La journée du peintre – ( RC )
peinture: P Cézanne — parc du château noir 1904
Je ne sais
quand les journées s’allongent :
je suis pieds et poings liés
à la chanson du pinceau,
et j’en oublie les heures,
jusqu’à ce que je plonge
dans l’oubli des choses,
ainsi mon ombre me devance
sur la toile ébauchée.
Et chante aussi la rivière
sous le pont de pierres…
J’ai confondu ce que j’ai peint
avec une journée d’été.
Je dépose la lumière par petites touches ,
qui se rassemblent contre l’obscurité.
Je marche dans une clairière
que j’ai inventée ,
je m’y égare un peu .
La futaie change soudain d’aspect
sous l’éclairage électrique .
Elle n’a plus cet attrait magique
des rideaux de feuilles .
Je continuerai demain
marchant dans sentes et chemins :
il y a des couleurs qui s’attardent
à la façon de feuilles d’automne
Elles sont aussi sur mes mains tachées ;
je vais aller me nettoyer
puisqu’une journée à peindre
vient de s’éteindre
sans bruit ,
remplacée progressivement par la nuit .
–
RC – juin 2019
Alain Paire – Soif inquiète
La terre serait soif inquiète. Il n’y aurait plus
que la nuit de l’oubli, des formes sombres
à peine terrestres, le silence de la lumière.
Et parmi les fruits de la veille, comme une ressemblance,
le sourd battement d’une âme, tout au moins le pardon de l’image,
la détresse d’une main qui se blesse ou bien qui aime.
(Un rossignol accueillait chaque nuit l’eau bue par la lumière.)
extrait de « la maison silencieuse »
Gabriela Mistral – Pudeur
dessin – A Watteau
Si tu me regardes, je deviens belle
comme l’herbe qui a reçu la rosée,
et ils ne reconnaîtront pas ma face glorieuse,
les grands roseaux quand je descendrai à la rivière.
J’ai honte de ma bouche triste,
de ma voix cassée et de mes genoux rudes;
maintenant que tu es venu et m’as regardée
je me suis trouvée pauvre et me suis sentie nue.
Tu n’as pas trouvé de pierre dans le chemin
plus dépourvue de lumière dans l’aurore
que cette femme sur qui tu as levé
les yeux en écoutant son chant.
Je me tairai pour que ceux qui passent
dans la plaine ne connaissent pas mon bonheur
à l’incendie qu’il met sur mon front grossier
et au tremblement de ma main…
C’est la nuit et l’herbe reçoit la rosée;
regarde-moi longuement et parle avec tendresse,
car demain en descendant à la rivière
celle que tu as embrassée aura de la beauté.
Jean-Baptiste Tati-Loutard – le rocher sur la rive
Celui qui l’assiste devient rocher sur la rive :
Il pleure mais la roche ne rend que sa source.
Nous avons chargé le ciel de tant de soleils
Que nous avons oublié qu’en ce monde
La nuit fut première.
C’était si doux de croire – (Susanne Derève)

Albert Houthuesen – Walk to the Moon, (Childhood Command)
C’était si doux de croire
qu’on aurait pu courir sur l’échine de la nuit
avec des doigts de fée
y broder des étoiles, des galons d’or
tirer le fil d’opale d’un blanc rayon de lune
pour se laisse glisser de la frange des cimes
jusqu’à la cotte de velours des prairies d’été
Mais la nuit a secoué l’échine
la nuit n’aime pas sentir sur son dos nu
les doigts légers des fées
Mon chariot a versé
de la fourche des cimes
sur la cotte de velours sombre des prairies d’été
et le croissant acéré de la lune
avec son fin poignard d’argent
a tranché un à un les fils célestes
m’a coupé le chemin du rêve
pour me jeter à terre comme un petit Poucet
les cailloux de sa poche
dispersés aux quatre coins du ciel
Aussi je vous le dis le jour pâlit et meurt
sans bruit sous les chandelles du soir
tandis que la nuit chante
Mais n’allez pas défaire le jour flétri pour habiller
la nuit de songes avec vos doigts de fée
Ne vous approchez pas
Écoutez là seulement chanter
Répandre des étoiles – ( RC )
L’origine des temps
se perd dans le lointain,
et la nuit clignote
de myriades d’étoiles,
qui nourrissent les rêves.
Tu as arpenté les terres nues,
les chemins creux,
en recueillant dans tes bras,
comme tu le souhaitais,
les moissons du ciel.
As tu réussi à capter
l’un d’entre ces astres
lors de tes dérives buissonnières,
qui t’emportent
loin de la lourde glaise des jours ?
La bonne étoile te suit alors,
et la bonne fortune
te précède dans le parcours des dunes
même dans la nuit la plus noire
juste quand tu t’endors…
Tu confies tes espoirs
en traçant un bout de route
dans les figures de zodiaques,
qui se reflètent ( on s’en doute )
dans des flaques.
Mais le lendemain
fait pâlir les rêves,
comme si des branches,
se retirait la sève
au petit matin…
Crois-tu que c’est lui qui les a tués
et que les étoiles s’enterrent,
de façon que la journée,
ne puisse les toucher,
ni personne les atteindre ?
En fait ils ne vivent que la nuit,
lorsque disparaît le soleil
et il n’y a rien qui les remplace
jusqu’à ce que le sommeil
arrive pour les repeindre
mais l’étoile que tu as choisie
va te guider sur ton destin
même si on ne la voit pas,
tu répands des fleurs avec tes mains
et la glace fond sous tes doigts.
Alda Merini – la notte
La chose la plus magnifique est la nuit
quand tombent les dernières épouvantes
et que l’âme se lance à l’aventure.
Lui se tait en ton sein
comme résorbé par le sang
qui prend enfin la couleur de Dieu
et toi tu pries pour qu’il se taise à jamais
pour ne pas l’entendre telle une plénitude fixe
jusqu’à l’intérieur des murs.
–
La cosa più superba è la notte
quando cadono gli ultimi spaventi
e l’anima si getta all’avventura.
Lui tace nel tuo grembo
come riassorbito dal sangue
che finalmente si colora di Dio
e tu preghi che taccia per sempre
per non sentirlo come un rigoglio fisso
fin dentro le pareti.
Parfum – (Susanne Derève)

Photo Robert Mapplethorpe
Il suffirait d’un mot
Lait fleur
enfant mémoire
Il suffirait d’un son
le do nu du dormeur
Et le si de silence
Il suffirait la nuit
de franchir le miroir
dans une douce errance
de flâner en chemin
de cueillir dans le noir
une rose sans tain
et dans un vertige soudain
il suffirait
d’un mot
qui nous dirait
parfum
Pierre Béarn – les clefs du voyage
peinture : Jozsef Rippl-Ronai
J’apportai les clefs du voyage
à la prisonnière effrayée
de se découvrir vulnérable…
Négligeant l’azur arraché
qui parait d’attraits la magie
l’éléphant piétina les roses.
Quand tu partis vêtue de nuit
serrant ton cœur telle une lampe
éclairant ta honte soumise
l’éléphant n’aimait plus les roses.
Pierre Seghers – La nuit qui vient
- Jean François Millet – Nuit étoilée
La nuit qui vient
est-elle étoilée ? Mais que m’importent les étoiles
dans ce cheminement, dans cette migration
Quand l’épaisseur est traversée pour atteindre l’autre soi-même
De l’Autre, fou, et de silence, immobile gisant debout ?
La nuit qui vient à ma rencontre, elle a franchi tant de montagnes
Et dévalé tant de collines et roulé tant de galets morts
qui rêvaient d’elle, son souffle a déplacé tant d’astres
Retroussé tant de vagues et courbé tant de joncs
Qu’elle m’emporte, comme un berger dans son manteau
ses bêtes passées à un autre
Seul, retranché de tous, et en lui-même, absent .
Dis-moi,
ma
vie
Editions Bruno Doucey
au début de la rue de la Nuit – ( RC )
sculpture: Colleen Madamombe, 1964-2009 (Zimbabwe )
Je me suis assis
au début de la rue de la Nuit,
le coeur sombre
ne sachant que faire de mes mains.
Je devais attendre sans le savoir
que se fende
la Montagne Noire,
ou retrouver le chemin clair
de pierres lisses
bordé du dessin des lys .
J’ai cru en apercevoir le contour,
apparu de façon brève,
au petit jour .
Les oiseaux blancs auraient pu être mon guide,
mais l’orage a été le plus rapide .
Assis au début d’un rêve nocturne,
toujours perdu dans les brumes…
–
RC – aout 2018
une épaisse nuit à l’intérieur de la terre ( RC )
mains négatives: grotte de Roucadour
Sous nos pieds,
à l’intérieur de la terre,
de l’épaisse nuit
ce sont peut-être des regrets teintés de noir,
où , dans les profondeurs souterraines
les cavernes se font,
creusant le silence d’une paix de ténèbres .
Et la roche suinte
d’un goutte à goutte lent, régulier,
marquant l’éternité du temps,
qui finit par la dissoudre,
en faire des cathédrales
aux statues pétrifiées,
ignorant celles des saints .
Personne n’y prie
et appelle de soupirs .
Pas d’âmes affligées
pleurant d’anciens amours,
et pourtant jaillissent
des larmes en cristaux
durcies par l’attente.
Il est loin aussi, le temps
où les hommes se rassemblaient
à l’abri des grottes,
autour de braises fumantes,
espérant survivre aux lendemains,
en peignant sur les parois
l’espoir des trophées de chasse .
Ils ont prolongé leur présence,
traversé des millénaires,
et toujours en silence,
leurs mains négatives
tâtonnent , inscrites sur la roche
à l’obscurité sans écho
qui se prolonge jusqu’à nous .
–
RC – juin 2018
Lucie Taïeb – s’éveiller
Edward Munch – nuit à St Cloud
en Normandie s’éveiller la nuit ne pas être éveillé ne pas savoir se réveiller
seul, dans un lit différent dans une configuration différente des ombres et du noir et
d’une voix qu’on ne se connaît pas dire dans la nuit au corps qui devrait être là
« j’ai peur » puis frôler du dos de la main non ce corps ami mais le mur et
reconnaître le crépi savoir, alors, quel est ce lit et pourquoi seul
se rendormir.
Guy Goffette – Dimanche
La cloche du beurrier ancien dans le soleil d’octobre est une église oubliée sur la table des hommes
Elle rassemble autour d’elle les miettes éclatantes du cœur qui a vécu son heure de gloire dans le partage et l’apaisement des cris pépites qu’une main sèmera sur le gazon
bleu pour les oiseaux les insectes les dieux invisibles qui portent la lumière au creux des arbres immobiles et dans l’espace ouvert la nuit entre nos songes
Le vin des nuits – (Susanne Derève)

Jean Bertholle – Don Quichotte
Je marche je marche
au cœur des nuits
là où les sarments de lune fomentent
les désespoirs ordinaires
la parole nue des lendemains
Marches-tu toi ? Me vois-tu qui piétine ?
– Tu me réponds que le vin est tiré le vin bu –
Lune pâle sous le vent qui se rit de moi
Un caballero se profile là-bas le vent
l’effacera-t-il dans les vapeurs ténues de la nuit
Terre bue comme le vin des vignes
qui monte en blanches volutes
Mon cavalier les lignes de vie au loin
sont éteintes
Mouche le bleu fanal des chandelles
avant que la parole nue du matin
ne divague et m’appelle
De la nuit – (Susanne Derève)
Tom Thomson – Northern lights
Dans la dernière heure bleue de la nuit
celle qui précède le jour
avec ses bouquets d’arbres nus
ses cheminées de gel
irai-je dire mes voyages
Irai-je les dire dans la dernière heure
de la nuit qui chasse le sommeil
aligne les années
celle où je peux faire mentalement le compte
des rêves avortés des attentes futiles
des étreintes passées un vieux calendrier inutile
à jeter au panier
avec le rideau qui masque la fenêtre
pour retrouver l’instant de dire les
peut-être
cette heure où tu parlais de voyages lointains
du fracas de l’absence
celle où je naviguais dans le faisceau
des phares à travers un rideau de pluie
une simple trouée au hasard
Si je tapais du pied pour faire basculer
la dernière heure bleue de la nuit
dans le gouffre du matin
loin de l’éveil figé d’attente
si je disais n’essaie pas de la retenir
le jour éclairerait les premiers
nids aux arbres et je dessinerais
à l’horizon des voiles blanches
temps d’insouciance mer étale
je dirais tu es revenu
je dirais je n’écrirai plus
mais voilà que les mots se pressent
les mots en avalanche
comme la neige fraiche
plein la bouche et les yeux
et dans les yeux
ces failles où la couleur gommée
resurgit au soleil
rouge grenat entaille
de sang vif
pour dissoudre la dernière heure
de la nuit
cette heure où tu sommeilles
l’heure bleue qui s’enfuit
Miguel Veyrat – derrière ta voix
peinture : Don Van Vliet
—raison qui s’embrase
parmi les rires et les jeux,
dans l’espace
de lumière noire je cherche
À renaître
—ou bien à naître sans mourir,
comme au moment
fragile de ton esprit
où tu me conçus
Et que devint
soudainement chant
la nuit infinie
—ta propre peur, ma propre
crainte de prononcer ton nom.
Rabindranath Tagore – Au petit matin
photo Nicolas Grandmangin
Au petit matin on murmura que nous allions partir en barque, toi seulement et moi,
et qu’aucune âme au monde ne saurait jamais rien de notre pèlerinage nous menant éternellement vers un autre nulle part.
Sur cet océan sans rivages, devant ton sourire attentif, silencieux, mes chants s’amplifieraient en mélodies, libres comme les vagues, libres de la servitude des mots.
Le temps n ’est-il pas venu ? Qu ’il y a-t-il encore à faire ?
Vois, le soir est descendu sur la plage et dans la lumière faiblissante les oiseaux de mer regagnent leurs nids.
Qui sait quand, les amarres rompues, la barque, telle la dernière lueur du couchant, s’évanouira dans la nuit ?
Joseph Brodsky – Dédicace à Gleb Gorbovski
Quitter l’amour, dans le soleil de midi, sans retour,
et le chuchotement de l’herbe sur les pelouses qui s’enfuient.
Dans le nuage brûlant du jour, dans le crépuscule assoupi
l’aboiement des chiens de la nuit traverse les allées obliques.
Il faut résister à notre époque sombre et courir au-delà de ces années,
il faut oublier à chaque souffrance nouvelle l’infortune d’hier,
accepter à chaque instant la blessure et la douleur,
pour entrer paisible dans la brume des aurores vierges.
L’automne et impétueux en cette année de voyages,
les processions silencieuses du rouge et du noir longent le ciel,
près des arbres nus les feuilles s’envolent et trébuchent
contre les fenêtres et les pierres
Joseph Brodsky
La buée que fait la nuit- (Susanne Derève)

Helen Frankenthaler ‘Draft’ 1969
Dériver ce soir
à la remorque des nuages,
suivre leur course grise,
ponctuée d’un vol d’oiseaux
aile ivre qui s’élance
sur l’horizon des champs pâlis
s’éparpille et s’enfuit
au-delà des coteaux
Attendre qu’il fasse tout à fait noir
poser les lèvres sur la vitre
pour y goûter la buée que fait
la nuit
y écouter le bruit qu’elle fait
en s’engouffrant par la fenêtre
avec ses échasses de vent
et ses éclats de mandoline
ses bras qui se referment
sur un air d’accordeone
Peut-être te rejoindrai-je alors
qui sait
ce n’est que la musique
d’une nuit rompue à l’absence
où les mots ne disent plus rien de nous
que cet éveil où ils nous tiennent
à la remorque de l’aile immense
de l’oiseau
un chant qui tait son nom
se nourrit du silence
et brûle ses vaisseaux
C’est juste le hasard, qui m’a placé là – ( RC )
Je n’ai qu’à ouvrir les yeux,
après la nuit,
pour me lancer dans l’aventure,
– car j’ai tout oublié d’avant – ,
et chaque matin
est un nouvel apprentissage,
une nouvelle enfance.
C’est avec elle, que je dois progresser,
apprendre à marcher .
J’essaie de reconnaître les choses,
qui se penchent sur moi,
je leur donne des noms,
qui semblent venir d’une autre langue,
et ne sais qu’en faire.
C’est juste le hasard,
qui m’a placé là .
–
RC – janv 2018
Miguel Veyrat – la clé de ma langue
peinture Isabel Quintanilla , 1998-99 nocturne
—-
LA CLÉ de ma langue
a profané ta demeure:
seule une voix résonnait
entre le couchant et l’aurore.
J’ignore même qui vit
en cette nuit,
qui chante,
et même qui est mort.
Il faudra tout renommer
à la lumière indécise de cette vie:
toi, tu vas droit à la source,
malgré la nuit .
Francis VILLAIN – son grand couteau de nuit
sculpture – bronze nuragique ( Sardaigne ) musée de Sassari
Il s’est approché lentement
Avec son grand poignard en peau de nuit
Il a pris, il a pris tout son temps
Avec son grand poignard en peau d’ennui
Il a reniflé dans le vent
Avec son grand sourire de trop de nuit
Il a souri de toutes ses dents
Pour laisser t’approcher lentement
Il a pris tout, tout son temps
De son flanc a délogé une lame de fer
Avec son grand couteau en peau de fer
Il s’est mis à tuer le temps
Il avait froid dans ses grands vents
Il avait de la poule à chair
Il était nu, nu comme un ver
Avec sa lame en peau de fer
Avec son grand couteau de nuit
Il ne savait vraiment pas quoi faire
Il faisait froid, il est parti.
James Joyce – musique de chambre V
assemblage: Joseph Cornell » Cassiopea »
V
Quand l’étoile s’élance au paradis,
Timide et inconsolée, chastement ;
Daigne entendre dans le soir assoupi
Celui qui à ta porte vient chantant.
Son chant est plus tendre que la rosée
Et lui est venu pour te visiter.
Ô ne te penche dans la rêverie
Quand il t’appelle à l’orée de la nuit.
Ni ne songe «Qui est donc le chanteur
Dont tombe ce chant qui parle à mon cœur ?»
Reconnais l’amoureuse mélopée :
C’est moi qui suis venu te visiter.
V
When the shy star goes forth in heaven
All maidenly, disconsolate,
Hear you amid the drowsy even
One who is singing by your gate.
His song is softer than the dew
And he is come to visit you.
O bend no more in revery
When he at eventide is calling.
Nor muse : Who may this singer be
Whose song about my heart is falling ?
Know you by this, the lover’s chant,
’Tis I that am your visitant.
Raymond QUENEAU (Sourde est la nuit l’ombre la brume)
EDVARD MUNCH ( Nuit d’ été, Asgardstrand ), 1902
Sourde est la nuit l’ombre la brume
Sourd est l’arbre sourd le caillou
Sourd est le marteau sur l’enclume
Sourde est la mer sourd le hibou
Aveugles la nuit et la pierre
Aveugles l’herbe et les épis
Aveugle est la taupe sous terre
Aveugle un noyau dans le fruit
Muettes la nuit et la misère
Muets sont les chants et la prairie
Muette est la clarté de l’air
Muet le bois le lac le cri
Infirme est toute la nature
Infirmes sont bêtes et rocs
Infirme est la caricature
Infirme l’idiot qui débloque
Mais qui voit ? qui entend ? qui parle ?