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Pierre Mhanna – Le désir de l’hiver est de glace


 

Le désir de l’hiver est de glace,
comme tes lèvres en lame de rasoir
courant sur mon corps
et avec des baisers en flocons de neige
infligeant leur pouvoir.

trad RC

 

Winter’s lust is ice,
like your razor blade lips
coursing my body
and with snowflake-kisses
inflicting their might.


Moins que des natures mortes – ( RC )


peinture: portrait W L von Nassau

peinture:              Michiel van Mierevelt,        portrait de W L   von Nassau-Dillenburg

Un jour,     – que je m’aventurais
A visiter les salles des musées,
Suivant les galeries des portraits,
Les enfilades de parquets cirés,

Princes et généraux,
Ducs et cardinaux,
Chacun en habits d’époque,
Qui                     de sa toque,

Qui       de son manteau de renard,
Ou                        de son pourpoint,
Toisant l’assistance d’un regard,
Pour la postérité – avec dédain…

Pourtant        l’histoire oscille,
Au rythme des années,
….       Ce sont des objets futiles,
Que l’on a conservés.

C’est une                         triste cohorte,
Figée derrière son vernis
Ce sont moins que des natures mortes,
Leur vie s’est évanouie…

… – Et recroquevillée…
Ils ne représentent plus rien,
Ils ont été oubliés,
( on a perdu le lien )

Un peu comme ces papillons,
Du musée d’histoire naturelle,
Faisant partie de la collection,
– couleurs ,        élégance des ailes      –

Epinglés sur leur support ,
Avec dessous un nom latin ,
Ce n’est que celui d’un mort…
En habits de satin   .

Les natures mortes, elles,
 » Still living » , in english,
D’où la lumière ruisselle,
Associent aux fruits, une fraîche miche.

Au bal des coquilles vides,
Les musées fourmillent,
De portraits insipides,
De vieilles familles,

Il fallait          orner les demeures,
Attester de l’origine,              de la lignée,
La comtesse          et sa belle-soeur,
Leurs descendants,                 tous alignés,

Sous les perruques poudrées …
Le peintre ayant posé une lumière,
Subtilement             cendrée …
Maintenant avalée par la poussière.

portraits au château de Bussy-Rabutin

Ces familles    satisfaites ,
A l’attitude altière,
En habits             de fête,
Ruban             à la boutonnière

Chapeaux de plume    , ou armures…
–     Les couches de peinture jaunie,
Enfermées        sous cadres et dorures,
Sont maintenant ternies.

Des symboles de pouvoir,
Ces objets désuets,
Ne sauraient nous émouvoir….

– Ils sont maintenant muets   .

RC – février 2014

peinture: Willem Claesz    1648

peinture:        Willem Claesz                    1648


Les momies d’Egypte ( RC )


Art egyptien: buste de Nefertiti

Art égyptien: buste de Nefertiti

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les rives  de l’ hier
Déménagent  dans la crypte
Le sable se désespère
Aux temples de l’Egypte

Aux amateurs avertis
Ceux qui hantent les musées—
–        La statue de Nefertiti
Qui contemple d’un oeil amusé

Les siècles qui passent
Gravés dans la pierre…..
Suivre, d’une histoire, la trace
Perdue dans le désert

Gardé par les sphinx
Et les pyramides
Et l’oeil de lynx
Des regards humides

Des statues en granit ,
Veillant, sous la poussière
Les momies qui ressuscitent,
– Autre stratosphère

Tombent alors,  bandelettes
Témoignant du sauvetage
Des chairs défaites
Dans le sarcophage.

Se soulève avec effort,       le couvercle
Au coeur du tumulus
Les gardiens de bois,    font cercle
En décor de papyrus…

Tous ces objets précieux
Que l’obscurité plombe
A l’abri des cieux
Sous les pierres catacombes

Echappent au présent
Du monde instantané
Avec le calme cicatrisant
Des longueurs  d’années.

L’esprit contemplatif
( ou celui qui s’entête)
Lira , dans les hiéroglyphes
De la pierre de Rosette

Comment voyagent les morts
– Gravures indélébiles  -,
Apparemment sans effort ,
Glissant  sur le Nil

–          Au delà des dynasties
Tandis          qu’au-delà du noir
Se poursuit,     sans modestie
La conquête         du pouvoir


RC – 4 février 2013

art egyptien:  masque funéraire

art egyptien: masque funéraire


Robert Piccamiglio – Midlands – 06 – Plus tard ( 02 )


peinture:                Valerio Adami:            La nuit étoilée

 

 

 

 

 

L’argile du cœur broyé par l’indifférence. La peur. La haine.

Aux pieds des frénésies du pouvoir toujours en marche.

Ce pouvoir je l’ai senti

sur les scènes du monde entier.

Je n’étais alors ni le troupeau

ni l’infime sillon. ni le berger anonyme.

J’étais comme cette terre riche de feu. Fusion éternelle. Longue course vers l’infini.

J’étais le ciel heurtant les saisons. L’amant.

La maîtresse habillée de gestes vifs. Insoumise.

J’étais ce fils

que je n’ai pas connu.

Ce Cavalier maintenant égaré.

J’étais cette tille que je n’ai pas eu. Cette Reine oubliée. Cette Fée d’éternité.

Le pouvoir je l’ai senti comme la rivière charriant le sang.

Puis le fleuve emportant les cadavres d’où venait le sang.

Je restais immobile.

Triomphant.

A l’image de ces volatiles

qui Jamais ne se posent.

Qu’importe la saison. .

L’odeur de l’herbe ou de la pluie.

Jamais ils ne suspendent leur vol.

Même les blés accueillant. Ou l’arbre tendant ses bras aux douceurs zénithales ne leur font refermer leurs ailes.

Midlands  est publié  aux  éditions Jacques  Bremond,              qui utilisent  très souvent  du papier  recyclé  « artisanal »….


Françoise Delcarte – Pouvoirs


photo; Willy Dwyer          Echo Park

 

 

 

Pouvoirs

je parle d’une ville, à présent, pour nous deux.
Je parle ma présence parmi tes yeux de plaine.

Je parle d’une allée de trembles, au fond des mains.

J’oublie mes propres mots.
J’éclipse ma mémoire.
Une phrase est ton corps.

J’apprends à me nommer.
J’apprends battre les ailes au fond de chaque nuit.

Je parle vivre ici, sans promesse de temps.

DELCARTE Françoise


Ezra Pound – l’aiguille


THE NEEDLE

come,   or the   stellar   tide  will   slip

away. Eastward avoid the hour of its

Now! for the needle trembles in my soul!

 

Here have we had our vantage, the good

hour. Here we have had our day, your day and mine.

Come now, before this power

 

That bears us up, shall turn against the

Mock not the flood of stars, the things to be.

O Love, come now, this land turns evil

 

The waves bore in, soon will they bear away.

The treasure is ours, make we fast land with it.

Move we and take the tide, with its next flavour,

 

Abide Under some neutral force

Until this course turneth aside.

 

image montage perso - structure animalière

 

L’AIGUILLE

Viens, ou la marée stellaire s’évanouira.
A l’est, fuis l’heure de son déclin,
Dès maintenant, car l’aiguille tremble dans mon âme!

N’avons-nous pas vécu de bons moments ici?
N’avons-nous pas eu notre jour, le tien et le mien?
Viens dès maintenant, avant que le pouvoir
Qui nous a portés ne se détourne de nous.


Ne ris pas de l’influence des étoiles,
Les choses. doivent être ainsi.


Mon amour, viens dès maintenant, cette terre
devient funeste.
Les vagues approchent avant de fuir à nouveau.

Ce trésor est le nôtre, emportons-le.
Vite, profitons des saveurs de la marée,

Restons comme tels,
Sous quelque force neutre
Jusqu’à ce que le cours des choses tourne autrement..

(Ezra Pound)

Ce texte  est proposé par   arbrealettres, dans une  traduction que j’ai  légèrement  modifiée, en fonction du texte  d’origine.

photo: Eliott Erwitt