à la table du ciel – ( RC )

Quand je mange à la table du ciel,
je ne mendie pas les nuages,
et dans mon assiette,
il y a des quartiers de lune
que j’arrose de voix lactée.
Si je parle trop fort
après avoir bu du sirop d’étoiles,
elle s’éclipse
le temps que j’aligne
quelques planètes
au bout de ma fourchette
avant quelque comète de sucre glace
me servant de dessert.
Repu, je plonge dans un sommeil opaque,
où je bouscule tout le zodiaque
dans un rêve des plus ordinaires,
revenu brusquement sur terre…
RC – juillet 22
Sylvia Mincès – Sanglots jetables

près d’immenses planètes hexagonales
pleurent et pleurent sur infini
les ravissantes fées-musiques
cantates aux lourds plis chauds
cheveux fa jambe ré
s’arrachent le baldaquin
d’un dieu mineur exalté
désireux avant bleu
d’occuper mille croches
aux sommeils utérins
sanglot à la blondeur d’âme-vestale
sanglot plus frisé que moutons
sanglot-murmure un peu cassé
je viens de déchirer le mien
achèterais — très cher — sanglot stradivarius
— bon état
Nathaniel Tarn – les sternes

Toute la nuit sur nos têtes en attente du sommeil
grattements et clabauderies de sternes fuligineuses
au sommet des palmiers (du point de vue cosmique
quelle est la question que se posent les autres espèces ?
Comment pensent-elles ce monde : où va-t-il,
avec nous – ou bien sans nous ?)
Ensuite, sommeil dans les bras de la mer
recouverts de ses épaules d’un bleu insondable
nous protégeant des étoiles incendiaires –
« tout cet or et ce soleil, en joie » dis-tu –
féroces planètes nôtres, nos demeures.
Luis Aranha – Poème Pythagore 11
Après un tableau
Une sculpture
Après une sculpture
Un tableau
Anti-anatomique
Trait de vie sur une toile morte
Extravagant
Je voudrais être peintre !
J’ai dans mon tiroir des esquisses de bateaux
Je n’ai réussi que les marines
Nous sommes les primitifs d’une ère nouvelle
Egypte art synthétique
Mouvement
Excès de lignes
Bas-reliefs de Thèbes et de Memphis
Partir en Egypte
Comme Pythagore
Philosophe et géomètre
Astronome
Je découvrirais peut-être le théorème de l’hypothénuse et la table de multiplication
Je ne me rappelle plus
J’ai besoin de retourner à l’école
Le ciel est un grand tableau noir
Pour les enfants et pour les poètes
Circonférence
Le cercle de la lune
De Vénus je trace une tangente lumineuse qui va toucher quelque planète inconnue
Une ligne droite
Ensuite une perpendiculaire
Et une autre droite
Une sécante
Un secteur
Un segment
Comme la Terre qui est ronde et la lune une circonférence
il doit bien y avoir des planètes polyèdres des planètes coniques des planètes ovoïdes
Evoluant parallèlement elles ne se rencontrent jamais
Trapèzes de feu
Les astres décrivent dans le ciel des cercles des ellipses et des paraboles
Les ronds s’adossent les uns aux autres et tournent comme les roues dentées de machines
Je suis le centre
Autour de moi tournent les étoiles et voltigent les corps célestes
Toutes les planètes sont des ballons de baudruche colorés que je retiens par des ficelles entre mes mains
Je tiens dans mes mains le système planétaire
Et comme les étoiles filantes je change de place fréquemment
La lune pour auréole
Je suis crucifié sur la Croix du Sud
Avec dans le cœur
L’amour universel
Globules de feu
Il y a des astres tétraèdres hexaèdres octaèdres dodécaèdres et isocaèdres
Certains sont des globes de verre opaque avec des lumières à l’intérieur
Il y en a aussi de cylindriques
Les coniques unissent leurs pointes en tournant en sens contraire autour de l’axe commun
Prismes tronqués prismes obliques et parallélépipèdes lumineux
Les corps célestes sont d’immenses cristaux de roche colorés qui tournent dans tous les sens
La chevelure de Bérénice n’est pas une chevelure
Le Centaure n’est pas un centaure et le Cancer n’est pas un crabe
Musique colorée qui résonne dans mes oreilles de poète
Orchestre fantastique
Timbales
Les cymbales de la lune
Claquement des castagnettes des étoiles !
Elles tournent sans cesse
Furieusement
Il n’y a pas d’étoiles fixes
Les fuseaux filent
La voûte céleste est le hangar de zinc d’une usine immense
Et la laine des nuages passe dans l’engrenage
Trépidations
Mon cerveau et mon cœur piles électriques
Arcs voltaïques
Explosions
Combinaisons d’idées et réactions des sentiments
Le ciel est un vaste laboratoire de chimie avec cornues creusets tubes éprouvettes et tous les vases nécessaires
Qui m’empêcherait de croire que les astres sont des ballons de verre pleins de gaz légers qui se sont échappés par les fenêtres des laboratoires
Les chimistes sont tous des imbéciles
Ils n’ont découvert ni l’elixir de longue vie ni la pierre philosophale
Seuls les pyrotechniciens sont intelligents
Ils sont plus intelligents que les poètes car ils ont rempli le ciel de planètes nouvelles
Multicolores
Les astres explosent comme des grenades
Les noyaux tombent
D’autres montent de la terre et ont une vie éphémère
Astéroïdes astérisques
Fusées de larmes
Les comètes se désagrègent
Fin de leur existence
D’autres explosent comme des démons du Moyen Âge et des sorcières du Sabbat
Feux d’antimoine feux de Bengale
Moi aussi je me désagrégerai en larmes colorées le jour de ma mort
Mon cœur vaguera dans le ciel étoile filante ou bolide éteint comme maintenant il erre enflammé sur la terre Etoile intelligente étoile averroïste
Vertigineusement
En l’enroulant dans le fil de la Voie Lactée
J’ai jeté la toupie de la Terre
Et elle vrombit
Dans le mouvement perpétuel
Je vois tout
Bandes de couleurs
Mers
Montagnes
Forêts
Dans une vitesse prodigieuse
Toutes les couleurs superposées
Je suis seul
Grelottant
Debout sur la croûte refroidie
Il n’y a plus de végétation
Ni d’animaux
Comme les anciens je crois que la Terre est le centre
La Terre est une grande éponge qui s’imbibe des tristesses de l’univers
Mon cœur est une éponge qui absorbe toute la tristesse de la Terre
Bulles de savon !
Les télescopes pointent le ciel
Canons géants
De près
Je vois la lune
Accidents de la croûte refroidie
L’anneau d’Anaxagore
L’anneau de Pythagore
Volcans éteints
Près d’elle
Une pyramide phosphorescente
Pyramide d’Egypte qui est montée au ciel
Aujourd’hui elle est intégrée dans le système planétaire
Lumineuse
Son itinéraire calculé par tous les observatoires
Elle est montée quand la bibliothèque d’Alexandrie était un brasier illuminant le monde
Les crânes antiques éclatent dans les parchemins qui se consument
Pythagore l’a vue quand elle était encore sur terre Il a voyagé en Egypte
Il a vu le fleuve du Nil les crocodiles les papyrus et les embarcations de santal
Il a vu le sphynx les obélisques le temple de Karnak et le bœuf Apis
Il a vu la lune à l’intérieur du caveau où se trouvait le roi Amenemhat
Mais il n’a pas vu la bibliothèque d’Alexandrie ni les galères de Cléopâtre ni la domination anglaise
Maspero découvre des momies
Et moi je ne vois plus rien
Les nuages ont éteint ma géométrie céleste
Sur le tableau noir
Je ne vois plus la lune ni ma pyrotechnie planétaire
Une grande paupière bleue tremble dans le ciel et cligne
Un éclair farouche zèbre le ciel
Le baromètre annonce la pluie
Tous les observatoires communiquent entre eux par la télégraphie sans fil
Je ne pense plus car l’obscurité de la nuit tempétueuse pénètre en moi
Je ne peux plus mathématiser l’univers comme les pythagoriciens
Je suis seul
J’ai froid
Je ne peux écrire les vers dorés de Pythagore!…
Foroukh Farrokhzâd – il n’y a que la voix qui reste
peinture: Arpad Szenes
Pourquoi m’arrêterais-je, pourquoi?
Les oiseaux sont partis en quête d’une direction bleue
L’horizon est vertical
L’horizon est vertical, le mouvement une fontaine
Et dans les limites de la vision
Les planètes tournoient lumineuses
Dans les hauteurs la terre accède à la répétition
Et des puits d’air
Se transforment en tunnels de liaison.
Le jour est une étendue,
Qui ne peut être contenue
Dans l’imagination du vers qui ronge un journal
Pourquoi m’arrêterais-je?
Le mystère traverse les vaisseaux de la vie
L’atmosphère matricielle de la lune,
Sa qualité, tuera les cellules pourries
Et dans l’espace alchimique après le lever du soleil
Seule la voix
Sera absorbée par les particules du temps
Pourquoi m’arrêterais-je?
Que peut être le marécage, sinon le lieu de pondaison des insectes de pourriture
Les pensées de la morgue sont écrites par les cadavres gonflés
L’homme faux dans la noirceur
A dissimulé sa virilité défaillante
Et les cafards…ah Quand les cafards parlent!
Pourquoi m’arrêterais-je?
Tout le labeur des lettres de plomb est inutile,
Tout le labeur des lettres de plomb,
Ne sauvera pas une pensée mesquine
Je suis de la lignée des arbres
Respirer l’air stagnant m’ennuie
Un oiseau mort m’a conseillé de garder en mémoire le vol
La finalité de toutes les forces est de s’unir, de s’unir,
À l’origine du soleil
Et de se déverser dans l’esprit de la lumière
Il est naturel que les moulins à vent pourrissent
Pourquoi m’arrêterais-je?
Je tiens l’épi vert du blé sous mon sein
La voix, la voix, seulement la voix
La voix du désir de l’eau de couler
La voix de l’écoulement de la lumière sur la féminité de la terre
La voix de la formation d’un embryon de sens
Et l’expression de la mémoire commune de l’amour
La voix, la voix, la voix, il n’y a que la voix qui reste
Au pays des lilliputiens,
Les repères de la mesure d’un voyage ne quittent pas l’orbite du zéro
Pourquoi m’arrêterais-je?
J’obéis aux quatre éléments
Rédiger les lois de mon cœur,
N’est pas l’affaire du gouvernement des aveugles local
Qu’ai-je à faire avec le long hurlement de sauvagerie?
De l’organe sexuel animal
Qu’ai-je à faire avec le frémissement des vers dans le vide de la viande?
C’est la lignée du sang des fleurs qui m’a engagée à vivre
La race du sang des fleurs savez-vous?
Traduction de Mohammad Torabi & Yves Ros.
Rémission ( l’oeil du serpent ) – ( RC )

peinture – Peter Paul Rubens (1577–1640) – Tête de Méduse – 1618, – h sur toile -Moravská galerie v Brně Brno}}
–
Tu descends dans un tourbillon sable mouvant de sable,
De mes mains , je brasse l’air
à grands coups de couleurs fauves ;
–
Elles marquent le passage des minutes vers une agitation solaire.
Avant que tu ne t’enfonces,
dans une étendue morne comme l’ennui.
–
La devanture de l’aube ruisselante , est témoin du rire des trompettes.
Tu es un serpent, trempé de frissons nocturnes,
dont le regard me traque, tout au long de mes nuits.
–
Des chapelets de pierres suspendues, bris de planètes,
Sont les ossements des anges déchus,
dont rien n’entrave la chute.
–
Le sang se fige dans la fièvre des rêves,
On en ignore la part du réel … :
Si tu as injecté le venin, si le réveil en est l’antidote.
–
Car lorsque le jour tend son arc, telle une couverture que l’on retire,
Les délires finissent par faire pâle figure,
Et tu disparais, avalé par le sable.
–
On dirait qu’il ne s’est rien passé.
Le mal est rentré en lui-même,
Peut-être pour ressurgir plus loin,
–
Brève rémission d’une contagion à venir .
Je le saurai quand mes yeux resteront fixés
à jamais , sur les tiens.
–
RC – mai 2015
Eclipse et deuil du soir – ( RC )
Bientôt,
la lune est noire,
elle porte le deuil du soir
Sur les pierres du jardin
S’allongent les ombres
de demain
La confusion du ciel
Le semis des comètes
Le pouls des planètes
Ne fera rien de l’avenir
Que le parfum des roses
A peine écloses
Saisies de peur
Dans la douceur des choses
Déjà de retour.
RC – 26 Mai 2012
–
Soon
the moon is black,
she is in mourning of the evening
Over the garden’s stones
Shadows are getting longer
from tomorrow
The confusion of the sky
The seedling of comets
The pulse of the planets
Will do nothing with the future
Just the scent of roses
Newly hatched
Seized of fear
In the sweetness of things
Back already.
–
Luis Cernuda – Je dirai la naissance
–
Je dirai la naissance
Je dirai la naissance des plaisirs interdits,
Comme un désir qui naît sur des tours d’épouvante,
Barreaux menaçants, fiel décoloré,
Nuit pétrifiée sous la force des poings,
Devant vous tous, même le plus rebelle,
Qui ne s’épanouir que dans la vie sans murs.
Cuirasse impénétrable, lances ou poignards,
Tout peut servir à déformer un corps ;
Ton désir est de boire à ces feuilles lascives,
Ou dormir dans cette eau caressante.
Qu’importe;
On l’a proclamé : ton esprit est impur.
La pureté, qu’importe, les dons que le destin a portés jusqu’au ciel, de ses mains immortelles ;
Qu’importe la Jeunesse, un rêve plutôt qu’un homme,
Au sourire aussi noble, plage de soie dans le déchaînement
Ces plaisirs interdits, ces planètes terrestres ,
Membres de marbre à la saveur d’été,
Suc des éponges abandonnées par la mer,
Fleurs de métal, sonores comme la poitrine d’un homme.
Solitudes hautaines, couronnes renversées,
Libertés mémorables manteau de jeunesses;
Qui insulte ces fruits, ténèbres sur la langue.
Est aussi vil qu’un roi, ou qu’une ombre de roi
Qui se traînerait aux pieds de la terre
Pour ne quémander qu’un lambeau de vie.
Il ignorait les limites dictées.
Limites de métal ou de papier,
Car le hasard lui fit ouvrir les yeux sous un jour si intense
Que n’atteignent pas des réalités vides,
D’immondes lois, des codes, des rues de paysages en ruines,
et si l’on tend alors la main,
On se heurte à des montagnes d’interdits.
Des bois impénétrables qui disent non,
Une mer qui dévore des adolescents rebelles.
Mais si l’opprobre et la mort , la colère et l’outrage ,
Ces dents avides qui attendent leur proie,
Menacent de déchaîner leurs torrents,
Vous autres, en revanche, mes plaisirs interdits,
Orgueil d’airain, ou blasphème qui ne renverse rien,
Vous offrez dans vos mains le mystère.
Un goût qui n’est souillé par nulle amertume,
Un ciel, un ciel chargé d’éclairs dévastateurs.
A bas. statues anonymes,
Ombre de l’ombre, misère, préceptes de brume
Une étincelle de ces plaisirs
Brille en cette heure vengeresse.
Son éclat peut détruire votre monde.
——
extrait de » Plaisirs interdits »
–
Eclipse et deuil du soir ( RC )
–
Bientôt,
la lune est noire,
elle porte le deuil du soir
Sur les pierres du jardin
S’allongent les ombres
de demain
La confusion du ciel
Le semis des comètes
Le pouls des planètes
Ne fera rien de l’avenir
Que le parfum des roses
A peine écloses
Saisies de peur
Dans la douceur des choses
Déjà de retour.
RC – 26 Mai 2012
Soon
the moon is black,
she is in mourning of the evening
Over the garden’s stones
Shadows are getting longer
from tomorrow
The confusion of the sky
The seedling of comets
The pulse of the planets
Will do nothing with the future
Just the scent of roses
Newly hatched
Seized of fear
In the sweetness of things
Back already.
S’ouvre le balcon du ciel ( RC )
Peinture: J Mirò : femme, oiseaux, étoile… Metroplitan Mus of Art N Y C
–
-Si soudain, s’ouvre le balcon du ciel,
Et , que la crampe du soleil, me fixe,
D’un oeil morne alors une vie
A détacher ses ailes
Pour chuter dans le haut
Aspiré par les nuages
Je me verrais ange déchu
Regagner l’ivresse du vent
Le baiser des oiseaux,
Et bientôt la nuit
Piquetée d’étoiles
Pour tutoyer Orion,
Pégase et Cassiopée
Et peut-être, je te verrai
Habillée d’aurores boréales,
Jouer au billard
Avec les planètes,
Rire des comètes…..
Si soudain, s’ouvre ta fenêtre
Et qu’un oeil de lumière me fixe
Au dessus de ta silhouette, alors une vie
Pour me pousser des ailes
Et chuter vers le haut
Aspiré par ton balcon,
Je me verrais, ange nouveau
Appuyé sur le vent
Aux baisers de l’ aimée..
( … et bientôt la nuit
Piquetée d’étoiles
—–Tu aurais laissé suspendue
Ta robe boréale…. —-> )
–
RC – 19 septembre 2012
–
Luce Guilbaud – Terres liquides et bleues
extrait de la chair à vif des roses 1978 « la Coïncidence »
—————
Terres liquides et bleues
curiosité voyage entre les tempes
le front se troue de planètes vivantes
les paroles ne cherchent plus d’écho
je tiens ta tête au niveau des coraux
les pieuvres-épreuves se glissent hors de tes lèvres
terres silence
j’agite les trésors des grands fonds
quelques tessons brisés sous les pieds