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Carnets de dessins de Provence – ( RC )


dessin RC , environs de La Tour d’Aigues

A chausser les sandales de l’enfance,
te rappelles-tu des champs de Provence ?
Tu n’avais pas à ouvrir ton herbier,
le vent poussait ses vagues dans le blé,
comme dans la farandole
de la voix du mistral
soufflant par rafales
sur le plateau de Valensole.

Tu l’as parcouru à pied,
en sortant ton carnet à dessins.
De jeunes lavandes
déroulaient leurs points
avec de curieuses perspectives,
où le feuillage argenté
des oliviers, voisine celui, plus léger
de la promesse des amandes.

Contre les montagnes lointaines,
je me souviens de la teinte rousse
tirant sur le brun de Sienne,
opposée aux vertes pousses
des rangées de vignes
étagées sur les pentes ,
offertes à la cuisson du soleil.

Tu en parcours les lignes,
un soleil de miel
sous tes sandales de silence.
Les ceps crient
dans l’impatience
d’une lumière de braise
aux senteurs de la garrigue.

Bousculés dans les croquis
d’encre et de fusain,
sont-ils l’essence
de la morsure du midi
que rien n’apaise ,
calmés seulement
par la douceur de lait des figues…?


Tourner les vents en sa faveur – ( RC )


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Tu voyages
au pays des croyances,
et, tu constates,
qu’à chaque imprévu de l’existence,
on a trouvé une parade,
une carte maîtresse, une antidote…

Dans leur distribution ,
réparties au petit bonheur,
il y a le catalogue complet
des corps célestes et des oracles funestes,
qu’on peut trouver,
dispersés aux quatre vents,
comme des graines de pissenlit .

Même inégalement répartis,
il est tout à fait possible
d’y trouver son compte,
de se vouer à son saint patron,
comme pour les muses,
et les dieux antiques :

Quel augure permettra
de franchir les obstacles;
de tourner les vents en sa faveur
combattre les maladies,
favoriser la fertilité
et même prévenir de la morsure
des chiens enragés
– à chaque chose malheur est bon – dit-on..

Il y a aussi ceux qui représentent
la musique, l’architecture,
la corporation des chapeliers,
des orfèvres, etc .

Les églises sont un florilège
où se multiplient les représentations
en statues de bois ou de plâtre,
tel Saint Tugen
( qui guérirait des maux de dents ),
ou ceux – les plus courants –
qu’on reconnaît à leurs attributs.

Ils répondent « présent ! « ,
au garde-à-vous,
à la façon d’une bible sculptée.
Certains – comme saint Evénec,
bien connu des bretons,
ne représentent qu’eux-mêmes –
( à moins qu’on ait oublié
quels étaient leurs bienfaits ) …

Protecteurs ou indifférents,
montrés sur les tympans romans
ou les peintures gothiques,
leur regard est vide,
mais sans doute plein
de bonnes intentions….

( quoiqu’on connaisse aussi
ces poupées, où on peut planter
des aiguilles ) ;
ou ces fétiches bardés de clous
pour conjurer le sort,
ou au contraire
le provoquer…

Ce sont aussi des objets
crées pour repousser les mauvais esprits,
ou représentés par des masques
sereins ou grimaçants ,
dans lesquels s’incarnent
la puissance des ancêtres.

Mais on peut penser
à ces chouettes crucifiées,
beaucoup plus proches de chez nous,
clouées sur les portes,
pour avoir eu le malheur
de naître emplumées,
et porteuses – parait- il – de mauvais présages.

 

RC mai 2017

 

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Le bruit du sang dans les veines ( RC )


art: bracelet romain en forme de serpents. site d’Alain Truong

 

 

Vivre  avec le bruit du sang dans les  veines,
Et le treillis  rouge ,             modelant la vie,
Noué tout contre le corps,   et qui nous lie,
Aussi bien          le sang d’encre de la peine

Circule à notre insu, à l’abri des lumières
Les anneaux se contractent, et donnent leur poison,
Le coeur  sous le feu de  la trahison,
Ces artères, ces veines se changent en vipères…

Il est du corps  comme une  sculpture,
A l’âme habillée  de chair,
Qui soupire , dans l’inconnu, erre
Mais connaît aussi du serpent, sa morsure.

 

 

RC   – 5 avril 2013

 


Amin Khan – J’oublie les visages


peinture: Jean Fautrier: tête d’otage

J’oublie les visages
je ne me souviens pas des noms
j’endure
des odeurs et des gestes
des parfums
l’émail de certaines morsures
la vision de certains sangs
des courbes des accidents
des silences profonds
de longues heures et des jours
certains mots les mêmes
des lèvres
de roses luisants
dans la même lumière
du même regard
plein de douceur et d’amertume

AMIN KHAN   ( poète  algérien )


Pierre Lieutaghi – la lumière close


peinture perso:       volcanologie 1984

Vous savez, la confiance est incroyablement tenace, elle s’effondre, et puis un jour, sans qu’on s’en rende compte, elle s’applique à faire l’inventaire des biens qui ont échappé à la tornade, ceux dont la banalité nous assure dans la traversée du monde. On se rend compte alors que les possessions de la paix sont bien plus vastes qu’on ne l’imaginait, qu’elles s’étendent jusque sous nos pas les plus ivres.
Peut-être bien que tout cela est inventé. Mais alors, que dire de l’amour ? Quand on le vit, on ne sait pas qu’on invente, on est dans l’illusion d’un jour à nous seul, pour nous seul, et l’on veut que l’autre, dont on attend la même illusion, y reconnaisse le sien.
Encore faut-il savoir éviter la rencontre avec un cœur de pierre, ça ne peut faire qu’une histoire aveuglante en dehors de toute métaphore, les pierres ne font pas la différence, surtout quand on leur a préparé depuis toujours cet ignoble creux où la pureté sans rire ni salive ni morsures ni cris imprime le canevas de toutes les pétrifications. Je me suis trompé sur la nature de la pureté, voilà tout.

Mais c’est fini, c’est fini, je suis seulement surexposé, les images véritables sont intactes, le ciel tellement sombre de midi, le jasmin, les bouvreuils qui sont comme des rêves de coquelicots, votre visage. Peut-être qu’un de ces matins, je me réveillerai et je verrai la nuit.
Peut-être aussi que cette tête finira par s’ouvrir entre des mains sans inquiétude et que l’excès de lumière s’en ira pour de bon, et alors il n’y aura plus de confusion entre la pierre et le cœur.
Au revoir.
Une dernière chose, quand on a ouvert ma valise, on a trouvé un morceau de géode emballé dans du papier journal, Paolo avait dû le glisser entre les vêtements à mon départ. J’ai senti des cristaux trapus, à six faces, à peu près sûrement du quartz.
J’ai demandé la couleur à Mathilde, elle m’a dit c’est noir, on dirait du jais. Même devant la lumière ? oui, même devant la lumière, il n’y a aucune transparence, en profondeur aussi c’est complètement noir.

Pierre Lieutaghi     la lumière close   –  un extrait  d’un texte publié  dans  « carnets de campagne »

 


J’ai cherché le feu – (RC)


image: montage perso

Je cherche le feu, le voici

J’ai fouillé dans les cendres

Et senti la poudre tiède de douceur

Accompagnée des morsures des braises.

J’ai cherché dans les cendres

De la mémoire du silence

Et je t’ai trouvée,        douceur,

Avec la soif du corps en braises

J’ai cherché la douceur

Entre la demeure des instants

La patience d’un feu – soudain

De nouveau ravage mon âme.

RC  – 28 mai 2012

Avec la réponse de M, visible  sur ecriscris

 

Et celle de Manouchka, notre poétesse québécoise…

 

Braise apaisante sur mes froidures passées,
Son feu coule dans mes veines sclérosées,
Je me réchauffe à sa mâle présence,
Qui dessine sur ma peau de faïence,
Un poème tatoué à l’encre rouge,
Où les couleurs du couchant, encore bougent….

 

—-


Robert Piccamiglio – Midlands 05 Plus tard


photographie - Marc Riboud

 

PLUS TARD

Plus tard dans le tumulte glacé
de cette nuit je me suis souvenu de l’exaltation
infinie qui grondait en moi.

Elle venait se perdre
comme autant de germes hautes et fragiles
autour d’une cité faite d’incroyables
et féroces remparts.
Le pouvoir.

Comme une rivière bondissante charriant le sang.
Plus tard dans la nuit
j’ai revu le fleuve charriant les morts
d’où venait le sang.

Avec le ciel au-dessus l’amant rompu. Avec la terre en bas maîtresse incandescente. douloureuse, attentive.

Le monde n’étant lui-même que soumis à la dérision grandissante du pouvoir.

A la rivière d’abord puis au fleuve tout entier.
L’homme ne devenant qu’un infime sillon tracé par d’autres avant lui. Stupéfait.

Le pouvoir triomphant toujours. Perçant chaque fois un peu plus la faiblesse de l’argile entourant le cœur engouffré dans le cœur de l’homme.

Le troupeau suivant le troupeau le berger, étrange inconnu.

Nous marchons ainsi jusqu’à l’épuisement

Parcourant autant de vies que de morsures.

Avec pour nous accompagner nous le troupeau puis la machine cet animal creusant son trou protégeant son territoire.

 

 

 

 

en accompagnement, cette  belle photo de Marc Riboud, qui est sans  doute  l’un des photo-journalisme que je vénère le plus.