Revenue – ( RC )
Au delà,
des rues du carrefour,
des voitures immobiles,
et des arbres qui attendent.
un banc
au milieu d’une place,
peut-être un jardin,
qu’on ne distingue pas bien:
il y a un mur
aux écritures blanches.
puis une lumière dorée
comme si on voyait au travers
alors, laissant tomber les pinceaux ,
j’irai dessiner sur la muraille une porte ,
je l’ouvrirai sans bruit
et saurai que tu es revenue…
–
RC – fev 2018
Benjamin Fondane – des pays qui fondaient comme un fruit dans la bouche
graffiti Mona-Lisa cf site
II y eut autrefois des choses sans musique
des pays qui fondaient comme un fruit dans la bouche
des étés haletants
des silences plus frais que neige
des êtres qui entraient en nous et qui sortaient
sans qu’on s’en rendît compte,
nourritures, paresses savantes, jus d’oiseaux
idiomes heureux, échanges,
de sorte qu’on était ce qui entrait en nous
parfois un cil, parfois un ange
parfois un baobab où la hache faisait
des blessures délicieuses
et quand, souvent, des femmes ou des sangsues roses
se collaient à nos corps
on éprouvait soudain la joie d’être mangé
et le délice affreux de devenir un autre.
Ces choses n’avaient ni commencement ni fin
cela ne finissait pas d’être
pas un trou, pas la moindre fissure
pas un visage lézardé !
les hommes se tenaient coude à coude, serrés,
comme pour empêcher qu’on y passe
pas une absence entre deux vagues
pas un ravin entre deux mots
pas un passage entre deux seins
lourds, gras,
et pourtant au travers de la muraille lisse
quelque chose suintait
l’écho ranci d’une fête étrange, une sueur de musique,
les gouttes d’un sang frais qui caillait aussitôt
sur la peau morte du monde.
Je n’ai jamais rien compris à ces mélanges
j’entrais et d’autres sortaient,
puis d’autres qui tournaient autour du crépuscule
ou se penchaient sur les saisons
et nul ne se doutait que ce n’était pas là
la terre ferme,
que l’océan n’était pas un jardin suspendu
j’entrais à tout instant dans la vie des autres
et j’oubliais de fermer les portes après moi
chacun portait en lui un monde doux et tendre
des coins où l’on était surpris par la douceur
je n’avais pas de nom, comment s’appelaient-ils ?
C’était si bon de ne pas avoir de figure,
si bon d’être poreux, ouvert,
qu’à l’heure de dormir chacun
se disait en rêvant : – que sera-t-elle encore
cette grande journée, sans dieu, du lendemain ?
*Benjamin Fondane
Face aux dentelles de Montmirail ( RC )
—
Quelque part,
adossé au corps de pierre,
La pente offrait
juste un répit,
un souffle,
avant de reprendre,
plus drue,
Plein sud,là où la terre n’a pas accès.
Seuls les arbres
accrochés, on ne sait comment,
dans une anfractuosité,
Têtus.
C’est une muraille qui se dresse
Une construction gigantesque de clair,
poussée sur un bleu
sans faille, où elle s’appuie .
Je la devine
plus que je ne la vois,
– lui tournant le dos –
mais elle répercute
Comme un miroir
La chaleur et les embruns solaires.
Embruns étirés de senteurs âpres
de romarins et de buis.
Je suis assis
devant une parenthèse
— aride
d’éboulis grisâtres .
On se demande
ce qui retient
ces roches déchiquetées, mâchées…
de dévaler plus bas :
Juste comme si la montagne
s’ était débarrassée,
en s’élevant,
d’éléments superflus.
A la manière d’un serpent
abandonnant sa mue:
une enveloppe
devenue inutile.
C’est un jour
où le mistral se repose :
En automne,
on n’entend plus les cigales
Mais le murmure de la vallée lointaine ;
peut-être un ruisseau,
Le léger bruissement des feuillages ,
les traits espacés du vol de rares oiseaux.
Au fond, le soleil caresse
des rangées de vignes
soigneusement peignées,
virant sur les jaunes, les orangés.
Peu de champ libre,
avant qu’une nouvelle vague minérale,
s’élève, accélère son mouvement,
jusqu’à ce que chênes et pins abandonnent.
Au pied d’une grande couronne de pierres,
sentinelles verticales,
à la façon de supports de dolmens,
dont il manquerait la table…
Forteresse censée surveiller
une mer disparue,
oublieuse,
bue, par le basculement des choses
inscrit dans la roche,
et ainsi de suite jusqu’aux îles
de la Méditerranée attendant un signal
pour se dresser à leur tour .
–
RC – oct 2015
voir aussi https://ecritscrisdotcom.wordpress.com/2016/03/20/quelques-pas-vers-les-dentelles-1-rc/
La Dame de Shanghaï ( RC )
( évidemment en rapport avec le film du même nom, d’Orson Welles )
–
Tu as vu comme elle danse ?
Et avec quelle élégance !
Elle, ou elles – sont plusieurs
Semblables comme des soeurs
Les demoiselles d’un soir
… Multipliées par les miroirs
Attraction foraine, passer à la trappe
Magasin d’accessoires, farces et attrapes ..
Le jeu des silhouettes,
– Le doigt sur la gâchette,
Trois coups de revolver
– Et ma tête à l’envers
Que je retrouve dans les glaces en miettes,
C’est une drôle de fête
Et ça fait quoi comme effet
De combattre les reflets ?
On ne sait plus trop ce qui bouge
Derrière le rideau rouge
– La Dame de Shanghaï
Vient d’ passer la muraille, ….
En robe de soirée .
Ca va encore foirer !
Cà n’me dit rien qui vaille
Toute cette pagaille
Ce jeu des illusions
Qui fait la confusion
— « Nothing else?
Mister Welles ? »
Je n’ai plus de cartouches,
c’est bientôt moi, la mouche !
Je vais bien me payer une balle,
Et tout ça pour que dalle!
C’est vraiment pas de chance !
Pan ! PAN ! PAN ! Et puis condoléances…
Le canon de l’arme qui pète,
N’a pas besoin d’interprète…
Claquement sec dans l’atmosphère
Et la fin des p’tites affaires !
A foncer dans l’ décor
C’était tenter le sort,
Immobilisé
Dans le verre brisé
Rira qui voudra
Tourne la caméra !
Tu veux un autographe ?
Sur ma tombe, un épitaphe…
Une galette, quelque chose à boire ?
———Transformé en passoire
Trois coups de revolver
Quand tout va de travers ….
La passion , la course du désespoir,
C’est comme dans les films noirs …
Regardez, cet acteur qui déconne !!
—- Paraît qu’ y a eu maldonne,
Erreur sur la personne …
Encore un coup d’Orson…
–
RC – 15 décembre 2012
C-Jeanney – Carrée
Ainsi que vous pourrez le constater, le texte de CJeanney, présente des similitudes avec l’article suivant » de ma plume… » ( mines antipersonnel), car c’est à partir de celui-ci, que j’ai composé celui-là… ( du blog « tentatives » chez eklablog )
J’ai pensé , en le lisant, au « Désert des tartares » de D Buzzati
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—-
cjeanney dans -DÉPLACEMENTS-le 8 Septembre 2009 à 10:34
c’est une terre carrée fissurée.
fissurée de fleuves aux eaux taries, le sol si plat, personne n’habite sur les rives des fleuves, des fleuves morts sur une terre carrée.
au nord-ouest, en arc de cercle, les fondations d’une ancienne muraille : tourelles, sièges, meurtrières, tout s’est évaporé. Les flèches de feu, les catapultes, les capitaines. Et les trophées suspendus aux chaînes des ceinturons ont oublié qu’ils se balançaient.
au centre de la terre carrée, un bout de métal dépasse. On pense que c’est un dieu, mais on en n’est pas sûr. Et même lui prie pour se rappeler.
—
Christine Jeanney
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Pascal Boulanger – Vent de terre
Carpe Diem
Vent de terre
Si, en écartant les murailles du monde
vous regardez de haut en bas
entre le ciel plein d’étoiles
et les couleurs de la terre,
Vous verrez pour en rire :
Noces et divorces
ce pêle-mêle naviguant sans boussole.