décrire l’impalpable – ( RC )

Volume de poussières et de cheveux par Lionel Sabatté –
Qui pourra me décrire l’impalpable ?
Tout ce qui règne sur l’absence,
brûle les après-midis
dans l’immobilité d’un sommeil,
les poussières occupant des rayons de soleil.
Elles pratiquent le jeu
de l’extinction des feux.
Si légères soient-elles, elles dansent
avec le moindre courant d’air,
captent une partie de la lumière
mais finissent toujours par recouvrir
de leurs cendres,
les surfaces qu’elles grisent
et mes membres
qui s’exercent à la patience.
Car jamais on ne pense
au centre du silence
où la poussière ira embellir
par son entremise, les objets
à défaut de neige blanche.
Personne ne pourra dire
qu’elle conspire ;
mais elle occulte tout l’éclat des reflets
de la demeure
et la transparence oubliée, des heures….
nota: l’artiste Lionel Sabatté et l’auteur de tableaux de poussière et de cheveux ( portraits ), dont un certain nombre sont visibles au musée du Gévaudan, à Mende-

Colère – ( RC )

Approche ton visage de la flamme,
embarque le cœur bleu
qui traverse le feu ,
que ma chanson boive
l’écho de sa lumière ,
que je voie l’été brûlant
de trop brefs éclairs ,
orages en reflets sur tes yeux ,
de colère comme le tranchant
des lames froides
sur mon corps dépouillé !
Des rêves qui s’effacent – ( comme au fond d’un encrier ) – ( RC )

Nos rêves se plient,
se frottent à la cendre,
aux cartes du ciel
qui bascule
un jour d’automne
- pour mettre le vent
dans sa poche.
Ils seraient semblables
à ces moissons du ciel,
qui couchent les blés
après la canicule
d’un été de soif ;
Que chantent ils ?
Des ailleurs où jamais
nous ne sommes ?
Nos traces sur la page
qui s’effacent
au fond d’un encrier.
L’ombre de nos paroles
n’en est jamais sortie :
autant boire au goulot
de la bière tiède
et regarder la mer,
qui, toujours indolente
sommeille
sous un quartier de lune.
Jamais nous ne pourrons l’attraper,
et nos rêves dérivent
à sa surface, chimériques,
comme une rose qui s’éteint,
dans leurs reflets changeants.
J’apprivoise les cailloux – ( RC )

A force de marcher sur l’eau,
j’apprivoise les cailloux,
qui se font plus légers
dans l’éclat des reflets
et de l’eau pure :
maintenant elle a baissé,
je peux traverser la rivière
en équilibre sur le gué.
Ce galet plat,
je l’ai conservé :
c’est une semelle qui me va
adaptée à ma pointure,
je n’aurai plus qu’à y adapter
des sangles de cuir :
m’en faire une chaussure neuve
naviguer sur le fleuve,
que la rivière ira grossir.
Pour faire la paire
il faudra que je déniche
un autre caillou lisse
pour m’emporter dans les airs :
que les écrevisses me pardonnent
elles trouveront d’autres abris
et d’autres pierres…
Repeindre Saint-Sébastien – ( RC )

Une surface, mais une profondeur,
comme celle de l’eau,
différente et pourtant semblable ,
dissimulée sous les reflets.
Est-ce l’enveloppe,
la fragilité de la peau
qui nous maintient
de chair ?
Cible des flèches
mon corps sera mon âme
que rien ne distingue,
cachée sous son manteau clair.
J’effacerai les cicatrices
et la peau, comme l’eau
se refermera sur elle-même
sans laisser de traces.
Les flèches tomberont toutes seules :
je repeindrai les blessures
avec un peu de peinture
j’enlèverai la douleur
détachant Saint-Sébastien
du poids de son corps
et de l’attraction terrestre
en trouvant la juste couleur.
Voilà que les pinceaux annulent
la trace des blessures,
la peau refermée
sous ton regard incrédule.
La torsion de son être
échappe aux passions,
du moins, celles que l’on connaît
et sous sa surface, le corps renaît.
RC
voir d’autres reproductions des encres de Françoise Petrovitch, sur des sites,
et ici même, avec ce choix , que j’ai voulu représentatif…
Réfractaire aux laboratoires – ( RC )
J’ai dû crever l’atmosphère :
des spirales m’entourent,
cristallisant l’univers :
il y a des miroirs tout autour,
qui bavardent tous ensemble
dans un grand palais des glaces
dont le centre flambe :
on dirait qu’on parle à ma place .
Ici, jamais le feu de s’éteint
et au milieu, je m’égare
ces discours ne sont pas les miens :
les reflets captent les regards,
> la lumière se plie , se déforme :
trop de gens se confient aux machines,
et portent l’uniforme
( beaucoup plus que l’on imagine )
c’est sans doute plus confortable
d’écouter leurs histoires ,
mais je ne suis pas programmable :
réfractaire aux laboratoires
comme aux puits de science
nourris de méga-octets :
> je contemple le silence
et me mets en retrait…
–
RC – fev 2018
une rivière qui palpite et respire – ( RC )
–
Il y a des creux dans l’eau.
Des collines s’y précipitent et tourbillonnent .
Avec des feuilles et des brindilles arrachées,
Un peu plus en amont.
Toujours au même endroit, bordés d’écume .
On suppose que leur contour, mal défini ,
Correspond, plus bas, à des rochers cachés,
Entre lesquels rôdent des truites .
Le chemin de l’eau se poursuit ainsi,
En plages profondes, où les saules se regardent,
Offertes à la caresse du vent,
Confondant les reflets et le frissonnement du jour .
–
C’est une chanson d’un jour de printemps,
Au murmure liquide, qui a oublié,
La furie des eaux boueuses,
Où des troncs furent emportés :
L’enchevêtrement inextricable de végétaux,
Parfois suspendus à grandes hauteurs,
Comme des vêtements de misère,
Habillant encore des branches.
La rivière palpite, s’enfle ou se dégonfle,
Au gré du menu des saisons,
Ainsi le corps vivant, qui respire
Pouvant rugir ou se taire.
–
L’été de sécheresse, la réduisant
A quelques bras maigres,
Serpentant entre les pierres,
Comme si on en voyait le squelette.
L’étendue du minéral , mis à nu
Et le volume des blocs empilés,
Laisse présager la puissance du courant,
Un instant suspendu, à titre provisoire .
Car au loin fleurissent des cumulus,
Qui pourraient bien, s’ils se déversent,
Donner au cours , un tout autre aspect,
Et marquer la fin du sursis.
–
RC – mai 2015
– photo : Stephen Penland
C’était une mazurka – ( RC )

photo NF
–
Je me souviens de la musique
Et ta tête penchée sur le clavier.
Les mains ont déserté les touches d’ivoire,
Elles se sont ternies au voyage des ans.
Les cordes fatiguées, sont une harpe
Assourdie de toiles d’araignées.
Les mélodies que tu jouais,
Ne renvoient plus de reflet
Elles sont été mangées,
Par l’ombre du piano noir.
Juste, le concert des étoiles,
Me chante encore tout bas,
Leurs volutes et les arabesques,
Naissant sous tes doigts.
Je me souviens de la musique
Et ta tête, penchée , au-dessus de moi …
–
RC – sept 2014
Les vertus du nettoyage – ( RC )

installation: Jean-Pierre Reynaud
La clarté du carrelage heurte les murs.
Une lumière stridente chute en cascade des immeubles voisins.
Reflets des vitres rapprochées des bureaux d’affaires.
Intempestive, alors que les murs restent muets.
Vides,
Silencieux.
Sans ouverture.
Et développent leur moisissure.
Indifférents.
Une langue étrangère, opposée au vide .
Le carrelage blanc.
Nettoyé depuis peu.
Il y a pourtant encore des traces de sang dilué, incrustées dans les joints.
–
Il n’y a plus personne ici .
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RC – mars 2014
( il m’est venu après, qu’il pouvait y avoir un rapprochement avec le texte d’Arthémisa: » les conditions d’un échappement »… — et curieusement en y retournant, j’ai vu qu’elle avait fait le choix du même artiste pour l’accompagner… )
-il y a bien entendu aussi avec l’emploi du terme « nettoyage », un rapport avec ce mot, employé dans le « nettoyage ou « purification » ethniques »…pratiqué il n’y a pas si longtemps, et considéré comme une « vertu » dans l’ex-Yougoslavie, et au Rwanda…
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Caresse d’écriture, caresses dansées – (RC )
peinture perso: créée à partir de l’écoute de la musique d’Alexandre Scriabine: — suite n°4
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Et de la grande feuille, si je la lis
Et si j’y participe, à cette folie
En lançant des traits d’encre noire
Sur l’espace libre – bienvenu- d’écritoire
C’est que j’aime aussi où nous entraînent
Des mots, le heurt et la mise en scène
Au jeu des miroirs inversés, aux reflets mobiles
Qui font de l’écriture la rencontre habile
D’avec celle et celui , qui va lire et rebondir
De sa tête et ses doigts, au mieux dire
A la fantaisie, aux profondeurs des pensées
Aux thèmes connus et caresses dansées…
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——–NB: caresse dansée est le titre
d’une pièce pour piano d’Alexandre Scriabine.
Une de mes peintures de cette suite – qui en comporte 6,
a fait l’objet d’une pochette de CD de la part de la pianiste Virginie Dejos, interprète de A Scriabine ( étude, préludes, et sonate n°9) et M Ravel (Gaspard de la nuit) – voir son site et écouter des extraits du disque
Lac – Brassens, cloche ( RC )
photo: gjlh ( voir son blog photos)
Le lac bleuté, le repos, sous le soleil d’été
Les bâtiments voisins se brisent en reflets,
Entourés d’ écrins de sapins,
L’eau est presque immobile sous midi,
Tu es les pieds dans les flots,
A marcher précautionneusement sur les galets
Seuls quelques chiens, jappent la lumière,
Et aussi une auto, écrit dans l’espace,
Une chanson de Brassens,qui nous parvient,
De droite, puis de gauche, enfin s’éteint.
Douze coups marquent la cloche,
Au son fêlé, celle de l’abbaye.
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RC – 21 juillet 2013
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Combats de reflets et confusion du ciel ( RC)
Tu as découpé des morceaux de brume
Pour que je reçoive la confusion du ciel
Les ornières d’où la lumière
N’en sort que poussières
Aux après-midi lentes
Où tu élèves de néfastes serpents
De discours prolifiques
Se lovant à mes pieds
En nœuds maléfiques
Tu me parles encore tard, le soir
M’étirant jusqu’à la fuite du jour
Et au ombres de la nuit venue
Vient encore la mémoire.
A jouer des diagonales sur les cases
Découpage des silhouettes , et perspectives
Ce sera ton langage, mon image
Ton image, mes soirs , toujours
Au plateau lisse des contrastes
Où se promènent encore le cavalier et la reine
En combats de reflets.
Bien que Les pièces hautaines
Aient pourtant repris , depuis longtemps
leur place dans la boîte capitonnée de rouge.
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RC 23-04
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Mehaoudi Ahmed – A ce désert

photo David Rey - désert de Namibie
Mehaoudi Ahmed, lundi 30 janvier 2012, 22:41 ·
A ce désert
Enfoui dans mes tiroirs
J’ai livré des pas
autour de ma ressemblance
Parfois des reflets dans l’eau
où je me voyais tremblant
Ou ailleurs à suivre sur le sable
mon désir de la voir
De chercher
au fond de mon errance
ce qu’il me fallait de consolantes voix
A ce désert
Fermé là comme l’incandescent trésor d’amour
Souvent à balbutier ces débris de son visage
Ses dernières haleines
Ses petits bouts de doigts contre mes doigts
Mes yeux baissés
A réclamer ses larmes
Et nous étions parti l’un pour l’autre
A ce désert
Comme quelquefois j’étais désarmé
La dune l’ultime fut mon étreinte solitaire
à ce désert
Il ne s’en va pas
Si sa trace d’elle aura toujours mon reflet tremblant dans l’eau….
—

art: gouache découpée H Matisse de - "jazz"
Dialogue des reflets (RC)
Dialogue des reflets
Cette fenêtre plate
N’ouvre sur aucune profondeur
Que la perspective éclate
En suivant ses lignes ferveur
Se révèlent à travers elle
Reflets et lumières
Qui n’habitent pas du réel
Mais le champ des hiers
Que tu ne vois pas de face…
Un dialogue du regard
En quelque sorte, une préface
Etablie avec mon miroir
Derrière, se jouent les scènes
Découpées dans le temps
Et souvent parsèment
Les espaces du vent
Des Velasquez en Ménines
Les psychés inclinées
De la chute en abîmes
Aux décors subliminés
Tu perçois dans le lisse
Ce que tu sens et devines
Les parcours factices
En brillances et patines
Reflets des matins
Les lumières fugaces
Des glaces sans tain
A la profondeur vorace
Portent vers le soir
Les portraits captés
L’épopée des noirs
Des regards arrêtés.
Si le miroir révèle
Les instants ébahis
C’est aussi en parcelles
Qu’il t’a saisie, et trahie
RCh 8-12-2011
A noter que le critique et philosophe sur l’art, Daniel Arasse, est l’auteur dans ses études sur les tableaux d’une analyse très intéressante sur le célèbre tableau de Velasquez: » les Menines »… qui a posé « question » à beaucoup de gens entre autre à des artistes, tels que Picasso, qui en a fait de très belles et personnelles variations, ainsi que le sculpteur et peintre Manolo Valdès…