Et femme et homme sur une route blanchie par la lune froide d’hiver Portant aux épaules un enfant légendaire qui n’était pas de leur chair Marchant dans la campagne nocturne comme si le son lointain d’un clocher Accompagnait leurs pas résonnant sur la chaussée durcie par gel récent Comme si la route pavée berçait l’enfant dressant la tête vers la galaxie D’Orion où le balancement des étoiles emportait son regard tout ébloui Par la nuit d’hiver comme s’il eût quitté un village un récit inachevé D’une vieille grand-mère bredouillant près d’un feu à peine enflammé Passant d’une épaule à l’autre sans dire mot la tête appuyée à la nuit Les yeux toujours rivés aux étoiles comme si chaleur dût venir de si loin, Réchauffant ses petites mains agrippées nerveusement au cou de celle celui Qui allongeait le pas vers un autre village où joyeuses lumières dansaient. Quand le matin trop clair rendait vaine toute impatiente longue vue Sombres-Voyants, Clairs-Aveugles, Sourds-Entendants, Rêveurs si courts L’Astronome les emportait dans son sommeil comme des valises-Optiques Sucres ou Vergers trempés de pluie enfouis sous récits pauvres d’ici Sans renier les malaises trop décrits ou gommés dans le Sous-Entendu Le Trop-Su, comme si la planète tournait autrement dans l’incomparable Hiver, loin des vareuses béates poudrées de gel de soleils trop fades Comme si le rire d’une matinale musicienne égayait l’enfant-Orphelin Par jeux ou ruses par gammes taquines quasi humaines afin que nul être Ne soit ici montré du doigt comme surplus d’indifférence oeuvre pieuse Où Absence de grâce se rattrapait en ricanements gras en défi charitable Rendant la ville si inhabitable comme si des vents acides la corrodaient.
sculpture tête ; Modigliani Metropolitan Museum of art NYC
Au delà de la violence extrême du manque qu’il exprime, en dehors de la rupture de lignée causée par le statut d’orphelin du père, ce besoin désespéré d’être vu, reconnu comme semblable, d’avoir contact, avec un de ses parents, qui peut guider la construction du moi, sans être universel, ni général, ni peut-être très répandu, me semble avoir été éprouvé par beaucoup, avec plus ou moins de prégnance.
Lui (ou elle, car, finalement, ce besoin de lignée va de fils à père, et de fille à mère, même si dans ce cas ce peut être refus entêté, en renoncement) parmi tous ces blocs imposants auprès desquels on est un enfançon, «encore plus chétif que les hommes faits, lesquels sont minuscules, imperceptibles au regard des sommets», eux les adultes «toujours occupés, même quand on ne leur voyait pas d’activité précise, qu’on avait la légèreté de croire qu’on ne fait rien quand on est assis dans un fauteuil, les yeux dans le vague alors qu’eux l’étaient.
Ils mettaient un temps considérable pour détourner leurs pensées de choses qui devaient être extrêmement compliquées, ajustées au dixième de millimètre, comme des machines-outils, ou vastes, encombrantes comme des buffets à deux-corps avec des rosaces, des colonnettes, des sculptures en bas-relief et des garnitures en bronze..»
cloche de bronze, fouilles chinoises de Sanxingdui