Allain Leprest – l’homme aux deux ombres
sculpture : Jean-Pierre Baldini
Le type d’en haut le solitaire
Si j’vous disais il a deux ombres
Qui le suivent sous les réverbères
De la ville quand la nuit tombe
Une ombre bleue à chaque jambe
La sienne et celle d’une dame
Deux ombres qui soupirent ensemble
Sur le drap sale du macadam
On dit que c’est un vieil amour
Un coup au coeur jamais guéri
Qui n’a laissé que son contour
Découpé dans un matin gris
V’là c’est pour ça qu’il a deux ombres
Qui déambulent derrière lui
Qu’il promène dans les décombres
De sa mémoire toutes les nuits
Deux ombres enlacées côte à côte
Cousues au bas de son manteau
Les mains mises l’une dans l’autre
Qui s’embrassent derrière son dos
Une ombre bleue à chaque jambe
La sienne et celle d’une dame
Deux ombres qui soupirent ensemble
Sur le drap sale du macadam
Le type d’en haut il a deux ombres
Et il les rentre au petit jour
Quand le premier rayon fait fondre
Les contours de nos vieilles amours
Yanka Diaghiléva – Seras-tu ?
Yanka Diaghiléva dont on peut trouver les traductions du russe par Henri Abril, sur son site
art: exposition Georges Guye
Seras-tu le rayon clair
qui naît de l’ombre,
Seras-tu l’ombre engendrant le rayon ?
Seras-tu la pluie bleue
qui tombe sur la neige,
Seras-tu l’un des nuages ?
Ne seras-tu qu’un maillon
de la chaîne dorée,
Ou bien le marteau qui la forge ?
Seras-tu le sentier à l’horizon
ou celui qui y marche ?
Seras-tu la plume d’une aile d’aigle
Ou seras-tu l’aigle lui-même ?
Seras-tu une goutte de vin
ou bien le fond de la cruche ?
1987
Un éclair, buvant la lumière – ( RC )
Il y a eu un éclair,
un soleil rapide et pointu,
qui est passé à quelques centimètres .
On en voit encore sa trace
dans l’impact sur le pare-brise .
Si je m’étais trouvé
sur sa trajectoire,
au rendez-vous exact
de ma mort
je ne pourrai même pas raconter ici
la lumière de son rayon
métallique,
ou au contraire
si cet éclair, buvant la lumière
m’aurait illuminé de noir .
–
RC – mars 2018
Au rayon d’astre épanouï – ( RC )
–
Le rayon d’astre épanoui
Même de sa lumière ancienne
Il me reste l’écho – de la tienne ,
Au soleil évanoui
Il y a – si je ne fais pas erreur
De ta chevauchée pacifique
Plein d’images atypiques
Qu’elles sont pour notre saveur
Au-delà de l’Atlantique .
De la face cachée de la terre
Remontent les sons, les vagues de mer
De la lumière de tes mots – cantiques
Pour mieux renaître en musc
Les détours de ta plume bleue
Brillant de tous ses jeux
Sans que pourtant je brusque
Au destrier tes baisers
De vendanges érudites
Le jus des phrases dites
( d’une parole si aisée… )
–
RC – Nov 2011 -(modifié 2014 )
Marie Bauthias – L’ombre des leurres (extraits)
–
de quoi vivre
ou s’enfuir
le vain soleil des mains
en haleine du corps
de quoi dire
l’ombre qu’il faut
pour autant que l’on vienne
en prendre le rayon
–
quel ciel achemine
la figure manquante des aurores
lentement lèvres à lèvres
accole l’occident aux épaules
des grands fleuves de notre mémoire
–
Variation peu crédible, sur des évènements d’antan ( RC )
Marie est au bout d’une ficelle, à dépenser idées congèles
C’est un jeu de maux, jeu de vilains qui joint le geste
Aux paroles des étoiles, à compter les pieds, de nez,
Mettant voile et vapeurs, rien n’est sûr, ni le pied marin
Ce qui souffle en rêves coincés, s’étale dans la ruelle
Les murs ont des oreilles, les forêts appellent
Des doigts de velours, et rondement
Feuilletant le libre air ( par le plus grand des hasards)
Marre debout, roue dantesque, rien n’avance
Dans un passé, où l’orne hier, restant présent.
Idées congelées et mouvements suspects,
Voici un autre chapitre, qui se dépense
En gestes immobiles, alors qu’autour, tout remue
Madame, derrière son voile
Est assise et médite, sa fenêtre entr’ouverte
Juste un rayon de lumière filtre, d’entre nuages
Il apporte une bonne nouvelle,, — un ange passe
Et d’une flèche, illumine son visage
A cette venue, s’il est bien des mystères,
Il faut peu de choses, parfois
Pour faire parler de soi, sur la terre,
L’annonce aura mission de livrer un garçon!
–
Else Lasker-Schüler – Arrivée
ARRIVÉE
Je suis parvenue au but de mon coeur. Aucun rayon n’ira plus loin.
Derrière moi, je laisse le monde
Et les astres – oiseaux dorés – qui prennent leur envol.
La tour de lune hisse l’obscurité
… Oh, cette tendre mélodie qui doucement
me hante… Mes épaules se soulèvent, coupoles hautaines.
ANKUNFT
Ich bin am Ziel meines Herzens angelangt.
Weiterführt kein Strahl.
Hinter mir lass ich die Welt,
Fliegen die Sterne auf: Goldene Vögel.
Hisst der Mondturm die Dunkelheit –
…O, wie mich leise eine süße Weise betönt…
Aber meine Schultern heben sich, hochmütige Kuppeln.