la fuite éperdue du langage – ( RC )

Ici ce sont des mots
accrochés aux poteaux.
Ils balbutient,
aux orgues du couchant,
et peut-être que le concertiste
a pris les devants
avec mille et une variations,
du cor nu
qui délaisse les bois
pour résonner, ingénu
sous d’autres climats
d’autres lois .
Et ce sont celles de la ville
qui indiquent au passage
la fuite éperdue du langage
emporté par la symphonie urbaine.
Lire ce récit comme une partition
serait bien chose vaine :
Jusqu’aujourd’hui on n’a jamais pu
en faire un poème
à portée de rue :
un cor nu
n’est pas ce corps nu
allongé sur un piano
qui tenterait de lire les mots
accrochés aux poteaux.
Le prunus de Fukushima – ( RC )

Loin du tsunami,
et des accidents nucléaires
survit de façon insolente
un prunus, qui n’a avait jamais produit
autant de fleurs.
Les tours des banlieues ont été désertées,
et les rues abritent des courants d’air.
On peut y voir parfois
les bateaux renversés,
éventrés, drôles d’épaves urbaines,
des poteaux brisés dont les cables
se sont enchevêtrés,
pris dans des blocs de béton.
Le prunus, lui, survit.
A le voir, on croirait
que les tempêtes n’ont jamais existé.
Il est passé aux actualités,
a enrichi les pages des magazines étrangers.
Personne ne vous a dit,
que ses fleurs étaient vénéneuses.
Quelque part où les lignes courent, s’enfuient – ( RC )
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–Quelque part où les lignes courent, sur le corps de la terre.
Certaines s’enfoncent ,s’enfuient
rebondissent sur les accidents du terrain,,
la chevelure obscure des bois denses.
Sans couleur pour l’instant, peut-être suspendue dans un gel provisoire,.
A chaque instant, celle-ci peut occuper les lieux,
Inonder la surface, comme le ferait le rideau du soleil naissant,
ou, à l’inverse, celui de la nuit .
Mais bien avant, les collines se propulsent vers l’avant,
ou plutôt les ombres, se liguant contre le jour,
émergeant de la brume, comme engluées
dans une couche épaisse de peinture.
Je perds alors la notion de distance, divisée
par les silhouettes des poteaux électriques, leurs fils dansant,
l’étagement des haies, les champs s’empilant, verticaux..
Tout est rythmé de signes qui n’ont pas d’autre signification qu’eux-même.
Même la route sur laquelle je m’appuie
se met à tanguer en virages derrière un rocher
Peut-être disparaît-elle à jamais
Comme ce trait interrompu sur la toile.
L’équivalent d’une stridence,
d’un appel qui ne trouve pas d’écho
émis par un chant d’oiseau,
bientôt bu par le silence .
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RC – oct 2015
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