Anthony Phelps – fleur-soleil

Au plus vert de la vie
ma voix est sur ta voix
et ta pensée double la mienne
Tu es ma meilleure part
le matin de mes yeux
Ma plus pure émotion
Et ton sourire est dans mon cœur
un talisman contre la peur
Passe le temps sans toi plus lent si vide
Pleuvent à tout instant les confettis du souvenir
et l’écho de tes mimes se profile en silhouette
sur le blanc de l’absence
Mon nénuphar ma fleur-soleil
mon oiseau-mouche aux ailes vibrantes
ton infini est ma limite
car ta vie contredit la mort
et je bénis le jour où nos yeux s’allumèrent •
L’homme qui marche – ( RC )
photo perso – Alberto Giacometti: l’homme qui marche ( son ombre).
exposition au musée Maillol – Paris 2018
Vois cette silhouette
découpée dans la solitude.
D’un pas décidé, elle progresse
vers quelque chose qu’on ne voit pas.
On ne sait si elle avance
ou reste sur place :
Il y a ce corps projeté en avant,
ce pas tendu ,et pourtant
les pieds englués au sol,
entre futur et immobilité .
–
RC- mai 2019
Pas d’épaisseur, de celle des pierres – ( RC )
image – montage perso
Je te verrai,
Image présente,
A travers les murs,
Tournant mon regard
Vers où je te sais.
Il n’y a pas d’épaisseur,
De celles des pierres,
A jouer la distance
Avaler les espaces,
Les collines et les villes,
Redessinant tes gestes,
Comme si la barque des songes,
Ouvrait aux portes du jour,
Ta silhouette indécise
Se découpant dans la brume.
–
RC – juin 2014
Deux-bout dans le vent – ( RC )
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Debout dans le vent
Tronc contre tronc,
Deux arbres —
Marient leurs branches,
Echangent sans doute,
Un dialogue que l’on n’entend pas,
Ecorce lisse,
Contre peau rugueuse
Deux espèces,
deux langages cohabitent,
Par leur sève
Racines imbriquées,
Les unes dans les autres.
Ou bien s’agit-il
D’une lutte silencieuse,
A longueur de siècle,
Un seul sortira vainqueur,
Se nourrissant de sa mémoire,
Laissant ce qu’il en demeure,
Aux insectes,
Découpe d’une silhouette
Libre de ses feuilles,
Sculpture éphémère,
Dans un ciel,
Ou l’orage succède à l’azur,
Le jour, à la nuit ( comme il se doit ).
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RC- août 2015
Ta silhouette habite l’invisible – ( RC )
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Toi, encore présente,
Tout a été effacé, pourtant,
Comme le vent dispersant les cendres,
une fois éteintes les braises du foyer .
C’est sans doute que tu habites l’invisible,
Quelque part incrustée dans le cœur,
– Où que tu sois.
Au sein du silence et d’un sourire,
tu te révèles pourtant, avec le soleil,
permettant de voir la silhouette,
modèle mêlé aux ombres d’une vigne vierge,
mouvante, comme pourrait l’être
ta présence, sur ma page…
—
RC – octobre 2015
–
d’après un écrit de Philippe Jaccottet
Toi cependant,
ou tout à fait effacé
et nous laissant moins de cendres
que feu d’un soir au foyer,
ou invisible habitant l’invisible,
ou graine dans la loge de nos coeurs,
quoiqu’il en soit,
demeure en modèle de patience et de sourire,
tel le soleil dans notre dos encore
qui éclaire la table, et la page, et les raisins.
P. Jaccottet
Lautréamont – Les Chants de Maldoror (30)

The Two Brothers – Kay Nielsen, from Grimm’s Fairy Tales: The seven-headed dragon came and breathed fire, setting all the grass ablaze…
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Tremdall a touché la main pour la dernière fois, à celui qui s’absente volontairement, toujours fuyant devant lui, toujours l’image de l’homme le poursuivant.
Le juif errant se dit que, si le sceptre de la terre appartenait à la race des crocodiles, il ne fuirait pas ainsi. Tremdall, debout sur la vallée, a mis une main devant ses yeux, pour concentrer les rayons solaires, et rendre sa vue plus perçante, tandis que l’autre palpe le sein de l’espace, avec le bras horizontal et immobile.
Penché en avant, statue de l’amitié, il regarde avec des yeux, mystérieux comme la mer, grimper, sur la pente de la côte, les guêtres du voyageur, aidé de son bâton ferré. La terre semble manquer à ses pieds, et quand même il le voudrait, il ne pourrait retenir ses larmes et ses sentiments :
« Il est loin ; je vois sa silhouette cheminer sur un étroit sentier. Où s’en va-t-il, de ce pas pesant ? Il ne le sait lui-même… Cependant, je suis persuadé que je ne dors pas : qu’est-ce qui s’approche, et va à la rencontre de Maldoror ? Comme il est grand, le dragon… plus qu’un chêne !
On dirait que ses ailes blanchâtres, nouées par de fortes attaches, ont des nerfs d’acier, tant elles fendent l’air avec aisance. Son corps commence par un buste de tigre, et se termine par une longue queue de serpent.
Je n’étais pas habitué à voir ces choses. Qu’a-t-il donc sur le front ? J’y vois écrit, dans une langue symbolique, un mot que je ne puis déchiffrer. D’un dernier coup d’aile, il s’est transporté auprès de celui dont je connais le timbre de voix.
Il lui a dit : « Je t’attendais, et toi aussi. L’heure est arrivée ; me voilà. Lis, sur mon front, mon nom écrit en signes hiéroglyphiques. » Mais lui, à peine a-t-il vu venir l’ennemi, s’est changé en aigle immense, et se prépare au combat, en faisant claquer de contentement son bec recourbé, voulant dire par là qu’il se charge, à lui seul, de manger la partie postérieure du dragon.
Le matin se déhanche – ( RC )
photographe non – identifié..
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Comme il fait encore sombre, ce matin,
La rue s’illumine de points.
Les réverbères sur la perspective de l’avenue.
Et puis quelques fenêtres.
Dans l’une d’elles, l’image d’une femme qui se coiffe,
Ses bras sont en l’air,
Elle découpe sa silhouette,
Une danse en S,
Rayée des lames du store,
Le matin se déhanche,
En promesses de jour….
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RC – nov 2014
Silhouette élégante ( en forme de haïku) – ( RC )

Sculpture: Germaine Richier – Musée Grimaldi ( Antibes 06 )
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Sous le regard étonné des nuages
Mer et tant d’azur, pas de Bouddha,
Ta silhouette élégante vient vers moi.
Au silence des vases ( RC )
aquarelle : Giorgio Morandi
Silence des vases :
une suite de silhouettes
Se découpent sur les strates
Des ombres enlacées.
Tiendrait encore dans la main,
La matité d’une terre-cuite
Portant encore la trace du doigt
Modelant la glaise des anses.
Accord de trompette avec un basson,
Rayon de soleil sur le manteau hivernal
Se pose le reflet du verre
Sur l’assemblée des pots
Alignés sur la table
Silhouettes confondues
Bravant le fond étalé de beige
Un éclat bleu de Morandi.
RC – mars 2013

Nature morte (Giorgio Morandi 1962)
et un petit hommage à Arthemisia…., – ainsi que – ainsi que ( encore )
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Le regard dans ton miroir ( RC )

sculpture-trace : Giuseppe Penone – Soffio I, 1978. Amsterdam 2004
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Voilà sortie de la terre, ma silhouette ,
ou bien moulée dans un coffrage de béton,
C’est dire que le monde m’enveloppe
Et ainsi , suis l’île
Offerte à l’éternel chronophage…
–
Ile flottante, épave et barquette,
Amusette aux voisinages du plancton
Sous-marin, périscope
A mes risques et périls
Emerge le bout de mon visage….
–
Et s’il se trouve ainsi , que je passe
…. Hasard des trajectoires
– s’est égarée une flèche –
Au coeur des « je t’aime »
… Cible atteinte pour Cupidon?
–
Si j’apparais dans la nasse
Mon regard dans ton miroir,
C’est aller à la pêche,
– Et peut-être un poème ?
Dont nous ferons chanson…
–
RC mars 2013
–

peinture: Lorenzo Lotto – 1480-1550 – Venus et Cupidon – Met mus of Art N YC
Café noir – ( RC )

photo: Giacomelli – Lucio Fontana
Le café tinte plus noir qu’un prêtre,
La soutane donne une corolle sombre,
Sur la place, les pavés blancs ordonnés
Se déplace, l’envolée noire
( c’est un homme)
sur le parvis d’une église
les pigeons noirs sont ses fidèles,
D’ailleurs, s’il les nourrit, comme Saint-François
la messe pourrait être dite dehors
– le temps s’y prête –
( nonchalant )
Déjà, les vélos sont de sortie,
Et de grosses autos noires.
C’est un matin à Catane,
ou un village de Sicile…
La panetteria vient d’ouvrir,
La manivelle et le rideau de tôle
dont le bruit répond aux cloches.
Le tourbillon du café dans ma tasse
Répond à sa cuiller,
Hommes portent chapeaux,
Femmes forment silhouettes,
Et s’affairent en noir,
Un ciel limpide s’étire
Et prépare la journée,
Dans ma bouche, le souvenir serré
Du café du matin,
Et des photos de Mario…
Je repose ma tasse.
RC – 8 septembre 2012 ( à partir de « lecture » de photos de Mario Giacomelli )

photographie: Mario Giacomelli
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Florence Noël -Donnez-nous des pierres…

statue menhir du Rouergue ( visible au Musée Fenaille, Rodez)
Donnez-nous des pierres…
donnez-nous des pierres pour le repos,
leur bogue de granit ocre
connivente au cœur,
en projection
l’enlisement des silhouettes jetées, cassées dessus ces marches
et toute l’aumône des
mouvements d’hommes
bordant nos peines comme fleuves équarris
à grandes enjambées de désirs
qu’on puisse mourir de la longueur d’un arbre
ou de son vêt d’ombre
jetés bas par le midi trop plein
par la touffeur trop dense
et quoi ?
une main, simple,
ses lignes en miroir des vôtres
passerelle dessus
cette cascade pierreuse
une main simple
lisse de vouloir
escale d’un vivre encore
est-ce trop pauvre monde
est-ce trop ?
Florence Noël
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Le banc, au fond de l’allée (RC)
Le banc, au fond de l’allée
—
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Au fond de l’allée, il y a un banc
C’est là, souvent, que je m’arrête , et attends
Près d’une murette , recouverte de mousse
Des parterres de fleurs, puis , une herbe douce
Arrête-toi, au fond de ce jardin,
Et que de nouveau, hier soit demain !
Je revois ta silhouette, pleine de grâce
Dans mon souvenir imprégnée, qui passe
Et joue avec les cerisiers en fleurs
L’ombre et la lumière, en fraîcheur
Mais tu ne reviendras plus,… dans l’attente
Je ne fais que compter , les heures lentes
Invoquer les souvenirs, prendre tes mains
Inverser le couplet et les refrains
Remonter le cours du temps, et ses jours
Qui imprimaient les pas, de l’amour
C’est mon coeur, qu’il faudrait prendre à témoin
A crier , pour te savoir vivante, même loin
Il n’y a plus, dans ce jardin, que mes traces
Et sur le sol, lentement s’aventure, une limace.
Monet: jardin à Giverny
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RC – 14 avril 2012
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Eugène Durif – L’étreinte, le temps 03
Cela, ne pouvons le voir ni l’approcher que par trouées intermittentes, espace silencieux des signes, les gestes frôlés des choses posées dans l’ en-face.
Elles disparaissent, unes et déchirées, la lumière se retire d’elles, les laisse exsangues.
L’
étreinte, le temps, ici, en suspens,
ce que dérobe le jour dans la gravité de l’éclair,
le ciel s’effondre, lambeaux,
visages fermés, l’ un à l’ autre
réfléchis.
A certains tremblements de parler,
dans l’ attente,
croire la retrouver à toute silhouette surgie,
ombre saisie sans atteinte.
La victoire de Samothrace (RC)
Samothrace envahit l’espace.
Les ailes immenses déployées, fougueuse
outrepassant la pierre, moulant l’empreinte des siècles.
Pas d’oiseau, pas de bec
Elle est absolu, ailes sont majestueuses,
elle n’a que faire de sa tête
Cela ne dépare pas sa silhouette
Elle est transe., élégance..
Immense.
Elle plane sur mon passé.
Sur celui des vivants, des trépassés.
Envolée, presque échappée des mains
D’un sculpteur anonyme —– hier, c’était demain
D’un espoir sublimant le voyage.
Il n’y a pas d’otage, ni de mise en cage.
Pas de captivité,
Juste le chant de la liberté.
- la victoire de Samothrace, musée du Louvre, Paris