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Bien au-delà des yeux – ( RC )


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                                          photographe non identifié

J’ai failli rencontrer

celle  qui n’a de voix,

que quelques traces

électroniques,

 

semées sur le clavier,

toujours en majuscules

laissées en marge

d’un jeu de lettres .

 –

J’imagine la Brésilienne

campée sur de solides guibolles,

et des mèches folles

s’échappant  du chapeau.

 –

Il y a du vent

hier et aujourd’hui.

Il aurait emporté ses paroles,

et son accent chantant.

 –

C’est une inconnue

qui observe au loin,

son amie s’éloigner:

devenant un tout petit point

 

Cette fois : elle est sans voix.

Ce n’est pas à cause du vent  :

                 elle ne se retourne pas,

a laissé mon image aussi, s’effacer.

 –

La plage n’est pas belle;

l’azur a déserté le ciel,

les parasols sont repliés,

peut-être l’été n’a-t-il jamais existé.

 

Il suffirait d’aller voir

de l’autre côté.

( Par la mer,  quand elle se calme

on le peut . )

 –

C’est l’immensité qui tangue,

mais sans doute au-delà

  •  et l’imagination se perd

bien au-delà des yeux.

Et de la baie de Rio.

RC – fev 2017


Albertine Sarrazin – Nous nous étions…


photo: Man Ray

                                                                                     photo: Man Ray

 

 

Nous nous étions promis retour à la Saint-Jean

Pour marier d’amour nos routes vagabondes

Tu me reviendrais pâle avec les lèvres blondes

Toute peine finie avec le long printemps

Sous ma tranquillité cachant le bel émoi

Je m’étais maquillée à l’air des longs voyages

Mais au bar le miroir dénonça nos visages

Lorsque tu m’apparus debout derrière moi

La joie étincela au contact de nos mains

Et nous sommes allés filant la Fantaisie

Jetant à travers champs l’éternité choisie

Pour qu’elle nous revînt au bout des lendemains

Les amants ont franchi les feux porte-bonheur

Ils dorment souriants l’aube les illumine

Les yeux clos tu conduis mes doigts vers ta poitrine

Et je griffe des majuscules sur ton coeur

Albertine Sarrazin


Ecrits des cendres – ( RC )


image – Anselm Kiefer – livre… extrait  de  « the  books  of Anselm Kiefer »

Point d’atouts de cartes,
D’une page, les taches,
Devenue brouillon, ça fâche,
Que d’une main j’écarte

L’écriture s’ensommeille,
Point de phrases ne rattrapent,
Sur la page , le stylo dérape,
C’est direction corbeille…

Mon roman ne veut pas se terminer,
Comme on dit   »  à l’eau de rose « ,
Les chapitres se décomposent,
Dans un autodafé de cheminée…

Aux flammes, et la fumée,
Tourbillonnent les mots,
Et les paroles en trop,
Autour du foyer, allumé.

Il n’y a plus rien à prendre,
S’éparpillent, points  et virgules,
Les belles lettres  et les majuscules
Se sont réduites  en cendres.

RC –  21juin et  3 juillet 2013

( incitation: « La page et moi »  de JoBougon…)

 


Dessin – enfances d’écriture (RC)


L’enfance du dessin ,          – et l’écriture est un parcours, , vagabonde,

Figures  et boucles, calligraphie orientée

Plaines et déliées…

La plume indique son chemin à l’encre, portée par le geste..

Et sur la page vierge, les signes qui s’y déposent

Son autant de traces  d’intentions, qui attendent.

Attendent, l’attention du lecteur

Cy Twombly   –  Apollon

Celui qui écrit  est un homme perdu dans une épaisse forêt blanche,

qui, avec le mouvement  de sa main, , se fraye un chemin à travers la densité du vide.

S’extrayant de l’anonymat   – le fil conducteur de la trace  d’encre,

C’est un tracé  ténu , une  voix d’encre  posée ,

où les lettres vagabondent et sautillent…

Gouttes tombées, pluie de lettres, embrouillamini des majuscules , ratures  et gommages, c’est sur la plage de papier que dansent  les mots et intentions.

calligramme Hendrix  ( hey Joe)

On pourrait les imaginer,  avoir leur propre vie, être prolixes en variations,  se lire dans des orientations aléatoires, comme fantaisistes…  – ou se modifier  la nuit  tombée  en d’autres  assemblages.

Ainsi je me rappelle, ma fille, petite, – comme une jeune  actrice – imitant l’attitude  du lecteur, mais prenant le journal à l’envers.

L’écriture  est vagabonde,   la lecture  a son sens, qui parfois  échappe  à celui qui…

l’écriture s’invente de nouveaux chemins….

Le pinceau du chinois, a soudain changé  sa courbe,  aplatie et grasse, le noir est devenu ténu aérien, puis s’évapore…  Le net est devenu question, et l’encre – peut-être  sympathique –  a nargué le visible…

L’écriture reste au dessin, la fille         – et le dessein.

RC  8 mai 2012

 

Que  je complète  avec  Claude Chambard ,avec   » Cet être devant soi « 

 

 

 

Le crayon est le chemin par lequel je peux parcourir le monde. Il me faut y arriver vivant. Ce n’est pas une mince affaire. J’ai toujours pensé que, dans le livre, le monde ne pouvait être vu qu’à hauteur d’enfance. L’écriture commence & prend fin dans une classe de cours préparatoire, pour toute la vie & pour tous les livres, dans toutes les bibliothèques. De même la lecture. Manipulations, transgressions, interprétations, variations —— archaïques. Encre violette & papier réglé à grandes marges, encrier en porcelaine, plumes Sergent-Major, buvards publicitaires… Apprendre à dessiner — les caractères — apprendre à dessiner — les traits portraits &c. — lisibilité, blanc, équilibre, approche, chasse, ce qu’on ne voit pas permet ce que l’on perçoit — comme on oublie la ponctuation lorsqu’elle est juste, lorsqu’elle va de soi la lecture va de soi — l’écriture jamais. Ton corps est dans le livre, personne ne le voit, même pas moi, mais je le reconnais, aussi les oiseaux dans le ciel & le corps des écrivains dans leur écriture.

pour Pascal Quignard

 

Claude Chambard, extrait de Cet être devant soi , Æncrages & cie, 2012.