François Corvol – Quelque chose – VIII -Métro St Paul
VIII
Toujours le même clochard à enjamber
à l’entrée du métro saint-paul
toujours la même masse
dans laquelle déambuler se frayer un chemin
dans le néant comme dans la vie, dense et hystérique
cette masse a tous les jours la même tête
chacun colérique de ne pas valoir un clou
jungle compliquée fiévreuse caduque
l’esprit de la foule fait naître
à la fois la fuite et l’amour dans mon cœur
je ferme parfois le poing dans ma poche
position de combat absolument ridicule
je fais finalement comme les autres
j’erre je dense je pense je travaille j’attends
Vois le navire, il s’enlise – (RC )
–
Tanguent les beaux navires …
La mer n’est pas fidèle
Soudainement froncée de sels,
– L’horizon y chavire,
Au milieu de montagnes d’écume,
Vois le navire, il s’enlise,
Et des vagues subit l’emprise
Perdu sous le tissu des brumes…
– Sous la tempête inhumaine,
Que deviennent les ailes des bateaux,
Et qu’il pleut à seaux,
Quand les océans se déchaînent ?
Partis, fiers matelots
Maintenant , marins épuisés,
Mats et coques brisés,
Et les voiles en lambeaux…
Sombres les espoirs,
Autres qu’une dérive,
Et sans autre perspective
— Que la mer à boire…
Sous des paquets d’eau,
D’émeraude profonde,
Il y a dessous , tout un monde,
… Une foule aux yeux clos,
Des poissons des abysses,
Aux promesses de naufrages
Se fraient un passage,
Remontant des précipices.
Nourris de l’imagination,
De l’esprit du dessinateur,
Voila , de toutes les peurs,
Le réel, dépassant la fiction.
Les calamars géants,
Au regard incrédule,
Déploient leurs tentacules,
Sous un ciel phosphorescent,
Avides d’un prochain repas,
Sous la colère des éléments,
Les monstres attendent patiemment
Du frêle navire, le trépas….
….
Lorsque la tempête retombe,
Flottent encore quelques débris,
Il n’y a plus d’elle , qu’une mer assombrie,
De tout son poids de masse profonde.
—
RC – février 2014
La pierre s’était prise à rêver tout haut, qu’elle était un oiseau – ( RC )
–
–
Sans effort apparent,
Le caillou ricoche sur l’onde
Et prolonge sa course, au monde
Aussi loin que la force du jet,
Le lui permet…
–
Et la tanche regarde perplexe,
De son oeil convexe,
La pierre, toujours bondissante,
Si légère, … Elle chante
Ayant quitté ma main…
–
Puis, attirée par sa propre masse,
Et finissant par percer la surface,
Elle se résoud enfin ,
Finissant de flirter avec l’eau ,
A quitter sa peau,
–
Et s’enfonce à regrets, dessous,
Après quelques remous,
– mouillée de ses pleurs amers-
Quittant brusquement l’atmosphère,
Pour se reposer au fond,
–
…Entourée de poissons.
– L’eau poursuit vers l’aval,
Sa course, ( et l’avale ),
Maintenant bondissant ,
De toute la puissance du courant.
–
La pierre s’était prise à rêver tout haut,
Qu’elle était un oiseau… .
–
RC – 6 décembre 2013
Promesses des couleurs ( RC)
Peinture Fr Kupka – étude pour une fugue à deux couleurs ( disques de Newton ) 1911 –
–
Promesse de la profondeur des cieux,
J’ai dans les mains un bleu profond,
Qui, au parcours des étoiles, serait plafond
Ou bien , dans le soir du désert, …. un feu
–
Aux alentours, pas une âme qui vive,
Juste sur les pierres, des lézards,
Statues à l’oeil qui brille, sous le bleu Hoggar,
Un point de lumière entre deux rives…
–
Promesse de la profondeur des eaux,
– Couleurs des antipodes,
J’ai dans les mains un vert émeraude,
Balancé, roulis des bateaux.
–
Aux alentours, bercé de vagues légères,
Evoluant vers un milieu plus stable,
Les tortues, se dirigent vers le sable,
Quand émergent au loin, les terres.
–
Promesses de l’agriculture,
Dans les plaines immenses,
Le printemps, est tout en nuances,
Et prépare l’été des blés mûrs
–
Aux alentours, la floraison des fruitiers
Cache presque entièrement les terres brunes,
Il y aura cette année beaucoup de prunes,
Pour les piller, les oiseaux ne se feront pas prier…
–
Promesse de la caresse de l’été,
Le jaune de Naples, s’étend sur les plages,
En quittant la chaise longue, je nage,
Aussi dans la lumière, reflétée.
–
Aux alentours, l’horizon s’effile,
Les bateaux des pêcheurs, sont peints en rouge,
On les voit au loin lentement, qui bougent,
Carmins, et vermillons. – ils passent, entre les îles.
–
Promesse d’un jour limpide,
Je traverse une place des odeurs,
C’est le marché aux fleurs,
Ignorant les teintes insipides,
–
Aux alentours, des légumes candides,
Ajustés en grand nombre,
Célèbrent les verts des concombres,
Et les citrons aux jaunes acides.
–
Promesse du parcours des anges,
Les crayons des vitraux se dégrisent,
Au sol dallé, ou sur les piliers de l’église,
En associant bleus outremers, et oranges.
–
Aux alentours, dorures et peintures blanches,
Baroque et rococo, multiplient les ors,
Où papillonnent moulures et décors,
Pour la messe des couleurs, c’est aussi dimanche.
–
Anges ou démons si la lumière s’éteint
( …..on ne parlera pas du noir,
C’est , à ce qu’on dit, pour le purgatoire, )
– Méfions nous des « on dit », sur la toile il n’y aurait plus rien…
–
J’ignore ces êtres pourvus d’ailettes,
Porteurs d’auréoles ou de maléfice,
Jouant des feux d’enfer ou d’artifice
Comme je préfère sortir et peintures et palette .
–
– RC – 19 septembre 2013
–

photo perso: Hyeres, Collegiale St Paul, couleurs de vitrail au sol + ombre d’ Arthémisia – 2011
–
texte auquel je pourrais adjoindre celui-ci ( d’abord dans sa langue originale, le corse):
François Viangalli : Densité brève
U culore nasce incù u lume :
ch’ellu si cambii u lume,
s’alteranu i culori.
Postu chì ùn ci sὸ paesi
chì t’abbianu listesa polvera.
Ùn si pὸ parte da qualsiasi locu
senza mutà se stessu,
corpu è anima :
facenu l’ochji l’esiliu primu.
La couleur naît de la lumière :
que la lumière change,
les couleurs s’altèrent.
Comme il n’est de pays
qui soient jumeaux,
qui portent la même poussière.
On ne peut quitter un lieu,
sans se changer soi-même,
corps et âme :
c’est le regard qui crée
le premier exil.
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