Wang Wei – vague de saules
en rangées distinctes
se succèdent les arbres
magnifiques
leurs ombres inversées
traversent
les ondes cristallines
pas comme dans les canaux du Palais impérial
où le vent du printemps
attriste toutes les séparations

Wang Wei est un poète chinois du 8è siècle
Désintégration – un chant dans les hautes terres de Mongolie – ( RC )
Le soir devient un fait établi,
et s’étale, presque fluide,
sur les hautes plaines de Mongolie.
On perçoit dans la langueur des ombres,
un chant étrange, comme si les pierres,
en tapis, étaient le fruit de paroles sèches,
une métaphore du désert chantant :
le reste de l’explosion des roches,
répandu dans le désert de Gobi,
l’esprit des dunes,
une désintégration,
à échelle minuscule,
un fractionnement ( en tous petit morceaux ) ,
qui s’assemblent au gré du vent,
avec une fluidité lente .
> On n’en cerne pas les formes,
car les dunes se déplacent
et ondulent, dans le silence,
( ou presque, )
puisque ce chant ténu,
serait celui ,
produit par la friction
de quantités de grains de sable,
auquel l’horizon répond,
en un bourdonnement continu
qui semble de loin,
horizontal, justement,
mais recule,
de même que les distances
alors que l’on s’avance .
Les ondes s’étirant,
tant dans l’espace aérien , qu’au sol,
arrivant à fusionner.
–
RC – juill 2017
–
basé sur la musique de Tristan Murail » désintégration »,
composée précisément par rapport au désert de Gobi .
Ismaël Kadare – L’Antenne
L’ANTENNE (fragment)
Quand vient la nuit
Vous dormez, dormez.
Tandis que moi je veille
Sur le toit incliné.
Les courants d’air m’assaillent de tous les côtés,
La pluie souvent me trempe,
Parfois les vents me fouettent.
Je suis comme un bâton dressé vers les cieux,
Un morceau de fer,
Rien qu’un morceau de fer.
Mais chacun de mes millimètres
Connaît plus de langues
Que tous les linguistes,
Vivants ou morts.
Chacun de mes millimètres qui capte les émissions
Comprend à la musique
Plus que tous les musiciens.
Chacune de mes particules
Sait plus de nouvelles
Que n’en savent ensemble
Les reporters et les politiciens.
Je les saisis toutes
Je les récolte toutes
Moi,
Le bâton dressé haut dans le ciel.
Les speakers s’adressent à moi des quatre horizons.
Les uns parlent,
D’autres crient,
D’autres encore hurlent.
Au milieu d’orchestres et de bises hivernales
De la chronique du monde
J’entends la trompette.
Et moi je sais le langage des ondes
Le parler gris des horizons sans fin.
La lettre latine, la cyrillique, les hiéroglyphes
Descendent comme des araignées
Sur mon corps.
A travers mon corps elles passent
Toutes, toutes :
Les victoires des peuples,
Les manoeuvres des diplomates
Et, comme des griffes de tigres, les clauses des traités
Pour notre Albanie,
Calomnie, calomnie, calomnie.
Ismail KADARE in « La nouvelle poésie albanaise » (P.-J. Oswald)
–
I Kadare est surtout connu pour son oeuvre romancière… mais on peut découvrir certaines créations poétiques sur le site de Guess Who…
Rassasié d’une vie – ( RC )
-art – enluminure médiévale: La Hague, MMW, 10 A 11, detail of fol. 320r (‘Souls ascending to Janus and Terminus, who are holding the world; souls descending to hell’). , La Cité de Dieu Translation from the Latin by Raoul de Presles. Paris; c. 1475
La tête est venue
La première…
Et l’extérieur tout d’un coup
Se projette au -dedans
Envahit les poumons ,
Le premier jour d’un cri,
C’était naissance,
Ce jour là ,
Et la tête la première,
Arrivée au monde, – lourde.
> Les corps usés, inversement ,
Le dernier jour, de cri,
Voient les âmes s’échapper,
Du monde, …. légères .
– On ne sait où,
Personne ne peut les suivre,
Ni ici, ni sur terre
Ou ailleurs, si elles se rassemblent ,
Ou reviennent,
Redistribuées à d’autres,
Si leur souffle se transmet,
Par les ondes,
Ou les racines,
Et sous d’autres formes.
Figures passagères,
Locataires des corps,
Rassasiés d’une vie,
Qui peut recommencer ,
Au sortir de la nuit.
–
RC – avril 2014
Chr Jeanney – tentatives – Habitacle /54
l’écriture de c Jeanney, dans sa section « habitacles »…. nous dit

volume: corps "fossile" Pompéï
habitacle en L jambes repliées position chien de fusil
le soir le plus souvent une chape noire tombe monte et
retombe remonte revient de loin est depuis l’ancestral
dos incurvé et tête penchée de la légèreté avant toute
chose faire avec vieux réflexes du cerveau reptilien à
l’arrière de soi une ribambelle d’ancêtres se place là
genoux collés au ventre et s’enroulant dans la chaleur
qu’on se fabrique seul à seuls un feu de grotte éteint
depuis longtemps ainsi le chien tourne sur lui-même un
peu avant de s’allonger la mémoire des cellules radote
quand le danger est loin ou un autre danger s’allume à
l’affût des ondes électriques vaines vains les efforts
jambes repliées sous couverture le doux du soir repose
–