Ne cherche pas à m’appeler, je suis déjà ailleurs… – ( RC )

photo R Koudelka
Dans les courbes de la nuit se cachent les pensées
les plus secrètes, là où je ne peux avoir accès,
car les lendemains ne connaissent pas de parole :
celles ci ne sont pas nées et le discours reste bouche bée,
n’émettant que des sons muets.
Si j’écris le chant, chacun y lit sa propre histoire,
les raisons de croire, et les chemins où ils s’égarent,
alors que déjà les lumières s’éteignent sur les jours passés,
brûlées par le sel, ensevelies sous les marches d’un temps,
où l’on n’espère plus de printemps .
Ne cherche pas à m’appeler, je suis déjà ailleurs.
RC – dec 2022
Un escalier vers l’infini ( RC )
Installation : David McCracken
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Je ne sais combien de marches il faut
pour gravir l’infini.
On dira qu’il y a le temps,
puisqu’on nous a promis
l’accès au paradis :
Il y a une contrepartie :
On ne peut y accéder qu’après
avoir laissé son corps
au magasin des antiquités ,
ceci dit on est beaucoup plus léger
et on ne compte plus ses efforts
pour emprunter l’escalier
qui a necessité d’abord
je ne sais combien
de menuisiers.
Au début on est très nombreux
à vouloir accéder à l’infini
que certains appellent
le Royaume des cieux
mais certains s’impatientent
ils trouvent la progression trop lente
– ( étant pris de doute
sur la destination de la route ,
et pourquoi cette pente ).
Bien entendu pour accéder au ciel
il faut penser à l’essentiel,
non pas au monotone :
et comme pas mal abandonnent
– ont-ils perdu la foi ?
– pourtant ils ne portent pas de croix !
Toujours est-il que , sur les inscrits
les candidats se raréfient,
c’est ce qui explique,
en toute logique
que l’escalier se rétrécit .
La progression est plus facile,
quand la population est divisée par mille,
– où sont passés les autres encore
– ça je l’ignore
car ils ne visent pas le haut.
-
Comme dans les jeux vidéo
ils sont bloqués au niveau inférieur
et pour leur plus grand malheur
ne disposent pas de vie de rechange,
de quelque astuce ou ficelle
( ni de l’aide des anges
qui ne prêtent pas leurs ailes ).
Et puis — est-ce une vision d’optique,
correspondant aux mathématiques :
les côtés de l’escalier
sont difficiles à mesurer :
la vie éternelle
ne tient pas compte des parallèles :
ne vous inquiétez pas pour autant:
comme je l’ai dit : vous avez tout votre temps
déjà vous avez dépassé les nuages
vous êtes sur le bon chemin
à cheval sur votre destin
n’oubliez pas vos prières,
ne croyez pas aux chimères
ne regardez pas en bas
– Attention au vertige !
Progressez comme ça :
c’est déjà un prodige
d’avoir quitté la terre
Comment, vous ne voyez toujours rien ?
Ah , mais tous les paroissiens
qui entreprennent ce voyage
clés en mains
ne peuvent tirer avantage
de rencontrer les saints
enfin pas tout de suite :
la visite, certes, ….est gratuite,
mais de ce belvédère
il est difficile de voir St Pierre :
Ce n’est pas un défaut de vision,
mais cela doit beaucoup aux conditions
atmosphériques : même avec un guide
c’est encore Dieu qui décide,
et ses desseins son impénétrables…
Comment ça, c’est discutable ?
Si vous avez une réclamation à faire
après votre grimpette
adressez-vous au secrétaire
qui examinera votre requête…
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RC – janv 2017
La tête du monstre de fer – ( RC )
photo perso: oeuvre du sculpteur A Jakovskis 2001 – europaparkos Vilnius
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Au détour de forêts mystérieuses
Les rideaux du soleil
Accrochés dans les brumes
Entre les troncs.
Bien sûr, ce qui vient à l’esprit
« les fées sont d’exquises danseuses » *
Et les doigts de lumière
Evoquent les légendes .
Celles des esprits des bois ;
Les marches taillées dans le granite,
proches d’un sommet
servant peut-être
A enjamber
L’échelle des siècles.
Un rituel du sang
Réservé aux initiés.
En progressant de clairière en clairière,
J’ai rencontré le monstre de fer.
Je ne peux expliquer comment
Sa tête seule , échoua là ….
Ni quelle bataille,
Avait déchiqueté le temps. .
La tête seule me regardait
de ses yeux vides .
La rouille déjà progressait
De jeunes pousses proliférant ;
La nature reconquiert ses droits,
Quelques décennies plus tard ,
Elle finira par digérer la face de métal.
Le corps décapité ayant continué sa marche,
Quelque temps, pour finir, avalé par l’étang voisin
Maintenant parcouru par des canards .
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RC- oct 2014
- les fées sont d’exquises danseuses ,est le titre d’une pièce pour piano de Claude Debussy
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