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Juliette – Aller sans retour


Ce que j´oublierai c´est ma vie entière, 

La rue sous la pluie, le quartier désert,
La maison qui dort, mon père et ma mère
Et les gens autour noyés de misère
En partant d´ici
Pour quel paradis
Ou pour quel enfer?
J´oublierai mon nom, j´oublierai ma ville
J´oublierai même que je pars pour l´exil

Il faut du courage pour tout oublier
Sauf sa vieille valise et sa veste usée
Au fond de la poche un peu d´argent pour
Un ticket de train aller sans retour
Aller sans retour
J´oublierai cette heure où je crois mourir
Tous autour de moi se forcent à sourire
L´ami qui plaisante, celui qui soupire
J´oublierai que je ne sais pas mentir

Au bout du couloir
J´oublierai de croire
Que je vais revenir
J´oublierai, même si ce n´est pas facile,
D´oublier la porte qui donne sur l´exil

Il faut du courage pour tout oublier
Sauf sa vieille valise et sa veste usée
Au fond de sa poche un peu d´argent pour
Un ticket de train aller sans retour
Aller sans retour

Ce que j´oublierais… si j´étais l´un d´eux
Mais cette chanson n´est qu´un triste jeu
Et quand je les vois passer dans nos rues
Étranges étrangers, humanité nue
Et quoi qu´ils aient fui
La faim, le fusil,
Quoi qu´ils aient vendu,
Je ne pense qu´à ce bout de couloir
Une valise posée en guise de mémoire…


Contre le ciel – (Susanne Derève) –



Le Cénaret Lozère en Causses – René Chabrière

La lumière,
aussi incisive que la réverbération du soleil 
sur la neige.

Contre le ciel se hisse la montagne,
près du plafond de verre,
l'azur des anges.

Ainsi était hier,
le Causse aujourd'hui est aveugle,                                         
obscurci de nuages                                                                 
et la brume entraîne le jour dans sa chute, 
                                                                                                 
comme nous avons chuté dans l'automne                               
au retour de voyage.

.


Retour – ( Susanne Derève ) –


Yves Klein – Fire color 30
L'hiver nous pose sur la rive 
dans un coin du foyer ,
 - bleus vestiges du voyage -,
nous voguons désormais à l'amble d'un feu de bois
vaguement ivres encore de la traversée.   
                                                                                                                                                                         
Je cherche un mot pour nommer 
le navire que la lame porta sur la plage,
le chemin harassé du retour, l'échine grise de notre toit 
à l'horizon.                                                                            
Ta main dresse à présent le bois de cheminée,                           
et de ton souffle naît le feu.                                                      
                                                                                      
Chuchote-moi les mots :
antre, abri, vaisseau,        
la bûche est un bras mort,                                                                      
un bardeau de lumière qui sombre au fond de l'âtre, 
aisselle noire d'où jaillit plus vive la flamme,  
la lame rouge du tison par ta bouche avivée                                                                                                                                                                            
                                                                                                            
qu'enfante l'étincelle, fleur avide, 
lèvre dévorante,                                                                                 
l'encre de son masque fiévreux sur nos peaux,                               
dans nos verres sa figure riante,                                                                                                                                 
son ombre affamée sur les murs, 
                                            
elle, qui fut doigt divin, poussière, 
silex, cendre                                                              
où couve sous la pierre jusqu'au matin
la rouge braise.  




Sylvie Fabre-G – Ceux qui doivent grandir


Promenez-vous dans le musée Sorolla
peinture J Sorolla – mes enfants – 1904

Ceux qui doivent grandir nous entraînent
à mi-chemin d’amour et de douleur,
quelle félicité obscure, la vie !
Naissent, viennent et s’en vont les enfants
ici, là-bas,
visages déchirants du lointain.
Comme l’on sent à leur suite
le corps à l’âme fondu
et les générations nomades
et le désir et la mort transmis,
pas assez prié peut-être,
sans le savoir toujours les mères prient
mais dans le vol assuré des alouettes,
il y a départ
et l’issue manque pour le retour.


Presque un regret d’hiver – ( RC )


Résultat de recherche d'images pour "primeveres mauves"
Il y a ce retour,
presque un regret de l’hiver.
Le ciel a la couleur pâle
de la mémoire effacée.
Te souviens-tu du chant des oiseaux,
qui hier encore , habitaient le chêne ?

Il reste,   ce matin,
le friselis de givre,
et tu gardes en toi ,
le chant qui gonflait ta poitrine.
Je vois virevolter
de fines particules blanches .

A peine ont-elles touché le sol,
qu’elles s’effacent d’elles-même :
il n’y aura pas aujourd’hui
de couverture blanche ,
ni retour d’hibernation :
ce n’est qu’un passage  ;

La tiédeur du sol
est prête à donner de l’élan
à la symphonie végétale :
déjà les premières fleurs
sèment leurs points de couleur
– premiers signes perçant la grisaille .


Shqipe Malushi – Le retour


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montage  perso  –  dec 2016

 
Le retour
O ma Terre O Terre mienne,
baignée de sang
Mes entrailles pétries
Dans les profondeurs de ton sol
Respirent de ton pardon.
O ma Terre O Terre mienne,
Enfantée de mon ventre
Lieu des innocentes douleurs,
Que pleures-tu, que pleures-tu sur l’âme
Qui est en moi ?
Ô ma Terre O Terre mienne
Tandis que le bras de mon bien-aimé
Enserre mon ventre,
Repoussant de ses doigts
A même ma peau,
Les hautes limites du sang,
Te voilà qui tonnes.
O ma Terre O Terre mienne,
Matrice de mon être intime
Tu respires
De ta propre boue,
Mes membres gagnent
Dans ton ventre la force de la pierre.
Ô ma Terre O Terre mienne,
Regarde,
La condamnation ne m’enchaîne plus,
Et Toi Ô ma Terre,

Tu respires au diapason De mon ventre,
Dans les profonds réveils,
Au seuil d’un nouvel enfantement.
O ma Terre, O mon Ventre.

 

Shqipe Malushi    est une  auteure de langue  alabanaise – ( Kosovo )

 

 


Murièle Modely – espérer ton retour


photographe non identifié

photographe non identifié

je devrais pour une fois, plutôt que de malmener la pulpe de mes index
(je ne tape qu’avec deux doigts, tu le sais bien)
je devrais pour une fois espérer ton retour
m’enrouler dans la nuit, ouvrir aux quatre vents ma bouche et mes paupières
je devrais prendre l’air, inspirer par les yeux ce qui de nous s’échappe
ton ombre fabuleuse collée à mes talons, mon mystère poisseux, nos tout petits poissons
est-ce normal dis moi, de boire la tasse sans apaiser sa soif
est-ce normal de jouir ainsi des lettres et des espaces
je m’interroge, tape, diffère, dis verse, diverge
les mots font des bulles au fond de l’océan
je pulse, j’azerty, j’yuiop, pense à toi dans les microscopiques accrocs de mes inspirations
je devrais pour une fois tenir la phrase, énucléer les métaphores
(mais tu sais combien j’aime poser mon corps tout au fond de l’amphore
– et que ne ferai-je pas pour une incise à rimes)
je devrais pour une fois
prendre le mot
pour ce qu’il est
t’attendre
te regarder
ouvrir la porte
dire 
je suis rentré
fev 2015
visible  sur le blog de Murièle Modely

De l’image, son retour permanent – ( RC )


sculpture:          La Dame d’ Elche, Huerto del Cura, Elche, Espagne

 

Ce texte  est une variation  » réponse »,  sur celui de Jean Malrieu  ( qui suit )

 

D’avril à  novembre,
De Novembre à avril,
Je tisse à l’endroit, à l’envers,
Des mailles pour que je contourne l’hiver .

J’écris toujours, à la lumière de tes feux  :
Et ceux-ci sont un don.
Une présence  faisant s’ouvrir      mes yeux,
Même aveuglé    par la pluie  fine des jours .

Ceux ci passent et,       même changeants,
Sont un retour permanent  .
Et si les sillons  du temps,
Laissent leur empreinte sur ma peau…

Ton image  est        un miroir,
Suspendu quelque part,
Impalpable       et lisse,

Au delà du tain  .
Chaque  chose est nouvelle,
Et toi,       vivante,   au défilé des heures.


RC – nov  2014


.
Je suis devant toi comme un enfant,
plein de pluie et de ravage,
ai cour d’un automne de silence
comme au centre d’une place assiégée
par l’herbe brûlée.

Je t’écris pour alléger le temps.
Cette page que je griffonne est un miroir.
D’elle va surgir un destin inattendu.
Car ma lutte contre le temps est ancienne.
J’écris toujours la même chose :
elle est nouvelle.
Que je lise à l’envers, à l’endroit,
l’inquiétude est éclairée

Je n’y peux rien.
Les années passent, me révèlent.
Mon visage s’affirme sous la pluie fine des jours
qui vient vers nous sur ses milliers, de pas agiles.
J’écris pour être avec toi
dans la paille douce et chaude de la vie.

Jean Malrieu


Parfum & image – (RC )


photographe non identifié

photographe non identifié

Virevolte au travers de la chambre,

Une senteur, habillant ta présence,

Qui n’est plus qu’un petit creux,

Sur l’oreiller, et parmi les draps

-Un peu froissés., il y a un ou deux,

Fils d’or – tes cheveux…

Tu n’es plus là, et même,

Si lentement, le parfum, se dissipe…

De l’absence il n’est plus distance-

Quand les nuits persistent,

A remplir d’ivresse, ton image.

Elle envahit tout l’espace,

Sans rumeur ni tapage,

Et revient , équilibriste

Sur la pointe des pieds,

En attendant, ton retour.

RC –  17 septembre 2013


Mario Luzi – à l’image de l’homme ( extrait )


sculpture: visage dans une plaquette - pierre   art punique

sculpture:                 visage dans une plaquette – pierre                   art punique

 

 

 

 

Trop différente de nous. Trop

hors de portée de l’appel

ou du signal de retour.

Anéantie même

douceur et tourment

du souvenir et de la différence.

 

D’au-delà de toute mesure

humaine il nous regarde,

cet âge qui fut souverain,

pétrifié par sa distance

soustrait par l’oeuvre du temps

au temps et au changement.

 

Ô ère qui es la nôtre

et qui te fossilises peu à peu,

fais-moi sortir du ventre

de ton dur monument

comme chenille, comme chrysalide dans le vent.

L’après, le plus, doit venir à l’aide.
.

 
.


Une fontaine close, une source scellée (RC)


une fontaine close, une source scellée

En rapprochement avec une musique de Tristan Murail, musicien auteur de pièces électro-acoustiques, et auteur d’une composition qui porte ce titre, exactement:

C’est un jardin secret, ma soeur, ma fiancée, une source scellée, une fontaine close… 

____

et pour  ceux qu’il intéresserait d’aller  chercher  plus loin,  cela provient  des  « cantique des cantiques dont la citation exacte est: le cantique des cantiques 4 : 12-15 :

Tu es un jardin fermé, ma sœur, ma fiancée une source fermée une fontaine scellée. Tes jets forment un jardin où sont des grenadiers avec les fruits les plus excellents, les troënes avec le nard, le nard et le safran, le roseau aromatiques et le cinnamone, avec tous les arbres qui donnent l’encens, la myrrhe, et l’aloès avec les principaux aromates. Une fontaine des jardins, une source d’eaux vives, des ruisseaux du Liban.

a fountain closed, a sealed source

In combination with the music of Tristan Murail, musician author of electro-acoustic pieces, and author of a composition that title, exactly says:
« It’s a secret garden, my sister, my bride, a sealed fountain, a fountain closed … »

The beauty sleeping in the woods
The animal was not hard-pressed
The horn that sounded not hunting
It marked quietly, passing time

The fountain was motionless
Members and face gracile
No longer turned a round earth
Indeed, the origin of the world

Freezing is softens
His thickness ,thinner
the song of the water has returned to
Life and color have made a comeback

La belle dormant aux bois
La bête n’était pas aux abois
Le cor qui sonnait n’était pas de chasse
Il marquait doucement, le temps qui passe

La fontaine était immobile
Les membres et le visage gracile
Ne tournait plus une terre ronde
Enfin, l’origine du monde

La gelée est adoucie
Son épaisseur amincie
Le chant de l’eau a repris son cours
Vie et couleur sont de retour

RC  – sept 2011 ,  modifié  juillet 2013