
          une vision multicolore

A l’instar des papillons ,
on pourrait en dresser un catalogue ;
           ce ne sont pas nos homologues
– il y en a des millions –
les bêtes des antipodes
ou des profondeurs
ont aussi leurs admirateurs
( comme les scarabées et gastéropodes ) .

RC – juin 2017

 

Elephant and Castle (Fresco in San Baudelio, Spain) - Art mozarabe — Wikipédia

 

 

 

 

 


Jacques Borel – le loup


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Le loup n’a que la peau, les os,

Mais il enterre sous la neige

Le plus précieux de ses fardeaux,

La victime veuve et dorée

Qui pourrait seule le nourrir

Il la préserve de mourir

Dans la glaciale profondeur

Où la raniment ses désirs

Puis, les yeux clos sur une image,

Brûlant d’un feu de pierreries,

Il file seul entre les pièges

Et c’est sa faim qui le nourrit.


Cathy Garcia – Sol y tierra


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le vent
entre chien et loup
la lune cachée
dans le haut tilleul
la douceur
léger frisson
imperceptible
sortilège

les démons de gouttières
miment le combat
quatre ombres
apparaissent
disparaissent
froissent les herbes

le val de mes seins
invite à la balade
et ma pensée va à l’homme.

mais dieu siffle mon âme
comme on siffle un chien

et mon âme danse
une joie
soûle d’espace
solitaire

sol y tierra

et le vent aussi
et le vent.


Jean Magalhaes – Dans le ventre du loup


19352631576                                                             artiste non  identifié

 

je suis

celui qui dort dans un mouchoir de poche

qui s’est toujours excusé

celui qui a des mains d’enfant

 

je suis

celui qui fait l’amour avec les ombres

qui court après les mots

n’attrape que le vent

 

je suis

celui qui fait tous les rêves

qui parle aux pierres

celui qui dort

 

dans le ventre du loup

( tiré d’un recueil portant le même nom  » dans le ventre du loup » : petite édition manuelle parue aux ateliers du hanneton, dans la Drôme )


Camille Loty Malebranche – Van Gogh


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V G  : champ aux fleurs de maïs

Van Gogh,
Tel le champ de blé aux corbeaux,
Tu es une lande, une source dont je voudrais être l’oiseau ivre.
Et, comme le peintre excentrique, je t’offrirais volontiers mon esgourde
Pour savourer ta voix d’éther, rubis de sang,
Sève-brise de ma verdeur de Myrte multicolore,
Ta voix ! Refuge contre les loups anthropomorphes !


Antonella Anedda – octobre, nuit


octobre, nuit

Accepte ce silence : le mot tassé dans le noir de la gorge comme une bête raidie,

comme le sanglier empaillé qui lors des orages d’octobre resplendissait dans le sous-sol.

Livide et tressé de paille, le cœur sec, sans fumée, et
pourtant contre l’éclair qui clouait la porte, chaque fois à l’endroit exact où la mort avait débuté : le vain recul, le corps ardent, le coup de pied du chasseur sur son flanc.

Ferme les yeux. Pense : lièvre, et renard et loup, appelle les bêtes qui chassées courent en rase campagne et se trouvent dans la fronde de la mort
ou du sommeil épuisées dans la tanière où seul celui qui est poursuivi connaît véritablement la nuit, véritablement le souffle.

Traduit par Francis Catalano et Antonella D’Agostino
—–

ottobre, notte

Accetta questo silenzio: la parola stretta nel buio della gola come una bestia irrigidita, come il cinghiale imbalsamato che nei temporali di ottobre scintillava in cantina.
Livido e intrecciato di paglia, il cuore secco, senza fumo, eppure contro il fulmine che inchiodava la porta, ogni volta nel punto esatto in cui era iniziato la morte: l’inutile indietreggiare, il corpo ardente, il calcio del cacciatore sul suo fianco.

Chiudi gli occhi. Pensa: lepre, e volpe e lupo, chiama le bestie che cacciate corrono sulla terra rasa e sono nella fionda del morire o dell’addormentarsi sfinite nella tana dove solo chi è inseguito conosce davvero la notte, davvero il respiro.

Extrait de: Notti di pace occidentale [Notturni]
Roma: Donzelli, 1999

Georges Séféris – Santorin 02


 

 La fin des temps et le déchaînenement du mal ( manuscrit de l'Apocalypse)

La fin des temps et le déchaînenement du mal ( manuscrit de l’Apocalypse)


Autels détruits
amis oubliés
feuilles de palmiers dans la boue

Laisse, si tu le peux, tes mains voyager
en cet angle du temps avec le bateau
qui toucha l’horizon.
Quand le dé frappa l’aire,
quand la lance frappa la cuirasse,
quand l’oeil reconnut l’étranger.
Et se tarit l’amour
en des âmes percées ;
quand tu regardes à l’entour et que tu trouves
partout les pieds fauchés
partout les mains inertes
partout les yeux obscurcis ;
quand il ne reste plus rien à choisir, pas même
la mort que tu désirais tienne,
en écoutant quelque grand cri,
le cri même du loup,
ton dû ;
laisse tes mains voyager, si tu le peux,
détache-toi du temps trompeur,
et sombre
comme sombre celui qui porte les grandes pierres.


Georges Séféris, in Gymnopédie [Poèmes 1933 – 1955, suivis de Trois poèmes secrets]
nrf Poésie/Gallimard


Bassam Hajjar – S’il faut parler de lui ( le conteur )


photo; Pentti Sammallahti

photo; Pentti Sammallahti

S’il faut parler de lui

Evidemment,

je ne suis pas le conteur

je ne suis pas le loup
ni la porte du jardin,

je ne sais pas avant la fin
comment vous mourez
avec la déception de celui qui manque le train

et attend le train d’une heure et demie.

Evidemment,
ce n’est pas moi qui attends
car je n’ai pas même écrit une lettre
pour qu’elle m’arrive dans un an
et que je m’en réjouisse
car j’aurai attendu
que cette fois je ne serai pas déçu,
que je m’en réjouisse car le temps passe,
et que ce n’est pas moi qui fabrique les aiguilles

ni qui frappe l’émail de la montre
pour savoir combien le temps passe.
Tout comme je n’ai pas de temps
pour jeter ce qui reste par la fenêtre ou sous la table
sans que les chiens n’y fassent attention, ni les marchands,
les écoliers.
Evidemment,
ce n’est pas moi le conteur
ce n’est pas moi qui tisse dans l’ombre
la toile d’araignée de mon âme
pour raconter comme qui a peur de voir,
pour voir comme qui a peur de raconter,
pour savoir comment réveiller vos esprits silencieux
et faire de vos rires un musée
pour les échos lointains,

ce vase !
Quand vous déterrez ma main
et que vous dites : que c’est beau
ce chandelier !
Quand vous déterrez mon cadavre
et que vous dites : voilà le conteur.
Mais ce n’est pas moi le conteur,
et je ne vois pas,
à présent,
l’utilité de ces paroles.
(Février 1983)

 

extrait de  « Tu me survivras »   ( actes/Sud )

 


Patti Smith – animaux sauvages


 

photo: Robert Mapplethorpe – crâne

 

 

 

 

 

Est-ce que les animaux crient comme les humains
quand leurs êtres aimés chancellent
pris au piège emportés par l’aval
de la rivière aux veines bleues

Est-ce que la femelle hurle
mimant le loup dans la douleur
est-ce que les lys trompettent le chiot
qu’on écorche dans l’écheveau de sa chair

Est-ce que les animaux crient comme les humains
comme t’ayant perdu
j’ai hurlé j’ai flanché
m’enroulant sur moi-même

Car c’est ainsi
que nous cognons le glacier
pieds nus mains vides
humains à peine

Négociant une sauvagerie
qui nous reste à apprendre
là où s’est arrêté le temps
là où il nous manque pour avancer

Patti Smith, Présages d’innocence, Christian Bourgois éditeur, 2007, pp. 96-97. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jacques Darras.

 

 

photo patries71

Photo   Patries71

 

 


Cathy Garcia – Le septième sens


pantin surréaliste auteur Marcel Caram, autres oeuvres visibles sur flickR

Le septième sens

L’âme nue, coquillage brisé
Dans un mouchoir de peau.
Une algue violette
Au cœur du ruisseau,
Un trou dans le four à vie !

L’air d’un rire, sa note, son parfum,
Puis la coupe noire, vin du pirate,
Les fards du défunt.

Mains sur le corps
Mirage !
L’île, clé du silence,
La valse des innocents
Accrochés aux nuages.

Caractères de loups tendres,
Des lunes
Trop pleines d’attendre,
Trouver où ranger
La toile et le venin !

Le chant de l’oiseau dans la neige,
L’enfant rouge avale un rasoir.
La traînée sombre du cortège,
Le port défendu de l’espoir.

Peut-être un dernier vol ivre

Vers la dent de l’Eden,
Pour  jeter têtes vives
Les bourreaux dans l’aven !

 

-.CATHY  GARCIA