Jacques Dupin – une forêt nous précède
–
Une forêt nous précède
et nous tient lieu de corps
et modifie les figures et dresse
la grille
d’un supplice spacieux
où l’on se regarde mourir
avec des forces inépuisables
mourir revenir
à la pensée de son reflux compact
comme s’écrit l’effraction, le soleil
toujours au coeur et à l’orée
de grands arbres transparents
Reflux dans le silence – ( RC )
Le vent n’est plus
entré dans la danse
des oiseaux.
Il est tombé
( tombé de haut )
et s’est laissé piétiner .
Immobile , ce reflux
dans le silence
ou le refus.
Il n’entoure plus
tes paroles
qui se sont tues.
Face aux dentelles de Montmirail ( RC )
—
Quelque part,
adossé au corps de pierre,
La pente offrait
juste un répit,
un souffle,
avant de reprendre,
plus drue,
Plein sud,là où la terre n’a pas accès.
Seuls les arbres
accrochés, on ne sait comment,
dans une anfractuosité,
Têtus.
C’est une muraille qui se dresse
Une construction gigantesque de clair,
poussée sur un bleu
sans faille, où elle s’appuie .
Je la devine
plus que je ne la vois,
– lui tournant le dos –
mais elle répercute
Comme un miroir
La chaleur et les embruns solaires.
Embruns étirés de senteurs âpres
de romarins et de buis.
Je suis assis
devant une parenthèse
— aride
d’éboulis grisâtres .
On se demande
ce qui retient
ces roches déchiquetées, mâchées…
de dévaler plus bas :
Juste comme si la montagne
s’ était débarrassée,
en s’élevant,
d’éléments superflus.
A la manière d’un serpent
abandonnant sa mue:
une enveloppe
devenue inutile.
C’est un jour
où le mistral se repose :
En automne,
on n’entend plus les cigales
Mais le murmure de la vallée lointaine ;
peut-être un ruisseau,
Le léger bruissement des feuillages ,
les traits espacés du vol de rares oiseaux.
Au fond, le soleil caresse
des rangées de vignes
soigneusement peignées,
virant sur les jaunes, les orangés.
Peu de champ libre,
avant qu’une nouvelle vague minérale,
s’élève, accélère son mouvement,
jusqu’à ce que chênes et pins abandonnent.
Au pied d’une grande couronne de pierres,
sentinelles verticales,
à la façon de supports de dolmens,
dont il manquerait la table…
Forteresse censée surveiller
une mer disparue,
oublieuse,
bue, par le basculement des choses
inscrit dans la roche,
et ainsi de suite jusqu’aux îles
de la Méditerranée attendant un signal
pour se dresser à leur tour .
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RC – oct 2015
voir aussi https://ecritscrisdotcom.wordpress.com/2016/03/20/quelques-pas-vers-les-dentelles-1-rc/
le bois des mots ( RC)
une réponse à
« De quel bois sont faits les mots »
–
Si les mots se refusent à lui
Lesquels ne coulent plus de source
C’est dire aussi, le reflux, celui
De l’inspiration arrêtant sa course
Des idées , qui n’ont plus de sens
Le texte en dérive, partant à vau-l’eau
Ne résonne plus que d’absence
Quand le poète cherche dans son stylo
Le temps qui s’est arrêté. L a fluidité
De l’écrit et des motifs qui s’enchaînent
Au naturel, et sans difficulté
Et que nul questionnement ne freine…
Il n’est même pas question de talent
Celui dont la pensée, veut le partage
Ira toujours , porté en avant
Ne faisant pas ,des phrases en friche, une cage…
RC 10 mai 2012
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