Amina Saïd – Tous les présages sont faux

Tous les présages sont faux
ni les traces des oiseaux
ni la direction de leur vol
ne traduiront jamais la pensée des dieux
et sur l’autel de leur propre démesure
de longs couteaux de silence sacrifient nos passions
croyant partager le pain du monde
c’est ton corps que tu rompais
il s’en écoulait un peu de cendre
dont jalonner les sentiers orphelins
la vie est un voyage avec une mort à chaque escale
Repeindre Saint-Sébastien – ( RC )

Une surface, mais une profondeur,
comme celle de l’eau,
différente et pourtant semblable ,
dissimulée sous les reflets.
Est-ce l’enveloppe,
la fragilité de la peau
qui nous maintient
de chair ?
Cible des flèches
mon corps sera mon âme
que rien ne distingue,
cachée sous son manteau clair.
J’effacerai les cicatrices
et la peau, comme l’eau
se refermera sur elle-même
sans laisser de traces.
Les flèches tomberont toutes seules :
je repeindrai les blessures
avec un peu de peinture
j’enlèverai la douleur
détachant Saint-Sébastien
du poids de son corps
et de l’attraction terrestre
en trouvant la juste couleur.
Voilà que les pinceaux annulent
la trace des blessures,
la peau refermée
sous ton regard incrédule.
La torsion de son être
échappe aux passions,
du moins, celles que l’on connaît
et sous sa surface, le corps renaît.
RC
voir d’autres reproductions des encres de Françoise Petrovitch, sur des sites,
et ici même, avec ce choix , que j’ai voulu représentatif…
Nathalie Lauro – Je flotterai
–
Je flotterai avec
Mes rêves et mes passions,
Bien au dessus,
De toutes ces questions.
Je ne voudrais à aucun prix
Poser les pieds nus sur la terre
Et découvrir un beau matin,
Le sang, les larmes et la poussière.
Mais je voudrais à juste prix
Profiter d’un si grand mystère,
Alors ignorer de plein gré
Incertitudes et suspicions
Puis le cloître de leur prison,
Le noir, le gris, l’enfer, l’envers
Et le pouvoir de tes poisons.
Marcel Olscamp – Confidence
MARCEL OLSCAMP, poèmes, poésie, poétique
.
.

photo Nikole Ramsay
CONFIDENCE
Le siècle des passions vient mourir au chevet
d’un langage cassé qui perd jusqu’à mon nom
entre les draps trop blancs d’une chambre scellée
dans une ville éteinte aux rues déshabillées
comme une femme nue sous le regard d’un chat
qui serait mort d’ennui le jour de ma naissance
en lissant son pelage au fond d’un autobus
qui tournerait le coin de la rue pour de bon
Le père se déchire en tenant dans sa main
le chapelet noirci de ses jours de vivant
nous regardons les murs pour ne pas voir le mal
nous glisser sous les yeux de sa voix trébuchante
Mais dites aux coins des rues que je ne viendrai plus
voir mourir les années dans cette chambre blanche
la force m’est venue de porter mon regard
sur le désert de miel entre le monde et moi
la tempête est cassée, le monde est hors de lui
et tous les vieux secrets se déchirent au vent
Ce cher Apollon, sur son char, et sa concurrence à Icare – (RC)
photo perso – champs de la banlieue d’Amsterdam
–
Le cher d’Apollon
qui joue au papillon
ne s’appuie en ses sphères
que sur l’atmosphère
On ne sait s’il déménage
Avec tous ses bagages
Et traverse les airs
De son allure autoritaire.
–
Et peut-être qu’il essuie
D’intempéries, la pluie
Et aussi les présages
De lourds nuages
Pour monter plus haut
Que sur son escabeau
Et voir au-dessus
L’horizon moussu
Le tapis des dieux
Et un temps radieux
Eloigné de terre
Mais c’est solitaire
Que son char avance
Immobile danse
Divin omnibus
(elle le dira, ….Vénus)
Qu’il aurait pu prendre…
–
– mais faudra attendre
le prochain T E R
çui qui vient derrière
Le train de la passion
Fait toutes les stations
C’était avant Christ
Et sa passion triste
Qui filait tout droit
Vers sa mise en croix
Et resta en tas
Sur le Golgotha.
–
Apollon invente
De nouvelles sentes
Et va sans pareil
Vers le soleil
Sans solliciter courroux
D’un Jupiter jaloux ,
– A l’instar d’Icare
Qui vécut cauchemar
Et retomba sitôt
Tête première dans l’eau
Réviser sa copie
De la mythologie –
–
Sauve qui peut !
N’est pas Apollon qui veut !
——–
Article provoqué par la réponse d’Arthémisia à mon post….
Ainsi que celle de JoBougon, par rapport à cette même réaction
la chute d’Icare, dessin d’élève de 5è –2010
voir aussi le 22 novembre le nouvel article avec les poésies d’Alice…
Châteaux en Espagne, une île au milieu des mers ( RC )

Château d’Atienza – Espagne
—
Il faut je crois, suivre une ligne,
Un fil invisible, de ténacité,
Pour construire, comme on dirait,
Ces « châteaux en Espagne »,
–
Se parsèment, dans les espaces vides,
Sur des monticules ocre , et jaune,
Des constructions, que l’on dirait utopiques,
Jamais achevées, et offertes aux vents,
–
Les semblables propulsant les ailes,
Des moulins à vent,
Chargés par Don Quichotte,
– Sa lance en avant.
–
Oui, les grandes ailes tournent,
Et souvent broient du vide,
Elles tournent dans la tête,
Comme de grands oiseaux blancs,
–
Peut-être ne sont-ils maintenant
Qu’une image, marquant les esprits,
Marqué par l’imaginaire,
photo: forteresse reconstituée de Mornas, vallée du Rhône, Vaucluse
–
Ainsi se remontent,
Pour le bonheur des touristes,
D’anciennes forteresses,
Habitées par les ronces.
–
Tout y est sécurisé,
On y accède en voiture,
On domine la vallée,
Et son autoroute.
–
C’est une belle carte postale,
Dont les assaillants d’antan,
Devaient garder dans leur cœur,
Pour raconter leurs exploits aux enfants,
–
Ah, les volées de flèches,
Tirées des meurtrières !
Ah, l’huile bouillante, rebondissant,
Aux pieds de la tour !
–
Ah les beaux boulets,
De plus de cinq livres,
Expédiés au-dessus des murailles,
Par notre artillerie…. !
–
Et ces soldats aux casques luisants,
Leurs écus aux couleurs du drapeau,
Claquant sur le donjon,
Leurs cottes de maille… !
–
Ceux qui ont de la chance,
Lors des fêtes médiévales,
Peuvent voir, dans des copies d’habits d’époque,
La comtesse ,tout en damas et soieries, et sa suite….
–
Tout est reconstitué,
Des histoires de batailles,
Dans le moindre détail,
En panneaux explicatifs.
–
C’est très instructif,
On a même refait, au milieu de la cour,
Un grand jouet, grandeur nature,
C’est une catapulte – toute neuve-,
–
…. Qui participe au décor…
Car ici tout est décor,
Il n’y a plus de vie,
Dans les salles désertes,
–
Que l’on occupe,
– Toujours pour la culture, –
Par des pièces énigmatiques,
De grands artistes
–
Inspirés sans doute,
Par les murs en pierres lourdes,
Les verres troubles des fenêtres,
Et le sol en terre cuite.
–
Les salles d’exposition sont climatisées,
L’humidité est contrôlée,
La lumière est étudiée,
Pour le confort du visiteur
–
Le département s’occupe de tout :
De l’art, de la culture, et du patrimoine,
( Et le fait savoir en multipliant,
Publicités et affiches voyantes. )
–
Mais revenons à nos châteaux en Espagne,
Ou plutôt ce que chacun,
Dans la discrétion et l’intime,
Construit pour lui-même…
–
En forgeant son monde intérieur,
De formes et de couleurs,
De passions et d’utopies,
En se construisant la vie…
–
Une île au milieu des mers,
Perdurant contre vents et marées,
Ouvert à la perspective des sens,
- c’est un grand voyage –
–
A s’arc-bouter,
Contre les éléments hostiles,
Mais les vagues sont porteuses,
Vous y serez bientôt…
–
– Je vous y invite –
–
RC- 13 octobre 2013

Moulins de Consuegra – Espagne