Jeanne Benameur – j’attends
( extrait de son recueil: « l’exil n’a pas d’ombre » )
—
Ils ont déchiré mon unique livre.
Je marche.
Ont-ils brûlé ma maison?
Qui se souviendra de moi?
Je tape dans mes mains.
Fort. Plus fort.
Je tape dans mes mains et je crie.
Je tape mon talon, fort, sur la terre.
Personne ne pourra m’enlever mon pas.
Et je tape. Et je tape.
La terre ne répond pas.
Ni le soleil ni les étoiles ne m’ont répondu.
Trois jours et trois nuits je suis restée.
J’ai attendu.
Il fallait bien me dire pourquoi.
Pourquoi.
Il n’y a pas eu de réponse dans le ciel.
Il n’y a pas de réponse dans la terre.
Alors je tape le pied, fort, de toute la force qui a fait couler mes larmes.
J’attends.
Dans le soleil.
Dans le vent.
J’attends.
Que vienne ce qui de rien retourne à rien et que je comprenne.
J’ai quitté l’ombre des maisons.
Je vais. Loin.
Loin. Pas de mot dans ma bouche.
Tes mots revenus – ( RC )
J’ai emporté les mots que tu m’as glissé à l’oreille,
je les ai confiés aux ,
afin qu’ils voyagent,
et qu’ils les racontent à leur façon…
Je suis le passeur des phrases, celles qui sont dites,
et celles qui ne le sont pas.
Un jour, comme je l’ai vu,
( ou plutôt, comme je les ai entendus,
les mésanges sont venues frapper à ma fenêtre ) :
c’est qu’elles avaient sans doute
une réponse à me donner, et le récit de ton voyage .
J’ai essayé de l’interpéter à ma façon,
et les mots pensés,
ont ainsi continué leur voyage,
dans ma tête peut-être,
en donnant naissance à d’autres écrits .
C’est que tu parles un peu en moi…
–
RC – avr 2017
( réponse à Anna Jouy : voir les mots partis )
Esther Tellermann – Choucas
photo perso fresque de l’église de JANAILHAC
Ils sont tiens
les choucas
les Dieux peints
les tissus refroidis
la sueur
et la grille
Ils sont tiens
les lits durs
les goûts de paille
l’usure
des soulèvements
***
Car
rien ne donne la réponse
ni dômes surgis
ni masques de terre
Pistes s’égrènent en copeaux
en nuits balayées par les torches
Etions accoutrés d’os
faisant commerce de braise
***
Wislawa Szymborska – Certains aiment la poésie
Certains –
donc pas tout le monde.
Même pas la majorité de tout le monde, au contraire.
Et sans compter les écoles, où on est bien obligé,
ainsi que les poètes eux-mêmes,
on n’arrivera pas à plus de deux sur mille.
Aiment –
mais on aime aussi le petit salé aux lentilles,
on aime les compliments, et la couleur bleue,
on aime cette vieille écharpe,
on aime imposer ses vues,
on aime caresser le chien.
La poésie –
seulement qu’est ce que ça peut bien être.
Plus d’une réponse vacillante
fut donnée à cette question.
Et moi-même je ne sais pas, et je ne sais pas, et je m’y accroche
comme à une rampe salutaire.
Luis Cernuda – langue étrangère

photo: F’kir Eldercake
LANGUE ETRANGERE.. (.Extrait )
« Il ne disait mot
Il approchait solitaire d’un corps qui interrogeait
Ignorant que le désir est une interrogation
Dont la réponse n’existe pas,
Une feuille dont la branche n’existe pas,
Un monde dont le ciel n’existe pas.
L’angoisse se fraye un passage entre les os
Remonte par les veines
Et vient éclore dans la peau,
Jaillissement de rêves faits chair
Interrogeant à nouveau les nuages.
Un frôlement qui passe,
Un regard fugace entre les ombres,
Suffisent pour que le corps s’ouvre en deux
Avide de recevoir en lui-même
Un autre corps qui rêve ;
Demi et demi, songe et songe, chair et chair,
Egales en forme, en amour, en désir.
Même si ce n’est qu’un espoir
Car le désir est une question dont nul ne sait la réponse. »
Luis Cernuda.
–
Oslo Deauville Ailleurs mathématiques – 2 voix
–
Oslo Deauville Ailleurs mathématiques – 2 voix
Cette bouche (close):
un son (antérieur) peut-être.
Sur cette pente,
sur ces mains,
un corps dans un temps qui se meurt.
Il coule dans l’interstice de nos visions,
exulte de lenteur.
(Problème)
Sachant que nous sommes ici,
(si)tue moi dans cet espace aux prismes (in)définis,
à la croisée des champs audibles.
(Démonstration) le v(i)oleur ne veut plus de moi.
Un corps (en dé)coule, une inclinaison.
Il (dé)laisse ma personne vidée de tout bruit,
sur cette pente, ailleurs.
(Réponse)
Je suis ailleurs
–
publié par le collectif dixit:
–
Le monde des possibles – (RC )
le monde des possibles
–
Je chuchote sur la voix basse
Des secrets, que l’on confie entre amis
C’est un peu la peau de l’enfance
Qui brûle , – de l’inaccompli
Grand est le corps , de l’inconnu
Qui nous parle , l’avenir
C’est un monde de tous les possibles
Où nous risquons nos premiers pas
Une forêt profonde où l’on s’enfonce seul
J’emporte quelques pierres dans mes poches
C’est pour retrouver mon chemin,
Mais, on ne va jamais en arrière
Je voyage avec l’espoir muet ..
Il y a parait-il une clairière
Bien au – delà des légendes
Que je pourrai confier aux enfants.
Je ne l’ai pas rencontrée
Et continue à marcher
Sur ce chemin si étroit
Qui ne va pas tout droit.
Pourtant j’ai senti une chaleur,
Comme dans ce jeu
Où çà chauffe ou tiédit
Si l’on approche la réponse
Ou si on s’en éloigne…. c’est donc
Peut-être la bonne direction, celle
Qu’ils appellent « trouver sa voie »
….. elle était en moi.
RC – 22 octobre 2012
–
dans le même esprit on peut lire le poème de Pierre Silvain « les chiens du vent »
–