Paul Vincensini – Le poids de la vie
-montage RC
Le poids de la vie en somme
C’est l’absence
Le silence
La solitude
Ce poids ne compte pas
N’a pas de poids
Et son symbole n’est pas le plomb
Mais le flocon de neige.
« Toujours et jamais », 1982.
U pesu di a vita
U pesu di a vita in calchi manera
Hè a mancanza
U silenziu
A sulitùdina
Issu pesu ùn conta
Un hà micca pesu
È u so sìmbulu ùn hè piombu
Ma u fioccu di nevi
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Paul Vincensini – le dormeur
photo: William Eggleston
Le dormeur atteint par son silence
La clarté la douceur et la durée
Des racines heureuses
Qui ne voyagent qu’en elles
Loin des feuillages infidèles
Des oiseaux criards
Et des couleurs du ciel
« D’herbe noire », 1965.
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Paul Vincensini – Des paniers pour les sourds
Peinture: JF Millet : paysans bêchant
L’âcre odeur de sueur
Qui monte de la terre
A dissipé l’encens
Et ronge les suaires
Les mains durcies fermées par le labeur
Et les mains sans limites
S’effilochant en rêves
Se cherchent et se crispent
Dans la même douleur.
« Des paniers pour les sourds », 1953.
L’aspra adori di sudori
Chì cresci di a tarra
Hà alluntanatu l’incensu
È runzicheghja i fossi
È i mani induriti è senza fini
Chì si starpiddani in sonnia
Circhendusi stantarati
In un stessu dulori
Paul Vincensini – dans l’arbre
Nantu à arburu
Sè tontu
Ùn micca mì
Ùn sὸ micca corba
Sὸ i me scarpi
Chè dormu calchi volta nantu à l’àrburi
—
Dans l’arbre
T’es fou
Tire pas
C’est pas des corbeaux
C’est mes souliers
Je dors parfois dans les arbres.
De ce poète corse, on peut lire aussi cette page...
Paul Vincensini – Moi j’ai toujours peur du vent

photo J M P Salles
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Moi j’ai toujours peur du vent
Me voici
Mes poches
Bourrées de cailloux
Pour rester avec vous et
Ne pas m’envoler dans les arbres.
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Èiu t’aghju sempri a paùra di u ventu
Èccumi
I mè stacchi
Pieni à cutichja
Par stàmini cù vὸ è
Micca bullamini nantu à l’àrburi
Paul Vincensini – le rêve

photo- Benoît Pype: provenance
Le Rêve
Au bout du chemin
Une feuille verte
Rêvait à un lapin
Les rêves ça nourrit parfois
Mais pas toujours ceux qui rêvent.
« Archives du vent », 1980
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U sonniu
In fini à u chjassu
Una cascia verda
Sunniaia à un cunnigliu
I sonnianurriscini di i volti
Ma micca sempri quiddi chi sunnieghjani
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Au sukjet de Benôit Pype, Frédérique de Gravelaine, nous précise, dans son article, que ses « Géographies transitoires » découpent des plans de ville dans des feuilles de plantes. Poétique transcription de territoires imaginaires, éphémères et bousculés par le temps, qui y fabrique des reliefs inattendus.
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Paul Vincensini – D’herbe noire

photo: Lucien Clergue Camargue secrète
D’herbe noire
J’avais cueilli des fleurs pour traverser la mer
Mais j’ai dormi près de l’étang
Au milieu des chevaux
Et l’amour emprisonne mon bouquet d’herbe noire
Je suis maintenant étendu sur le sable
Je ne pars plus
Je suis un petit aveugle
Et j’ai tout un coucher de soleil sur les jambes.
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