Tu me vois au-delà de l’eau – ( RC )

Je sais que tu me vois
au-delà de l’eau ….
Crois-tu encore que j’existe ?
Malgré tes souvenirs,
ce que tu distingues,
n’est même pas mon reflet,
car je suis de l’autre rive,
Le fleuve est infranchissable,
c’est un mirage
où ta pensée se noie….
( sur un thème d’Eric Costan )
Quelle méthode ? – ( RC )

Y a-t-il une méthode
que l’on doive suivre
pour écrire un poème,
courber les mots,
les faire danser,
sur le fil tendu
de la pensée ?
Personne ne m’a chuchoté
la réponse
et le rythme
de la musique
qui l’accompagne,
- alors je le laisse fleurir
comme bon lui semble…
Quelques images
lui sont attachées,
au gré de ma fantaisie
houle argentée
accompagnée du vent de l’inquiétude,
d’un soleil radieux
ou bien tragique…
le poème – si on le qualifie ainsi –
prend son envol ,
sans que je mesure l’espace
entre ses pieds,
Il ne paraît pas
entravé de normes rigides :
il s’échappe, sans que je le retienne.
Marcel Thiry – Qui était Fête ?

Qui était Fête ? était-ce elle ? dis-tu.
Je sais seulement que fête est passée.
Pourquoi veux-tu douter qu’il y ait eu
Fête, Fête ainsi connue et pensée ?
Je sais des noms de femme ; mais le sien,
Demande au miroir ancien de Venise,
Mis très haut, sans plus de mirante admise,
Le nom de l’âge où il fut vénitien.
Je sais que depuis que ce n’est plus Fête
Se donnent toujours tant de fêtes, tant,
Sans cesse pourtant, le vent, le beau temps,
L’heure ; c’est leur nom, le Vent, le Beau Temps
Le nom de Fête, pourquoi voudrais-tu
Qu’il en ait un autre que Fête ?
Marcel THIRY « L’Encore »(éd. De Rache, Bruxelles)
Marc Hatzfeld – la pensée
L’HORLOGE DE LA GALERIE DU CLARIDGE
horloge à eau , imaginée par Bernard Gitton,


Une araignée mélancolique
File la toile mécanique
De la pensée automatique
Et toc
Du temps savant
Que la clepsydre famélique
Des gouttes crottes
Porte au cadran symptomatique
Des mots pesants
Qui balancent leurs tacs
et leurs tiques
Pour que s’enchaîne le rythme logique
Du corps pourri
De la pensée cacophonique
Et toc
Qui m’étouffe le cœur.
Marc Hatzfeld est par ailleurs auteur de livres « reportages » et engage une réflexion sur le génocide au Rwanda; comme « là où tout se tait »;
Abdelkebir Khatibi – Dédicace à l’année qui vient
extrait du recueil » Dédicace à l’année qui vient »
peinture D G Rossetti – Matin musique – 1864
La blonde d’antan
Et la rousse d’autrefois
Tant de belles ténébreuses
Pour mes jours ensoleillés
Aux quatre points cardinaux
Chaque saison les étrenne
De quelques rayons de miel
Et chaque anniversaire
Renouvelle ma grande promesse
Oublier ce qui s’oublie
Et aimer ce qui se perpétue
Sur le cadran du Paradigme :
Pensée du jour retour de la nuit
Je ne sais
Si le partage d’un secret
Tresse
Comme un tapis déroulé
La posture du corps
Je ne sais doublement
Mais je sens le transport
D’un regard à l’autre
M’accordes-tu
Le rite de ta grâce ?
L’émerveillement du Nom ?
Leur procession ?
Même le paysage s’interrompt dans ses éclats – ( RC )

peinture: R Magritte : le promenoir des amants.
–
Et c’est illusion, si l’espace, que l’on pensait libre de contrainte,
se voit tout à coup enfermé dans une paroi.
Ainsi l’oiseau en plein vol se précipite dans le piège des vitres,
où même le paysage s’interrompt dans ses éclats .
C’est comme si l’élan était rompu (un baillon ).
On se voyait libre, de parler, de réfléchir, et de se dire ;
mais on se heurte aux faux semblants et aux étendards de l’arrogance .
Le souffle n’avait pas besoin de ponctuation ;
et voilà qu’on ne peut pas terminer ses phrases.
Le fil de la pensée est rompu ; on en arrive à ne plus oser se dire,
puisque vivre ne peut pas se faire, sans que des barrières soient imposées.
Certains aiment en jouer , parcourir les murailles d’un labyrinthe inextricable :
ils ont de l’ambition ; ce sont souvent des bavards et souhaitent avoir réponse à tout….
D’autres préfèrent leur parcours intérieur, visible d’eux seuls, et se réfugient dans le silence.
–
RC – mai 2015
Une construction venue d’autre part – ( RC )
volume :Geneviève Seillé
On dirait une construction venue d’autre part.
C’est une forme étrange, où les matériaux s’assemblent,
tissés ensemble par la soie invisible d’un esprit,
repoussant les vents de sable.
On pourrait dire que c’est une tour de Babel,
toujours en cours
à la recherche d’une certaine idée de la perfection.
Je ne connais pas son architecte,
et sans doute n’y en a-t-il pas :
c’est juste une réalité, née de sa propre necessité.
Je lis, de la même façon,
les textes du poète :
tout est caché et visible en même temps:
des mots sont nés, le temps de l’écriture,
et du voyage de la pensée,
relayés par la main qui les a inscrits:
une parole en volutes
sur le papier offrant sa virginité:
Tout est visible et tout demeure secret:
fleuri de sa propre logique et croissance.
Il n’est de toute façon pas nécessaire
de comprendre comment ça tient ;
comment ça peut , par moments,
toucher les étoiles:
il n’est pas sûr
qu’on puisse retrouver la clef,
> l’auteur lui-même
ne sait pas qui la possède,
construisant de ses propres rêves
une réalité
qui lui prend la main.
–
RC – fev 2016
–
Embrasser le monde, même à courte échelle – ( RC )
–
Avec quelques idées, des pas hésitants sur la berge,
Il se hasarde sur le seuil de l’existence,
Et quelquefois trempe son corps en entier,
Ou juste un doigt, histoire de « tester ».
C’est sûr, sa vue ne porte pas loin, pas plus
que la lueur d’une lampe de poche, pointée sans grande portée.
Nous dirons que c’est la nuit, ou un soir bien avancé.
Ce n’est pas un phare, qui fend l’obscurité.
Mais plutôt une luciole .
Une pensée qui jouit de sa propre lumière .
L’étreinte de l’extérieur, est un espace .
qui semble se refermer sur lui à mesure qu’il avance .
L’arbre était immobile , sentinelle de plein vent .
Une présence, qu’il aurait pu ne pas voir ,
s’il était passé une dizaine de mètres sur le côté .
En fait, la marche porte son propre aveuglement .
Il est difficile d’embrasser le monde, même à courte échelle,
Sans se faire porter par la lumière d’un astre .
Celle d’un livre, par exemple .
Sans être universel, le regard en sera plus étendu .
—
RC – nov 2014
Jean-Gilles Badaire – L’atelier
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L’Atelier
Bien d’autres y verraient la forge du vent, le ventre du chaudron, l’irréconciliable,
mais non plutôt l’odeur des roues dans la neige et les efforts calleux.
Je vis dans ce marécage aux accents roux et mauves d’un au-delà de magicien.
La peinture est collée contre les vitres, le ciel est d’araignée,
les pots attendent qu’un maelstrom interne les habite.
Et la pensée ravaude le moindre effet du réel.
J’absorbe jusqu’à l’étouffement les torpeurs des goudrons et des graisses
et les restitue ainsi mouillées sur la toile d’or et de lin.
La mort dort certainement ici.
Les ongles noircis.
J-G. BADAIRE
Des fleurs volées , et des heures envolées – ( RC )
image » collage perso »
—
Des fleurs volées,
Et des heures envolées,
Au parcours des chemins,
Tiennent au creux de la main,
Comme ces mots notés,
Sur un coin de papier,
Car nullement ils n’encombrent
Dans la poche … restés à l’ombre.
Ils sont soudain sortis
Du creux de l’oubli,
Pour re-surgir ainsi,
Au soleil de midi.
Ce sont des fleurs séchées,
Une esquisse à peine ébauchée,
Des mots malhabiles,
Et des vers fragiles,
Tout ce qu’il faut pour cadencer,
La lumière de la pensée
Pour autant qu’ils essaiment …
… Je vais les assembler en poème .
–
RC- mars 2014
–
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écrit inspiré d’une création d’Ulysse » Le fond de ma poche »
L’échappatoire – ( RC )
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Comment peser de son regard,
Au long des trottoirs d’une ville,
Que je ne reconnais pas.
Les vieux faubourgs nivelés,
Les rues formatées,
Le béton s’est démultiplié.
Des immeubles anonymes,
Se succédant sans trève,
Et des voitures blanches,
Comme une succession d’ossements,
Déposés là, blanchis au soleil blafard
Sur le bord de rues grises
Au ciel rayé de fils tendus,
De panneaux de signalisation,
Et de publicités clignotantes.
Parfois l’espace incongru,
D’un nouveau chantier,
Et le ballet de grues jaunes
Il y aurait aux palissades,
Des fentes de lumière entre les planches,
Des affiches à moitié décollées,
Et sur le mur d’en face
Un tag jouant avec les mots,
Accrochant la pensée
….Une échappatoire
Vers un ailleurs possible
Ouvrant des perspectives
Autres que celles des avenues,
Rectilignes et sans âme,
Où même les arbres ne semblent pas à leur place.
Je remplacerai ton désespoir,
Par un sourire dessiné sur le ciment,
Ou par un dessin d’enfant.
–
RC- février 2014
–
Adriana Mayrink – Le cri est tenu d’être muet
Photo : James Balog-
Et les mots remâchés et ingérés.. Et avec cette liberté
pleine d’expression, les mouvements d’une pensée,
qui vont et viennent, volcaniques.
D’être , de penser et d’exister, …
( traduit du brésilien – RC)
Olga Alexandra Diaconu – Comme un vagabond qui berce le ciel
a la couleur de mes yeux
l’eau devient ombre
avant de devenir ciel
avant de devenir éternité
elle berce les feuilles,
elle met ma pensée
dans la balance de ta pensée,
elle est le vagabond
qui berce le ciel
dans les poches trouées
Sur les lèvres tremble un fil de silence bouillant –
tout ce qui n’a pas de nom est bouillant
pendant qu’en nous
l’équilibre devient repos
Qu’on crée une merveille, me dis-tu,
de tout ce que, entre ces murs d’air
sans nous, serait néant”
comme l’herbe traverse nos corps
avant de devenir ciel
tout ce qui n’a pas de nom est bouillant.
traduction – l’auteur
Au voyage de la pensée, la concordance des rêves ( RC )
–
Au voyage de la pensée, la concordance des rêves,
C’est aller vers la surprise, dans un univers clos, entouré de murs,
Prenons une ville ordinaire… laquelle ne recèle peut-être à l’intérieur, que du fonctionnel et de l’ordinaire – ça peut suffire …
– mais quelquefois des écrins tapissés de merveilles,
comme le couvent St Marc à Florence, où le frère-Ange a laissé des traces miraculeuses de sa foi…
C’est comme un fond de roches rugueuses, et gris-vert, que rien ne distingue de l’autre à part des formes approximatives, et un peu biscornues… qui révèlent en leur coeur, une bulle, un vide tapissé de cristaux d’améthystes, un univers « privé », dans lequel on ne peut pénétrer que par effraction…
Les géodes,dans leur concentration et finitude, échappent, si on les garde intactes, à notre regard, … on peut même les repousser du pied ou à coups de pelles-mécaniques, sans se douter de leurs parois d’oublis…
Seul la cassure accidentelle ou volontaire, nous les révèle… et les rend objets de convoitise, de la part des collectionneurs, ou des museums d’histoire naturelle…
J’en reviens aux voyages de la pensée, qui tapisseraient de la même sorte les têtes– si les pensées se matérialisaient… et qu’il faudrait donc ouvrir en puissance, afin de pouvoir les lire.
– ( inspiré de l’article de P Lieutaghi » lumière close », dans « propos de Campagne » (1995)
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RC – 13 juin 2013
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Armen Tarpinian – La vérité du cygne
Une source où la soif rêve de s’étancher mais qu’elle éloigne.
Cygne, sur la mer libre entraîne la pensée !
Qu’elle apprenne l’amour comme un seuil tracé dans le repos du temps.
Et l’horizon bu, dépassé, les yeux fermés.
Miroir à notre cœur, ta liberté nous engage.
Lambert Savigneux – et mâcher la machette – Utopia –
Emily Kame KNGWARREYE
et mâcher la machette
quand la pression du monde est si violente, que sur les tempes le monde appuie avec des barres de fer qui écrasent la pensée même
est t »il simplement possible de vivre et qu’est ce vivre ?
se dire c’est dire je suis et faire abstraction de la pesanteur, se délaisser du monde qui enserre
prendre la plume et écrire deux mots semble impossible, étrangler dans les langes d’un linceul, se fait croire pour la vie
UTOPIA
l’imaginaire est compressé, emprisonné dans une lente mort, les yeux eux mêmes ne voient plus autre choses que ce monstre qui détruit,
l’autre, les autres car écrire cela n’est pas écrire
écrire c’est libérer l’étranglement, c’est desserrer l’étreinte
vaincre la mort et l’étouffement
rétablir l’équilibre et l’énergie,
asphyxié
rétablir l’équilibre, mentalement de sa place dans l’univers et ouvrir la main et relâcher un tant soi peu tout ce qui croupit dans cette tension de mare où pourrit la vie, délétère sous le couvercle d’une oppression qui empêche de respirer, inspirer et laisser aller le flot de parole garant de la vie
c’est l’imaginaire, cette porte ouverte, cette nappe intérieure d’où s’échappe le lotus
fleuri
pouvoir dire cela et ciller apercevoir un autre soi et se mettre à courir
56 EMILY KAME KNGWARREYE (c1910 – 1996). UNTITLED (ALHALKERE), 1995
–
Antonin Artaud – éparpillement des poèmes

— photo Deidi von Schaewen, placée en extérieur rencontres photographiques Arles 2012 – re-photo perso
–
Cet éparpillement de mes poèmes, ces vices de forme, ce fléchissement constant de ma pensée,
il faut l’attribuer non pas à un manque d’exercice, de possession de l’instrument que je maniais,
de développement intellectuel; mais à un effondrement central de l’âme,
à une espèce d’érosion, essentielle à la fois et fugace, de la pensée,
à la non-possession passagère des bénéfices matériels de mon développement,
à la séparation anormale des éléments de la pensée (l’impulsion à penser,
à chacune des stratifications terminales de la pensée, en passant par tous les états,
toutes les bifurcations de la pensée et de la forme). »
–
A Artaud – Correspondance avec Jacques Rivière
–
incitation: le film « regard sur la folie », de Mario Ruspoli, dans lequel Michel Bouquet en voix off, nous dit ce superbe texte de Artaud..
Claude Roy – Pour L
POUR L.
Une pensée sans mot pensée sur la pointe des pieds
entre sourire d’amitié caresse inachevée silence heureux
A peine l’éclair vif d’une truite au torrent
La trace s’effaçant d’une étoile filante
ou l’esquisse du chant d’un oiseau très petit
Une pensée de toi m’a effleuré
en chuchotant Je ne fais que passer
C’était ta voix
ta voix de vent léger sur les dunes de pin
la mer qui souffle bas sous une lune pâle
voix de pieds nus de feu de bois de citronnelle
de la mousse d’écume aux crêtes de la vague
ta voix traverse-temps qui tisse mon espace
—
FOR L.
Thought without word, a thought on tiptoes
between smile of friendship unfinished stroke, happysilent
Hardly bright flash of a trout stream in
Erasing the trace of a shooting star
or the outline of the song of of a very small bird
A thought of you touched me
whispering I’m just passing through
It was your voice
your voice of light wind upon pine dunes
sea blowing down under a pale moon
voice of barefoot wooden lemongrass fire
foam to foam crests of the wave
your voice weaves through time-my space
Claude Roy (Le Haut-Bout, vendredi 1er janvier 1993
Herbes au vent, Poèmes à pas de loup, chez Gallimard
—
Fernando d’Almeida – l’amont des rencontres
Ici où le jour écorche
L’amont des rencontres
Le termps s’oriente vers
La pensée parlée
A chaque saignée du matin
petit chaperon des poèmes ( RC )
–
Aux lectures poétiques, si ce n’est pas un leurre
Ce plaisir ,il ne faut pas le renier
Plutôt que le garder dans ton panier
Un p’tit recueil, une plaquette de beurre
Et une galette de poèmes
Tout ce qu’il fait pour tenir le coup
Sans limites – je dirai « beaucoup »
Allez » Tu peux te r’servir en crème »
Et même y mettre les doigts
Puisqu’on parlait de beurre
On va pas renier son bonheur
Ici ce sont les mots qui font foi
On s’en échange et on lit ( c’est la loi)
Une soupe de lettres , c’est le partage
De fin potage, personne n’en est otage
Aux faim – becs, sans prise de poids…
C’est le mot de la fin, déguster la lecture
En fin gourmet, en petites doses
Que celà croise rimes ou prose
Mère-grand peut se mettre à l’écriture
» – Que tu as de beaux yeux, mon enfant ! »
‘ – C’est pour mieux dévorer ce que tu écris »
» – Que c’est beau ce que tu dis, quand tu cries! »
» – C’est pour faire danser tes oreilles, mère-grand »
» – Et quel appétit, avec cette petite bouche rose ! »
» – C’est pour partager ma pensée, en prose
» – Que tu as de beaux doigts, mon enfant! »
» – C’est grand-mère, pour faire plus élégant »
C’est ainsi que chaperon rouge , en fil d’échanges
Le casse croûte, au bénéfice de l’art poétique
Avec Mère grand au demeurant fort sympathique
Se mettent à la table des lettres, et mangent…
… toute la bibliothèque, et de ses livres
à s’en faire ivres.
On dirait même qu’elles dévorent
Tout le panier, et ces paroles d’or
—
—
29 mai 2012
«
Alain Borne – un visage, une présence
–
Ceci n’est pas un rêve
ni du sommeil ni de la veille
ni de la nuit ni du jour.
Ceci n’est pas un fantôme
ni le délire d’une pensée
ni le visage d’un désir.
Ceci n’est pas une absence forgée
d’espoir
ni un espoir travaillé de sang.
Ceci n’est qu’un visage Lislei une
présence
un corps fait sur le plan de tous les
corps humains
avec partout les cordes rouges
liant les blanches charpentes
et la tunique étrange
tissée comme d’étoiles
qui auraient séjourné dans la neige
longtemps.
Un corps avec sa cloche sourde
et sa flamme au fronton
et ses deux lianes douces rejointes
pour les gestes
d’un être de péril.
Ceci n’est rien Lislei
qu’un glaçon de chaleur déposé sur
l’hiver
un amas corruptible de membres
animaux.
Qu’y puis – je Lislei
s’il me semble qu’un ciel le traverse
et qu’une éternité
y pèse sa chance dernière.
Il faudrait que je vous enseigne
l’amour selon le rite terrestre
que je vous montre
comment font les bêtes pour gagner la joie
et que vous sachiez que c’est ainsi
également pour l’homme que tourne le rêve
et que je l’étrangle à le serrer contre vous.
Je connaissais l’attente
le glaïeul éclatant du désir
et sa racine noire
et sa noire fenaison
la statue qui vous brûle
puis tombe de l’odeur comme d’un piédestal
et n’est plus qu’un peu d’os
dans son linge de peau chaude…
Tu passeras comme j’ai passé
répands tes yeux pourtant sur mon poème
afin qu’un peu de vie s’étende encore
ici où j’ai tué
un de mes grands songes dérisoires.
L’heure s’épuisait.
Les heures.
Le soleil trichait dans la gloire blanche de
l’horizon.
Une ombre passa, rapide humaine,
comme pour donner vie au paysage et
le faner.
Je vous ai vue pour la première fois Lislei au temps des neiges
mon cœur fui visité d’hiver de printemps et d’automne…
—
Alain Borne
–
Roland Dauxois: – Le vent soulève des présages
Le vent soulève des présages,
nous allons vite, tous les vivants vont trop vite,
et le coursier noir qui emportait lénore
nous emporte aussi en une course absurde.
Nous allons vite, tous les vivants vont aujourd’hui trop vite
en abandonnant la lenteur
nous avons peu à peu déserté les paysages de la pensée.
Que nous importe de rejoindre une autre rive lointaine
en quelques heures ou minutes
si notre esprit est enchaîné à ce corps
mué en un seul véhicule,
que nous importe cette liberté
si la distance amoindrie dans l’espace physique
devient un gouffre pour nos rêves.
Merci à Roland Dauxois, pour ses publications toujours appréciées… voir son blog…