Jean-Paul Chague – Expansion sans profondeur
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tant de nos livres sont muets
à quoi l’attribuez-vous des corps
pourtant y passent entre les lignes
ni cris ni revendications qui les fassent
se retourner désir plaisir même
demeurent affaire privée
ils passent ce sont des entités
ni hoquets ni râles ni murmures
ni douleur à opérer l’organique
nous est une langue étrangère
et tombe de la bouche une mélopée »
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Jean-Paul Chague
ce texte est visible sur le blog de l’écrivain Claude Chambard » un nécessaire malentendu «
Luis Cernuda – Je dirai la naissance
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Je dirai la naissance
Je dirai la naissance des plaisirs interdits,
Comme un désir qui naît sur des tours d’épouvante,
Barreaux menaçants, fiel décoloré,
Nuit pétrifiée sous la force des poings,
Devant vous tous, même le plus rebelle,
Qui ne s’épanouir que dans la vie sans murs.
Cuirasse impénétrable, lances ou poignards,
Tout peut servir à déformer un corps ;
Ton désir est de boire à ces feuilles lascives,
Ou dormir dans cette eau caressante.
Qu’importe;
On l’a proclamé : ton esprit est impur.
La pureté, qu’importe, les dons que le destin a portés jusqu’au ciel, de ses mains immortelles ;
Qu’importe la Jeunesse, un rêve plutôt qu’un homme,
Au sourire aussi noble, plage de soie dans le déchaînement
Ces plaisirs interdits, ces planètes terrestres ,
Membres de marbre à la saveur d’été,
Suc des éponges abandonnées par la mer,
Fleurs de métal, sonores comme la poitrine d’un homme.
Solitudes hautaines, couronnes renversées,
Libertés mémorables manteau de jeunesses;
Qui insulte ces fruits, ténèbres sur la langue.
Est aussi vil qu’un roi, ou qu’une ombre de roi
Qui se traînerait aux pieds de la terre
Pour ne quémander qu’un lambeau de vie.
Il ignorait les limites dictées.
Limites de métal ou de papier,
Car le hasard lui fit ouvrir les yeux sous un jour si intense
Que n’atteignent pas des réalités vides,
D’immondes lois, des codes, des rues de paysages en ruines,
et si l’on tend alors la main,
On se heurte à des montagnes d’interdits.
Des bois impénétrables qui disent non,
Une mer qui dévore des adolescents rebelles.
Mais si l’opprobre et la mort , la colère et l’outrage ,
Ces dents avides qui attendent leur proie,
Menacent de déchaîner leurs torrents,
Vous autres, en revanche, mes plaisirs interdits,
Orgueil d’airain, ou blasphème qui ne renverse rien,
Vous offrez dans vos mains le mystère.
Un goût qui n’est souillé par nulle amertume,
Un ciel, un ciel chargé d’éclairs dévastateurs.
A bas. statues anonymes,
Ombre de l’ombre, misère, préceptes de brume
Une étincelle de ces plaisirs
Brille en cette heure vengeresse.
Son éclat peut détruire votre monde.
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extrait de » Plaisirs interdits »
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Redon – les plaisirs , les jours , les ors de Redon ( RC ) – M Proust- Arthemisia
Sans les larmes, les yeux pleins, au regard immobile, le vertige des chevaux peints, passent en demain les belles ors de Redon,
dansent, ma neige, en cercles aériens, tourbillon vertical aux ailes enlacées,
la terre se soulève aux équidés embrassés , point de quotidien qui finit, l’aventure de l’Arc en ciel,
recommence à chaque mouvement des nuées, la terre a sa chaleur d’été, les ombres sont en fumées,
dissoutes dans un bleu inventé, le goût des heures demeure …. au temps immobile des plaisirs et des jours…
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les « plaisirs et des jours » fait bien sûr référence à Marcel Proust
dont voila l’extrait final de « les Tuileries » … un texte très « imagé », qui m’avait fortement marqué en tant que collégien…
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photo:
Bernard Legon Sculpture: Coysevox: allégorie de la renommée
Au bout de la Terrasse, un cavalier de pierre lancé sans changer de place dans un galop fou, les lèvres collées à une trompette joyeuse, incarne toute l’ardeur du Printemps.
Mais le ciel s’est assombri, il va pleuvoir. Les bassins, où nul azur ne brille plus, semblent des yeux vides de regards ou des vases pleins de larmes. L’absurde jet d’eau, fouetté par la brise, élève de plus en plus vite vers le ciel son hymne maintenant dérisoire. L’inutile douceur des lilas est d’une tristesse infinie. Et là-bas, la bride abattue, ses pieds de marbre excitant d’un mouvement immobile et furieux le galop vertigineux et fixé de son cheval, l’inconscient cavalier trompette sans fin sur le ciel noir.
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et Arthemisia, dans son post » Finir bien« … « me répondit »
peinture: – Odilon REDON Le Char d’Apollon Vers 1910
Ce cavalier là avait les yeux pleins. Ils repoussaient la pluie, appelaient le soleil, et même quand il s’éloigna, ils laissèrent sur la terre une couleur nouvelle, inconnue, hors de l’arc en ciel, qui donna du goût aux heures, et le courage d’aller vers soi.
Dans l’habitat du quotidien, ils offraient la force des lendemains. Des autrement.
Cela aurait pu être le début de l’histoire. Ce fut son dernier chapitre.
Il fallait bien finir.
Il fallait finir bien.
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© Arthémisia – 05/2011
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Le temps retrouvé (RC)

photo provenant de marc solari - (photos macro de nature,)
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Point n’est besoin de mots,pour décrire
L’avril colportant ses échantillons…
Et se croisent au regard, maints papillons
Des giboulées caprices, sans les maudire
Au tic-tac du carillon sa mécanique glacée
L’été n’est pas encore là,il se laisse intimider
Réciter des poèmes, et s’en agacer
Il est , du silence, les fils à dévider
Les saisons hésitent et préparent en douce
Un souffle végétal reposé, qui repousse
Sous un ciel qui grimace et tousse,
Pierre qui roule n’amasse pas mousse
Du temps retrouvé de Proust, c’est toujours
En le lisant, » les plaisirs et les jours« .
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There is no need of wordsn to describe
April peddling his samples …
Many butterflies crosses each over, in the look’s eye
Vagaries of showers, without cursing them
At the ticking of its mechanical iced chimes
Summer is not here yet, he has been intimidated
Recite poems, and be annoyed with
They are, from the silence, yarns to unwind
Seasons are reluctant , and prepare softly
A rested vegetal breath, that re-grows
Under a sky that grimaces, and coughs,
A rolling stone gathers no moss
Proust’s Time Refounded, it is always
Reading it , « the pleasures and the days ».
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« L’encre versée sur les amours – (RC)
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L’encre versée sur les amours, – on sait à quel point on s’attache….
Peu disent , des amants, que cela fait tache…
Et puis de cette encre, de ces plaisirs, et cris
On peut en retrouver la trace, les écrits..
On dit bien que si les paroles s’envolent, les écrits restent
Ils sont alors moins volatils et impriment nos gestes
Aussi… à faire venir cette encre par litres
Et à réécrire l’histoire, c’est par chapitres
Qu’on la parcourt en toute saison
Et qu’on emménage en tous horizons
Au creux de son épaule, à l’image de ton visage
Aux sensations de ses mains, c’est déjà un voyage
Qu’un printemps fait éclore par dessus les frontières
Aussi bien aujourd’hui , qu’on écrira l’hier
Du visible, en sensible, encres sympathiques
Je dessine, -mots et images- un portrait magnifique..
RC
5 avril 2012
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— petit commentaire perso: — » au creux de ton épaule, pour ligne d’horizon » , est extrait du texte d’une superbe chanson interprétée par Catherine leForestier » au pays de ton corps »
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Ce à quoi répondit Manouchka…
Manouchka
5 avril 2012 at 17 h 01 min
Une Larme versée,
Coule sur ton cou d’Ocre,
Comme une Huile parfumée,
Sur nos Vies médiocres…
Par delà la Lumière,…
… suite visible dans les commentaires à « Messager de l’art »
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Accompagnement pictural: Andrew Wyeth, peintre américain au style réaliste très particulier,
qui est un des grands maîtres de l’aquarelle, dont je montre deux exemplaires, extraits du
livre « la Suite Helga » ( toute une série étant consacrée à sa compagne, Helga ), au physique un peu « rude »
mais par rapport à laquelle, le peintre arrive vraiment à nous transmettre une sensualité impressionnante..
d’autres accompagnements dans mes posts précédents montrant d’autres oeuvres de la suite Helga …., par exemple trois posts avec des textes de l’écrivaine Else Lasker-Schüler..., ou bien ici
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