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Patrick Aspe – Les rires sont des oiseaux de passage


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Les rires sont des oiseaux de passage
la mémoire une éponge
la nuit une dissidente
tangue la vie des fuites lentes
mascarades sans limites
comme un filin d’acier au dessus du vide
je revois l’olivier des allées
la maison rose sous les cyprès
les grands peupliers jaunes d’octobre
précipice sans fond
sabordage des illusions
danse macabre aux sons des tamtams
le cri vient du ventre friable et déchiqueté
attirances des bleus voilés d’or sur la mer qui balance
la forêt d’endort aux silences des pins
chagrin parfumé d’oranges
imaginons cette vague sur le sable doré
lancinante passion des mains qui passent sur ton dos l’huile frémissante
la colline des horizons
sables mouvants de l’enfance
mon chevalier foudroyé d’ignorance
dragon frissonnant de flammes
la lune échappe aux brouillards
élève toi élève toi vers les neiges des cimes mon cœur brisé
l’azur pur tourmente l’épée qui s’agite …


Une route perdue – ( RC )


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Au bord du son déjà lointain
De la cloche fêlée
J’ai cheminé sous les brumes
Au bord des étangs remplis de nuages,
Essuyant leur camouflage.

Ce qui avait été une route
Traçait sa voie au milieu des sables
Fougères et terrains instables,
Se morphondait en plaies,
Les dents de cailloux sous la surface.

Cette voie je l’ai suivie
Aussi loin que le regard porte.
Elle se déroule toute droite,
Et absente des cartes…
Censée mener quelque part,
Maintenant plongée dans la forêt :

Une échancrure fine et rectiligne,
Qui pourtant s’essouffle,
Lorsque les îlots d’asphalte
Burinés de sable noir, se font rares,
Mangés par les flaques,
Aux bouches opaques.

Elle se rétrécit encore,
Serpente et se tord,
Et puis se perd,
Bue par la densité du vert,
Comme un vieux langage,
Dont on aurait perdu l’usage.

Transformée en chemin,
Celui-ci s’éteint
Au milieu des pins,
Cédant la place à une impasse,
Un rideau clos,
Un fouillis de végétaux
a reconquis la place,
fermant peu à peu l’espace.

Habitée par les ombres,
Des arbres sans nombre ;
une cabane abandonnée,
Où le chemin m’a mené :

cette petite cabane,
dont les couleurs se fanent
perdant peu à peu ses planches,
Masquée par les branches ,
c’est vers le sol qu’elle s’incline…
le temps lui fait courber l’échine .

.

juillet 2014 – fev 2018


Erri De Luca – Arbres en lecture


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peinture : Henri le Sidaner

 

Nous apprenons les alphabets et nous ne savons pas lire les arbres.

Les chênes sont des romans, les pins des grammaires, les vignes sont des psaumes,

les plantes grimpantes des proverbes, les sapins sont des plaidoiries, les cyprès des accusations,

le romarin est une chanson, le laurier une prophétie.

In « Trois chevaux »


La tombe de l’écrivain – ( RC )


Heiner Mueller Grave Berlin 3 2013 am-grab-von-heiner-mueller-a313f54e-7c62-4d32-beb5-b15dd0557757
provenance photo: philippocock.net

 

Il y aura un cube de grès rose,
dressé               en lisière des bois,
une borne, à priori des plus banales,
( qui n’est pas kilométrique  ).

En effet        on s’y repose,
aussi bien      on s’y assoit,
quoi de plus normal,
après la gymnastique.

Certains y laissent
quelques souvenirs,
de petits cailloux,
une canette de bière.

Les amoureux s’y pressent,
en mains et en soupirs .
C’est le lieu du rendez-vous,
plus que de la prière.

La mousse s’y incruste,
le lierre prolifère,
Pourtant ce volume  ne porte
pas de  date , mais des noms gravés.

Ce n’est         pas un buste,
Mais        une simple pierre,
posée de la sorte,
juste au bout de l’allée.

Entourée d’herbe verte,
et de pins qui penchent,
elle marquerait le dernier lit,
du célèbre écrivain :

une tombe offerte
comme           une page blanche
qui attendrait encore des écrits,
confiés              à d’autres mains .

Echappée de l’enclos
étroit du cimetière
on viendrait comme dans la supplique
de Brassens, y faire d’affectueuses révérences

Entre le ciel et l’eau
A moitié enfouie dans la terre
discrète                     et monolithique ,
prolongeant dans le temps, son acte de silence .

RC – fev 2016