Miguel Angel Asturias – marimba chez les indiens

La marimba pond ses œufs dans les astres…
Oh la la, quel caquet
pour un œuf que tu ponds !
Eh, venez donc le pondre !
La marimba pond des œufs dans les astres…
Le soleil est son coq, il la coche, il la saigne.
La marimba pond des œufs dans les astres.
Oh la la, quel caquet
pour un œuf que tu ponds !
Eh, venez donc le pondre !
Dans les calebasses au trou noir de noix de coco
et aux membranes de tripes tendues il y a des
sanglots de mouches,
de poissons-mouches, d’oiseaux-mouches…
Et le charivari de la perruche verte
et le crépitement de l’oiseau jaune en flammes,
et le vol tournoyant du guêpier bleu de ciel,
et les quatre cents cris du moqueur d’Amérique.
Le moqueur a sifflé, le guêpier a volé
l’oiseau jaune a flambé, la perruche a crié.
Oh la la, quel caquet
pour un œuf que tu ponds !
Eh, venez donc le pondre !
Musique entre les dents et la peur endormie,
jetée par des hommes de pierre-foudre vêtus de blanc,
qui du haut du soleil tendent leur bras de feu
et leurs doigts armés de baguettes brûlées aux longs
cheveux de caoutchouc
qui frappent la face sonore du clavier à peine soutenue
par les fils de quatre couleurs
en bariolant les airs : vert, rouge, jaune, bleu….
Son-roulement de pluie des tissages célestes !
Son-roulement de pluie de la ruche du monde !
Son-roulement de pluie de la sueur des humains !
Son-roulement de pluie du pelage du tigre !
Son-roulement de pluie de la robe de plumes !
Son-roulement de pluie des robes de mais !
Jean Tardieu – au conditionnel

Si je savais écrire je saurais dessiner
Si j’avais un verre d’eau je le ferais geler
et je le conserverais sous verre
Si on me donnait une motte de beurre je
la ferais couler en bronze
Si j’avais trois mains je ne saurais où
donner de la tête
Si les plumes s’envolaient si la neige fondait
si les regards se perdaient, je
leur mettrais du plomb dans l’aile
Si je marchais toujours tout droit devant
moi, au lieu de faire le tour du
globe j’irais jusqu’à Sirius et
au-delà
Si je mangeais trop de pommes de terre je
les ferais germer sur mon cadavre
Si je sortais par la porte je rentrerais
par la fenêtre
Si j’avalais un sabre je demanderais
un grand bol de Rouge
Si j’avais une poignée de clous je les
enfoncerais dans ma main
gauche avec ma main
droite et vice versa.
Si je partais sans me retourner, je
me perdrais bientôt de vue.
Ahmed Kalouaz – sur le livre de la mer
peinture Richard Diebenkorn – Ocean Park 1984
Sur le livre de la mer
il y a des surprises
sorties de la beauté des verbes.
Il y a
l’écriture du toucher,
la consonne de langue,
l’encrier de salive
où les plumes sont d’oie.
Il y a
l’écriture des corps
faite de mots nouveaux,
des langues de voyelle
pour des lettres
qui ne partent jamais.
Norbert Paganelli – Quien eres
Quien eres ( qui es-tu ? )
peinture:
Nicolas Cotton
Moi je n’aurai jamais voulu cela :
cette profusion de chaleur et ces éclats de guerre.
Les affres de la bataille que se livrent les éléments
n’ont jamais acquis ma sympathie profonde.
Je connais, certes, les bruits rapportés des combats
et les plumes recouvrant les casques ciselés.
Ainsi que les armes dont les couleurs de feu m’avaient jadis envouté
mais jamais je n’ai succombé à l’or des trophées
On m’avait dit que le miel était ailleurs et j’ai fait comme si,
comme si cela devait durer
dans l’éclat sobre d’une grande quiétude.
Il m’est arrivé de ne pas suivre ma propre trace,
ce n’est pas une raison suffisante
pour m’exiler loin de mon serment.
Dans l’éclat sombre d’une grande quiétude
je n’ai trouvé qu’une goutte de miel
pour refléter le monde et sa solitude :
point de sympathie pour le fracas des armes
et les couleurs de feu.
Personne ne partage l’or des trophées.
C’est un domaine lointain de civilisations englouties
où les casques ciselés d’argent
sont depuis longtemps enfouis
dans les tombes ou les musées.
Rien ne dure,
et l’intensité du feu décroît,
à mesure que s’installe le froid,
et que les raisons même de la guerre
se diluent dans l’oubli.
Le feu d’artifice envoie ses étincelles
dans un éclat éphémère…
Tu ne pourras suivre
que tes propres traces,
avant que la mort ne les efface .
RC – mars 2022
Leslie Kaplan – livre des ciels
La chambre, notre grand lit plat. En face, l’armoire avec le miroir rigide.
Reflet.
Je suis avec lui, sous l’édredon. L’édredon est épais, à plumes, il ne pèse rien.
Carreaux multicolores, on est dessous, vivants.
Il est à côté de moi. Je vois la peau élastique, les yeux qui cherchent.
Il est là, allongé.
Par la fenêtre, le ciel humide, ses trous et ses volumes.
L’édredon est léger, envahissant comme une déchirure.
Marine Laurent – Femme de papier
peinture: Egon Schiele
–
Suis une femme de papier
De celui dont on fait les arbres
Et j’ai puisé à leur aubier
Et mangé leurs feuilles vivantes
Arraché l’écorce du fût
Pour tenir debout à ma table
L’hiver sur du papier glacé
Je laisse mes traces effaçables
La sève qui coule des doigts
Trace des mots sans importance
Je flotte au vent car mes racines
Courent à peine sous le sable
Suis une femme de papier
Qui se froisse à moindre risée
Qui brûle à petite flambe
Dans un foyer désaffecté
Mais si l’oiseau à ma fenêtre
Vient poser une plume blanche
Je sens mes folioles renaître
Et la plante à mon encrier
Je partirai sur une branche
Emportée par nuit sans étoile
Et vous dirai dans mon absence
Ce que j’ai laissé sur la toile.
Des desseins laissés inachevés – ( RC )
Tiré de AAARG
Il y a des desseins que j’ai laissés inachevés ;
ils me saisissent par le bras,
m’habillent de signes du zodiaque , qui se repèrent sur mes épaules, coude et genoux,
et se mettent à clignoter.
Des nuages qui se forment en un manège duveteux,
sont des licornes, des lions et des serpents.
Tout le monde a l’air de bien s’entendre ;
ils me convient avec eux , pour partager les restes du buffet,
habiller les piétas de goudron et de plumes,
sortir les balais des sorcières des profondeurs de l’histoire
comme ceux cachés derrière les portes grises des placards des vestiaires ,
remplacer les hommes politiques par des héros bien connus de bandes dessinées:
je désigne aussi Bibi Fricotin, Felix Le Chat , Mandrake comme gagnants des épreuves olympiques
et les télés repeintes en noir mat.
Cela ne trompe pas: c’est un clin d’oeil du destin :
– je vais me présenter à ma propre succession ! ,
juste avant de me diluer dans un sommeil en deux dimensions
dont je n’apprécie même pas la superficie.
J’ai dû sortir, par inadvertance , de la case prévue à mon intention…
–
RC – mai 2016
Yannis Ritsos – Sortie de prison ?
photo: Michael Kenna
Sortie de prison ?
Tout entier livré, abandonné à la plénitude du vide indifférent,
il dépouille ses ailes |
( celles qui l’ont porté jadis au zénith) il les plume une à une
Comme s’il effeuillait une grande marguerite étrangère
devant les petits marchands de chaussons au fromage
aux chaises crasseuses
et les papiers huileux tombent en même temps que les plumes sur la chaussée,
et ils s’emmêlent parfois dans les roues d’un vélo.
Le gardien m’a ouvert la porte. Je suis sorti,
Dans la cour, une cruche, un cerceau, un oiseau.
Karlovassi, 9. VII 87
Mario Luzi – Que de vie !
détail d’une peinture de Frida Kahlo
.
« Que de vie ! »
une voix aiguë d’enfant s’élève
là où une foule d’oiseaux
arrachés à leur gazouillement
de branche en branche
s’enfuit dans l’effeuillement du bois
sous le froid contre jour,
trace un sillage de plumes et de cris,
abandonne les phrases brisées
d’un discours qui achoppe, fête
et fuite, tandis que des hommes à l’affût
en préparent le massacre ;
“que de vie !” répètent des derniers,
ces plus lumineux battements d’ailes
sur toute la broussaille entre mer et marais […]
car on ne perçoit jamais la vie
si fort qu’au moment de sa perte.
Mario Luzi, « Du fond des campagnes », L’Incessante Origine, Flammarion, 1985, pp. 112-115.
.
.
Allegra Sérendipité – Vesper
Vesper
Comme des milliers de bougies allumées
Le ciel du soir est étoilé
Parmi tous ces points dorés
Il n’est qu’une flamme à aimer.
Dès cinq heures elle est là
Suivie par d’autres, qui pas à pas,
Jalouses comme des sirènes
S’agglutinent aux voilées siciliennes
N’est-il pas vrai qu’elle laisse un gout amer
Cette étoile que l’on nomme Vesper
Un certain James pense tout autre
Une fois goûtée on ne veut rien d’autre
Ma vie à cette heure cardinale
Irradie comme ce chant vespéral
Hymne enchaîné d’un verset mystique
Salué d’un Magnificat Liturgique
Mais la lecture de leurs filantes capitules
Me laissent telle un rameau d’Aspérules
Alanguie dans mon lit de plumes
Insomnies et chevauchées de runes
Ô nuit illuminée, pose magnifique
Sur mes lèvres ce sourire chimérique
Car au matin de ce moment magique
J’ouvre des yeux d’amnésique.
–
Raymond Farina – Une colombe une autre
–
« De mémoire d’oiseau »
Ton gris te va à merveille
surtout quand vient le spleen du ciel
quand tu te poses sur l’ardoise
que l’averse vient d’effacer
Au milieu du grand tintamarre
tu hasardes ta cantilène
comme un infime flux sphygmique
dans l’énorme corps de la ville
À l’instant où les nappes claquent
tu as vite fait la synthèse
des miettes qu’on éparpille
avant de rejoindre les tiens
qui tout en s’ébrouant s’enfoncent
avec un discret enthousiasme
dans leur douce orgie de poussières
dans leur minuscule désert
qu’ils signeront de quelques plumes
d’empreintes à peine visibles
–
Cet « article » provient du site des éditions des Vanneaux.
–
Leeli – Comment tu es long
- sculpture: couple enlacé, art Khmer, metropolitan mus of Art, NYC

sculpture: Art indou – Orissa
Comment tu es long
Et comme je suis loin
Assise entre deux mers
Ici où les fleuves
Poussent comme des pissenlits
Et les draps bien tirés
Font des vagues sous nos dos
Comme je suis longue
Allongée sous ta main
Pas de timbres, pas de plumes
Mais des ondes en cascades
Et un tam tam
Ridicule
Qui tient le temps
Et nous force à aimer.
–
Rituel de la lame et des voeux ( RC )
-Bobo Diolasso, vallée sacrée (Dafra) . Burkina FASO
A l’ombre d’un arbre dont je ne saurais dire
Ni le nom, ni le dessin des feuilles,
Cet homme, un être sans âge,
Presque nu, immobile,
– Et peut-être aveugle
Gisant, endormi, sous la voûte des feuillages,
Sur un gros bloc
A l’entrée d’une cathédrale de rochers.
Des lianes pendaient dans l’ombre végétale,
Et m’habituant à elle, je la perçus moins obscure,
> Accompagnée du frêle murmure,
D’une eau, s’écoulant , paresseuse,
De bassins en vasques naturelles.
Dans cette espère ce château creux, inversé,
habité de relents lourds, gras, écoeurants,
Ne devant rien à la profusion végétale.
Il n’y avait pas d’idole incrustées dans les parois,
> Pas de sphinx de pierre, dans ce lieu reclus,
Isolé d’un ciel , qui claque sous le soleil,
Mais un sol presqu’entièrement couvert de plumes,
Et progresser parmi le chaos rocheux,
N’était possible, qu’en foulant aux pieds
De multiples ossements
S’affaissant sous mon poids.
Peut-être étais-je habité par le non-savoir,
Enfui trop vite de la lumière,
> Vers ces profondeurs
Où le ruissellement d’une eau rare
S’associant aux rituels millénaires
Où l’amour et le vivant, meurent
Tranchés, par la lame de l’officiant,
> Le sang se mêlant à l’eau lente…
Peut-être, n’ai-je pas dans l’esprit,
– Celui de faire un voeu
Quand on lit l’avenir
Selon , que la bête sacrifiée
Prolonge ou non son agonie
Sur le ventre ou le dos,
Et , que se vide son corps
Palpitant encore, au milieu des pierres.
Mais , l’homme endormi,
Au pied des carcasses suspendues,
> Et des toisons dépecées
Rêvait peut-être de la vie qui s’enfuit,
Et du murmure indéfinissable,
– Des dieux primitifs,
Offrant, dans ce lieu reclus,
Des promesses de prospérité.
–
RC – 26 janvier 2013
–
A noter qu’à Dafra, le cours d’eau se continue en mares, où vivent d’énormes poissons chats ( silures), nourris avec les restes des animaux sacrifiés: voir photo de Brad 177:
Marie Hurtrel – gelures au bord de l’étang
L’heure est aux gelures des bords des étangs incrustés de lune.
Là,
entre un silence et le souffle des monstres brennous,
les plumes s’agitent,
les mots tombent,
Dans l’antre ouverte de l’outre âge :
Il est temps,
où le temps sourd.
Il crime,
de l’autre côté de la terre ;
la mort a l’odeur des baptêmes intégristes.
Le sens broie où les os craquent,
quand la patience cure ses canines occidentales.
© Marie Hurtrel
–
Ulysse – la voix
La voix
Il manquera toujours une voix à nos plumes
Un timbre une musique vibrante qui allume
Des feux de la Saint Jean aux buchers de nos nuits
Et disperse les ombres des regrets infinis.
Il manquera toujours, une main à nos rimes
Posée sur une épaule quand la vie nous abime
Pour vibrer du désir d’une nouvelle aurore
Et forcer les bourgeons qui refusent d’éclore
Il manquera toujours un regard à nos vers
Pour dire sa tendresse quand tout va de travers
Essuyer une larme d’un trop plein de bonheur
Recevoir un sourire comme on cueille une fleur.
Il manquera toujours la douceur d’un visage
Sur la page où s’écrit le plus fou des voyages
Quand le vent de l’amour souffle d’imaginaires
Evasions sans retour tout au bout de la terre.
Ulysse – 3 juillet 2012
Cesar Moro – Le monde illustre
–
LE MONDE ILLUSTRE
Semblable à ta fenêtre qui n’existe pas
Comme une ombre de main sur un instrument fantasme
Semblable aux veines et au parcours intense de ton sang
Avec la même similitude avec la continuité précieuse que
M’assure idéalement ton existence
A une distance
A la distance
Malgré la distance
Avec ta face et ton visage
Et toute ta présence sans fermer les yeux
Et le paysage qui bourgeonne en ta présence quand la ville
N’était pas je ne pouvais être que le reflet inutile de ta présence d’hécatombe
Pour mieux mouiller les plumes des oiseaux
Cette pluie tombe de très haut
Et m’enferme dans toi moi seulement
Dans et loin de toi
Comme un chemin qui se perd sur un autre continent
EL MUNDO ILUSTRADO
Igual que tu ventana que no existe
Como una sombra de mano en un instrumento fantasma
Igual que las venas y el recorrido intenso de tu sangre
Con la misma igualdad con la continuidad preciosa que me
asegura idealmente tu existencia
A una distancia
A la distancia
A pesar de la distancia
Con tu frente y tu rostro
Y toda tu presencia sin cerrar los ojos
Y el paisaje que brota de tu presencia cuando la ciudad no
era no podía ser sino el reflejo inútil de tu presencia de hecatombe
Para mejor mojar las plumas de las aves
Cae esta lluvia de muy alto
Y me encierra dentro de ti a mí solo
Dentro y lejos de ti
Como un camino que se pierde en otro continente
Extrait de » la tortuga ecuestre »
–
César Moro est né à Lima en 1903. Encore jeune, il décide d’immigrer (1924) en pensant vivre de ses peintures.
Il choisit la FRANCE, découvre le mouvement surréaliste et sa nouvelle vocation pour la poésie. C’est en français qu’il choisit d’écrire ses poèmes.
Après huit années passées et une participation active dans le groupe surréaliste 1928/1933, il retourne au Pérou où il se lie d’amitié avec E.A.WESTPHALEN avec lequel il partage ses idées, et font découvrir le surréalisme en Amérique Latine.
Il part au Mexique en 1938 où il retrouve ses amis parisiens. C’est la période la plus productive de sa vie et (l’exception confirmant la règle), il écrira cette fois-ci en espagnol: » La tortuga ecuestre « . De même, sous la direction d’André Breton, il organisera avec Wolfgang PAALEN, l’Exposition Internationale du Surréalisme en 1940 qui a lieu au Mexique
–
Cribas: Fausse signature…(J.I 35)
A la pêche aux anciens écrits de Cribas… j’ai remonté des profondeurs..
Cribas: Fausse signature…(J.I 35)
Par Cribas le dimanche 17 décembre 2006, 19:04 – Cribas 2006 – Lien permanent
L’incursion de mon existence, en pleine vie, ce n’est pas une mince affaire.
Et pourtant…
Je supporte plus facilement ma plume lorsqu’elle est en vie, que ma vie qui me vole dans les plumes.
Je me moque de la vie, et de sa poésie contestable, c’est à n’y plus rien comprendre !
D’ailleurs, je n’ai jamais rien compris !
Je me suis donné, comme un don !
J’aime bien l’automne et ses vitres troublées.
J’aime bien la ramener, ma grande gueule pour pas un rond.
J’aime les tains sordides sur mes doubles fonds.
J’aime les couleurs
En l’occurrence sur mes réseaux.
J’aime être à fleur
J’aime courir après mon souriceau.
J’ai des idées noires
Sur mon tableau blanc
Et j’efface tous mes souvenirs
Avec la craie chaque soir
Je me vérifie
En hurlant que j’écris pour l’à venir.
L’incursion de mon existence
Inversée dans le fond
A l’extérieur sur mon tableau noir.
Moi je sais monsieur
Je calcule avec un bandeau sur les yeux
Les plus-values de ma destination.
Mourir ?
Même pas peur !
Je vis ma rancœur
Insipide dans le pire !
Et je prends des rides
Et mon visage sa vigueur,
Ma sale gueule à la rigueur
Mais toujours mon regard moins vide !
L’excursion de mes insistances
Ouvre ma fenêtre en brisant les vitres
Du cœur sordide de mes nonchalances.
Non sans résistance
Sur mon tableau blanc
J’ai encore mes idées noires…
J’aime bien vivre en hiver
Pleurer dans le silence
Et à double tour.
J’aime bien vivre en enfer.
Et dans l’insignifiance
Insulter encore ma mère !
Je montre du doigt
Toutes mes petites colères
Et ça se voit
Sur le train-train de mes radiateurs
Ça se règle ça se ressent
Mon besoin de chaleur.
Il fait « trop » bon chez moi
Comme à la maison dis
Moi que tu même…
Et je tenterais avec « mais si »
De te rendre la pareille !
J’entends les cloches de mon village
Et les sirènes sur ma ville
J’ai un peu perdu le surnom de mon gage
Et l’innocent règne sur mes sourcils.
J’ai le regard amorphe
Mon tableau blanc
Et mes idées noires dans le coffre
Je fonce à la même vitesse
Que les fausses signatures fières
Tendues solitaires, à ma maîtresse.
J’aime bien vivre en enfer !
Mais je prends des rides
Et mon visage sa rigueur !
Dans le grand froid
Des sudations de mes peurs…
–
Salomé aux mains douces (RC)

peinture: Lukas Cranach : Salomé & la tête de St Jean Baptiste
–
–
Salomé aux mains douces
En chevelure rousse
Joue peut-être les vautours
En habits de velours
Son visage est bien rose
Le tout, sans ecchymoses
Rose sans pétales
Et St Jean est pâle
Enfin, juste sa tête…
C’est après la fête
On s’est rempli la panse
Et la Salomé danse
Presque en transes, danse
Et…… mérite récompense
Afin que rien ne prive
Du spectacle , les convives
Et contribue à la fête
On amène le prophète…
Elle obtient la tête de Jean
Sur un plateau d’argent
Posée délicatement
Et presque joliment
A la manière d’un saucisson
( c’est la décollation)
L’opération est simple, elle consiste à séparer
Le corps de la partie supérieure, qui permet de penser
Bien sûr il y a quelques éclaboussures ,et c’est assez
Impressionnant, mais plus propre que de scalper…
—
Le peintre nous rapporte avec délices
Des instants inscrits en histoire– ce supplice…
Qui sont toujours délicats
Mais rendus en couleurs, en habits d’apparat
….. Aurait-elle tué le prisonnier
S’il n’avait eu les mains liées ?
Sa veste matelassée
En aurait été froissée !!
Ce qui serait dommage pour l’aventure
Et aussi, pour la peinture
Cà aurait fait un couac
…Même chez Cranach
St Jean est une « chose »
De celles qu’on dépose
Avec les gâteaux
Le tout sur un plateau…
Salomé en tailleur
A le regard ailleurs
Et semble bien encombrée
Par la lourde épée
Comme marteau et enclume
(avec son chapeau à plumes)
Calée dans son cadre
Comme à la parade
Un peu dégrisée
Son regard rusé
Qu’on voit au musée
N’a rien d’aiguisé..
Au jeu des horreurs
On y voit la mort
Venir rôder par ici
Et suivre les prophéties
…
Mais la peinture fascine
La foule jubile et assassine
Pâmoison, sensations, et adoration
En grandes files,pour voir l’exposition.
—
RC 2 avril 2012
–