Leon-Paul Fargue – Intérieur
peinture Anton Pieck
Des toiles, des choses sèches pendent aux poutres…
Le vieux fusil dort fixement
Au mur clair…
Rêve à ton gré.
Tout est comme autrefois.
Ecoute…
La haute cheminée
Fait sa plainte ancienne et son odeur éteinte
Et tasse son échine de vieil oiseau noir…
Elle porte encore au front ses images d’âme crue
Et ses vases de loterie aux prénoms d’or…
Et l’horloge recluse dans l’ombre et la bure
Berce son cœur avec une douceur obscure…
Pareils à des visages ronds de spectateurs
Les plats se penchent aux balcons du vieux dressoir
Où des files de fruits qui font la chaîne, fleurent
Dans leur ruelle d’ombre couleur d’aubergine…
J’ouvre un tiroir où je vois passer des noix vides,
Un gros couteau à vingt lames, qui contient tout,
Et l’ombre de mes mains qui glisse sur les choses…
Et ce sont des couleurs vivantes, refroidies…
Et ce sont des odeurs d’intimités suries…
Ça sent la malle, et le poivre des vieux départs,
Et le livre de classe, et la chapelle éteinte…
Un vent tiède pousse des guêpes
Frapper à la lucarne bleue…
Un grand chat doucement passe comme on chuchote,
Et vous lève un regard où veille l’ennui sage
Du soleil dans la douve aux lentilles d’or vert…
Sois calme. Tout est là comme autrefois.
Ecoute…
Léon-Paul FARGUE « Pour la musique » (Gallimard)
Miguel Veyrat – tu reviendras
montage perso 2011
–
Tu reviendras
novice
et illuminée,
réclamer
le miroir congelé
dans mes pupilles.
Même ma langue
ignorera où se trouve
ma conscience, formulant
à nouveau les questions:
Au-delà
de la limite, par dessus les voix.
Tu viendras. Et tu parleras ma langue.
Et je jouerai avec elle.
À l’angle droit
de mon dernier regard
—impossible
raison,
voûte obscure
des espaces
à l’ombre,
à nouveau
je te regarderai.
Boîte à vent – ( RC )
installation architecturale Christophe Bénichou, région de Montpellier
Tu vois cette grande boîte,
posée sur la montagne,
obscure , close sur elle-même
personne n’y rentre et personne n’a la clef.
Tout est immobile autour et se dessèche.
Les rayons du soleil rebondissent sur elle
et semblent s’amplifier.
Les insectes ont fait silence,
il n’y a aucun oiseau visible.
Peut-être sont-ils grillés.
Dans cette boîte, j’y ai caché le vent.
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RC – mai 2017
Théo Léger – Perdu dans la Montagne un soir de novembre
Perdu dans la Montagne un soir de novembre
Amples demeures des morts. La sourde. L’endormie.
J’entends se déchirer la caresse des branches
contre sa pierre énorme
j’entends la violente larme des torrents.
Je rôde sur une rive de fumée.
J’éveille une barque l’eau neutre les roseaux.
Je trouble à peine leur silence.
Je passe et ne laisse aucune ombre.
Chemin perdu, j’appelle.
A peine un écho me répond
un vent d’hiver.
Où sont les anciens voyageurs ?
Où sont mes camarades mes frères ?
Où sont ils ?
Soupir innombrable des pins contre une pente obscure.
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Gilles- Marie Chenot – Scot
SCOT
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Roule tout au long
Des rues d’Edimbourg
Suivant le temps qui farde
Les nuances de ta voix
Dans un monde où tout
S’efface dans la mouvance
Des reconstructions en tous genres
Et des équations insolubles
Pas de deux pour tout en un
La danse des traceuses
S’effeuille ligne après ligne
Sur la clarté obscure de la nuit
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Gilles- Marie Chenot , alias Gmc, nous propose sous son blog de beaux textes poétiques, que je vous propose de visiter.
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Albert Roig – Mer adolescente

Peinture: Richard Diebenkorn - ( de la série "Ocean Park" ) voir article http://taylorannephotography.blogspot.com/2011/10/richard-diebenkorn-ocean-park.html
Mer adolescente
I Comme tout resplendit avec toi près de moi endormie, verts nets, de verre, la fleur plus nette encore, obscure adolescente de sel. II Et à présent Comme la roche sur laquelle repose ton sommeil. Au doux brisant. Et lentement tu en dévides l’écheveau, main. Et tu le tisses, souffle. Non, ne te réveille pas encore. III Et si tu étais, gardée entre les feuilles des cieux du présent, la fleur rigide. ----
Mar adolescent
I Com resplendeix tot amb tu a la vora adormida, nets verds, de vidre, la flor més neta, fosca adolescent de sal. II I ara. Com la sorra on recolzes el son. Al fluix rompent. I en desfàs lentament el cabdell, mà. I el teixeixes, alè. No, no et despertis encara. III I als cels d’ara si hi fossis contra els seus fulls desada, l’erta flor.