ThomasPontillo – Ce qu’a dit la beauté – 01

Je veux dire, avec l’humilité d’un ciel qui se propose,
la lumière qui n’est que du présent qui pense,
l’avancée du rêve parmi les vagues discrètes d’un jour,
plus beau à mesure que l’air sur mes lèvres
délivre l’hiver qui hésite au loin dans le chant des brumes.
Dire, et avec ce qui tremble au plus profond de l’âme,
célébrer la voix mêlée de nuit claire,
intensifier le geste qui accueille un corps.
Oui, dire et célébrer – encore – le pays où les pas
sur la neige sont un testament pour la beauté.
Dire, et avec les mots, augmenter en nous
la vibration secrète de l’émoi.
Lueurs immobiles sur l’éternité des eaux,
que votre majesté soit mon identité,
que mon souffle vienne mourir dans les plis de vos soupirs.
Mais est-il vrai que déjà nous ayons goûté
le temps où l’on voit monter, de larmes en larmes,
l’espoir d’un monde retrouvé ?
James Joyce – Ma colombe
montage-peinture: Max Ernst
My dove, my beautiful one,
Arise, arise !
The night-dew lies
Upon my lips and eyes.
The odorous winds are weaving
A music of sighs :
Arise, arise,
My dove, my beautiful one !
I wait by the cedar tree,
My sister, my love,
White breast of the dove,
My breast shall be your bed.
The pale dew lies
Like a veil on my head.
My fair one, my fair dove,
Arise, arise !
XVII
Ma colombe, belle et si chère,
Eveille-toi, éveille-toi
Sur mes lèvres et mes paupières,
Rosée de nuit repose là.
Le vent fleurant tisse en concert
Tous les soupirs comme des voix
Ma colombe, belle et si chère,
Eveille-toi, éveille-toi !
Près du cèdre là je t’attends,
O toi ma sœur et mon amie,
O colombe de ton sein blanc,
Ma poitrine sera le lit.
Pâle rosée vient se poser
Comme un voile par-dessus moi.
Ma colombe, belle et aimée,
Eveille-toi éveille-toi.
- extrait du recueil « musique de chambre «
Des temps et des vents – ( RC )

photo: le vase de Sèvres . Corniche du causse Méjean ( Lozère). provenance site causses et cévennes
–
Il faut écouter la poussée du vent,
Bien sûr, parcourir sa transparence,
Les secousses, qui bousculent,
Les sommets des arbres,
Et parfois les couchent.
Comme la voile qui se tend,
Offerte en sa béance,
Ce cap, cette péninsule,
Sous les rafales, se cabre ,
Tendue à l’extrême , farouche.
Puis, soudain, se déchire,
Sur toute la longueur,
Désormais livrée à elle-même,
Lambeaux agités
dans la tourmente.
Sans s’infléchir ,
> Si c’est un vent libérateur,
Les graines se sèment,
Dispersées en quantité,
Comme une pluie bienfaisante.
Elle transmettent leurs gênes,
Aux mains ouvertes de la terre,
Toujours prêtes à les accueillir,
Alors que les pierres chantent,
De leur corps minéral.
Une réponse au chant des sirènes,
Gardiennes de la mer,
De la brise aimable et ses soupirs ,
Ainsi les rochers sur les pentes,
Leur présence immémoriale …
Mais il arrive que par l’usure des temps,
Ce qu’on croyait éternel,
Selon notre mémoire,
Même la plus ancienne,
Un pan de montagne bascule…
Et si c’est la puissance du vent,
Celle de l’eau et du sel,
A conjuguer leurs pouvoirs,
> L’histoire devient incertaine
Equilibre précaire du funambule…
–
RC – mai 2015
Perspectives basculées ( RC )
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En posant un pied devant l’autre,
Si c’est suivre le fil,
Comme celui de la conversation,
Déplacer une syllabe
Soulever la semelle,
Autre jambe en équilibre…
De la portée de musique,
S’échappent les soupirs
Et s’envolent dièses et bémols
La partition se dilue
Croches et blanches, se perdent
Aspirées par le fond.
Je suis arrivé au bord,
La ligne changeante du stable,
Où le reflet des nuages
Est sous mes pieds
La limite indécise
Où l’espace bascule
Et ouvre des perspectives
Basculées qu’accompagne
La fuite des vents.
Posant un pied dans l’inconnu,
Sur la surface toute proche,
–
RC – 5 décembre 2012

photo Marie, de photosNature 2012, avec son aimable autorisation
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« Tout un monde lointain » est le nom d‘une pièce musicale de Henri Dutilleux
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Faire – défaire ( RC )
dessin : P Picasso: l’étreinte
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A faire et à refaire
A lire et à relire
C’est toute une affaire
Ainsi s’attirent,
Les contraires par paires,
Les joies et le rire,
En un repas solaire
Comme c’est l’écrire
L’entre deux , au dessert
A refaire et parfaire
L’accord des soupirs…
–
Et comme défaire
Est souvent mourir,
Le corps souffert
Grain de délire
Aussi offert,
Et dans l’absence, pire
Le goût de l’enfer
Et l’on dira, partir
Aux vents du désert….
–
RC 2 octobre 2012
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(inspiré par Arthémisia, et son post » Des faires » )
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Ahmed Mehaoudi – dire aux choses qui passent
te seras dans ses bras
tant de berceuses moisies
mais qu’hiver ou automne
essuient les larmes c’était jadis
que tu pleurais
jadis quand c’était de belles défaites de coeur
tu seras dans ses bras
ce que ne dis plus le temps
ni de ces rouges maisons où sifflait le merle
ni encore le blanc rossignol
levé tôt à vous chanter la complainte
ce rien dans ses bras
à poser la tête sur l’épaule qui veille
ces yeux noirs de soupirs
dans ses bras
à écouter la joie de l’aube blanchir le jour
et toi partir avant…
–
James Joyce – ma colombe
Ma colombe (titre proposé)
Ma colombe, ma belle,
Prend ton envol !
La rosée de la nuit repose
Sur mes lèvres et mes yeux.
Brodent les vents parfumés
Une musique de soupirs :
Prend ton envol,
Ma colombe, ma belle !
J’attends auprès du cèdre,
Ma sœur, mon amour.
Cœur blanc de la colombe,
Ma poitrine sera ton lit.
La rosée pale repose
Comme un voile sur ma tête.
Ma belle, ma jolie colombe,
Prend ton envol !
(traduction de Gilles de Seze : http://gdeseze.free.fr/)
Texte original :
My dove, my beautiful one,
Arise, arise!
The night-dew lies
Upon my lips and eyes.
The odorous winds are weaving
A music of sighs :
Arise, arise,
My dove, my beautiful one!
I wait by the cedar tree,
My sister, my love.
White breast of the dove,
My breast shall be your bed.
The pale dew lies
Like a veil on my head.
My fair one, my fair dove,
Arise, arise !
James Joyce (« Chamber Music« , 1907)