Conte d’élections, sur rimes en O ( RC )
Enluminure: la tempête apaisée
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Roi et prince sont dans un château –
Autour du château – des douves remplies d’eau –
Des nuages éclatent – nous dit la météo –
Ce qui veut dire – il ne fait pas beau –
On pourra constater qu’il pleut à seaux –
Roi et prince tombent alors dans les flots –
Point de barque qui passe – ni de bateau –
Couronne roule par le fond – avec ses émaux –
Si un des deux survit ( ou sauvera sa peau ) –
Flotteront des plumes – celles d’un beau chapeau –
Canards ou canetons suivent – ou autres animaux –
Le vol des vautours , voire des corbeaux –
Sous l’oeil étonné , de nombreux badeaux –
…. Succession oblige – se présentent hobereaux –
Ducs, barons, – Sarko et généraux –
Chacun à brandir son propre drapeau –
Et même , la faucille et le marteau –
On a toujours besoin de nouveaux héros –
Pour repartir de zéro –
Ne se voient pas de la cuirasse, les défauts –
Nouveau roi, nouveau prince – portés haut –
– Tu parles d’un cadeau ! –
Du grain ou de l’ivraie, savoir le vrai du faux –
Peu importe qui revêt l’hermine à son manteau –
On peut toujours promettre l’eldorado
> Tout ça c’est du pipeau
Il y a des princes et des vassaux
Plutôt que d’être égaux, c’est la parade des égo
Petit peuple se contente d’une chemise, ou d’un maillot –
( car point trop n’en faut )
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RC – 26 décembre 2012 – juin 2016
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Boris Vian – Ils cassent le monde
Ils cassent le monde
En petits morceaux
Ils cassent le monde
A coups de marteau
Mais ça m’est égal
Ça m’est bien égal
Il en reste assez pour moi
Il en reste assez
Il suffit que j’aime
Une plume bleue
Un chemin de sable
Un oiseau peureux
Il suffit que j’aime
Un brin d’herbe mince
Une goutte de rosée
Un grillon de bois
Ils peuvent casser le monde
En petits morceaux
Il en reste assez pour moi
Il en reste assez
J’aurais toujours un peu d’air
Un petit filet de vie
Dans l’oeil un peu de lumière
Et le vent dans les orties
Et même, et même
S’ils me mettent en prison
Il en reste assez pour moi
Il en reste assez
Il suffit que j’aime
Cette pierre corrodée
Ces crochets de fer
Où s’attarde un peu de sang
Je l’aime, je l’aime
La planche usée de mon lit
La paillasse et le châlit
La poussière de soleil
J’aime le judas qui s’ouvre
Les hommes qui sont entrés
Qui s’avancent, qui m’emmènent
Retrouver la vie du monde
Et retrouver la couleur
J’aime ces deux longs montants
Ce couteau triangulaire
Ces messieurs vêtus de noir
C’est ma fête et je suis fier
Je l’aime, je l’aime
Ce panier rempli de son
Où je vais poser ma tête
Oh, je l’aime pour de bon
Il suffit que j’aime
Un petit brin d’herbe bleue
Une goutte de rosée
Un amour d’oiseau peureux
Ils cassent le monde
Avec leurs marteaux pesants
Il en reste assez pour moi
Il en reste assez, mon coeur
–
Boris Vian
D’autres écrits de grands auteurs, Eluard, Marceline Desbordes-Valmore, sont visibles sur lireouimais quoi…
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Pablo Neruda – Ode à la table
Je retourne sur le site avec les traductions de Pierre Clavilier, au sujet de Neruda…
j’éparpille mes poèmes
étale le pain, le vin, le rôti
(navire noir des rêves)
j’y pose ciseaux, tasses, clous
oeillets, marteaux.table fidèle
porte-rêve, porte-vie
titan quadrupède.
C’est la table du riche
imposante et caracolante
telle un paquebot fabuleux
chargé d’abondance.
C’est la table du gourmet
belle et bien mise
dans son décor de langoustes gothiques
C’est la table solitaire
dans la salle à manger chez notre tante
quand s’ouvrent les rideaux
et pénètre un rayon de l’été
fin comme une épée
pour saluer sur la table sombre
la paix transparente des cerises.
C’est aussi la table lointaine, la table pauvre
où l’on prépare la couronne
pour un mineur mort,
et de cette table monte l’odeur froide
de la dernière douleur.
Tout près, il y a la petite table
dans cette alcôve sombre
où brûle l’amour et ses incendies
et sur la table
un gant de femme encore tremblant
comme l’écorce du feu.
Le monde est une table
entourée de miel et de fumée
couverte de pommes et de sang.
La table est dressée
elle attend les banquets ou la mort
et nous savons quand
elle nous appellera:
invités à la guerre ou au repas
il nous faut décider
savoir comment s’habiller
pour s’asseoir à la grande table
si nous mettrons les pantalons de la haine
ou la chemise d’amour fraîchement lavée
mais il faut faire vite
on nous appelle déjà:
les enfants, à table !
® Pierre Clavilier
10:34 Publié dans Odes