Anne Salager – Le grand sommeil

Des roches liquéfiées balbutient
pour elle d’anciens mythes grecs
pour son troisième œil de sphinx
&
Elle vient d’épouser les dernières
lueurs du couchant où s’affirme
la brève embellie des passages
&
La voilà nue seins d’hirondelles
au naturel de sa pâleur
Je sens qu’elle va s’endormir…
Justo Jorge Padrôn – Pierre
photo : Pergé – Turquie
Pierre
De la profondeur la plus dure de la pierre
guettent toujours la mort et son langage.
Le vert reste muet, exilé
devant son brusque effroi.
En son aridité de sphinx,
la pierre nous incite à la superstition
et à la haine qui s’épanche.
De près ou de loin, elle attend
et cherche la tiédeur la plus vive du sang.
Voyez-la ancrée dans la nuit,
occupant l’endroit où chante le jour.
Elle veut être la surprise qui nous aveugle dans ce silence
d’être pierre au milieu des pierres.
Farah Willem – La brume et les insectes bruns

photo de l’auteure
Une pensée semble
s’ouvrir
comme une fleur de lotus dans l’eau, le rideau de verdure découvrant, chevauchant les heures, si fines, si fines, lésions et longues, élongées, entourées de molécules invisibles, une expérience, de nouvelles lois, étendues détendues, fragment du jour, errent les premiers sphinx de liseron, les voix transparentes qui se dilatent dans le jour, élytre du silence, faire entendre ce silence, dans une vérité éphémère cette distension, contre toute saison, l’esprit nage l’huile sur la brume, vers le temps qui ne peut s’empêcher, je sens le vent et ton nom, l’eau et les insectes bruns, le biseau des heures promptes, le sentiment de la boussole, l’acte des heures, je suis enracinée, la pudeur des feuilles froissées, le désœuvrement se concentre, une palette de feuilles égarées à l’abondance d’une musique lisse, ces nœuds de bois sur des substances de détails qui grouillent, je suis dupe, le couloir de la pensée sur des lignes, l’inaction mais ta voix, la voix qui me manque, le croc, ton ventre liquide, le temps se dépose, tes bras de l’éternité, des lueurs minuscules, cet infini qu’on ne peut éteindre, cet infini qu’on ne peut étreindre, et nous perdons la faculté d’être, et nous perdons la faculté d’être libres, je ressens la pensée jusqu’à l’excès des coïncidences, je n’ai rien que l’orifice, la grotte pour polir ma pensée en pensant, à travers des anneaux, des maillures, le point de la voix, les couloirs viennent d’ailleurs, l’élargissement de toi. Et mon cœur entre les seins ?
Et ensuite ? Le ciel cyclopéen.
_
Transe-plantée
Rituel de la lame et des voeux ( RC )
-Bobo Diolasso, vallée sacrée (Dafra) . Burkina FASO
A l’ombre d’un arbre dont je ne saurais dire
Ni le nom, ni le dessin des feuilles,
Cet homme, un être sans âge,
Presque nu, immobile,
– Et peut-être aveugle
Gisant, endormi, sous la voûte des feuillages,
Sur un gros bloc
A l’entrée d’une cathédrale de rochers.
Des lianes pendaient dans l’ombre végétale,
Et m’habituant à elle, je la perçus moins obscure,
> Accompagnée du frêle murmure,
D’une eau, s’écoulant , paresseuse,
De bassins en vasques naturelles.
Dans cette espère ce château creux, inversé,
habité de relents lourds, gras, écoeurants,
Ne devant rien à la profusion végétale.
Il n’y avait pas d’idole incrustées dans les parois,
> Pas de sphinx de pierre, dans ce lieu reclus,
Isolé d’un ciel , qui claque sous le soleil,
Mais un sol presqu’entièrement couvert de plumes,
Et progresser parmi le chaos rocheux,
N’était possible, qu’en foulant aux pieds
De multiples ossements
S’affaissant sous mon poids.
Peut-être étais-je habité par le non-savoir,
Enfui trop vite de la lumière,
> Vers ces profondeurs
Où le ruissellement d’une eau rare
S’associant aux rituels millénaires
Où l’amour et le vivant, meurent
Tranchés, par la lame de l’officiant,
> Le sang se mêlant à l’eau lente…
Peut-être, n’ai-je pas dans l’esprit,
– Celui de faire un voeu
Quand on lit l’avenir
Selon , que la bête sacrifiée
Prolonge ou non son agonie
Sur le ventre ou le dos,
Et , que se vide son corps
Palpitant encore, au milieu des pierres.
Mais , l’homme endormi,
Au pied des carcasses suspendues,
> Et des toisons dépecées
Rêvait peut-être de la vie qui s’enfuit,
Et du murmure indéfinissable,
– Des dieux primitifs,
Offrant, dans ce lieu reclus,
Des promesses de prospérité.
–
RC – 26 janvier 2013
–
A noter qu’à Dafra, le cours d’eau se continue en mares, où vivent d’énormes poissons chats ( silures), nourris avec les restes des animaux sacrifiés: voir photo de Brad 177:
Sylviane Dupuis – au seuil
au seuil
du lieu que tu regardes
nous avons beau écarquiller les yeux
c’est peine perdue d’appeler
dans le noir
ou de chercher à voir
qui
de toi ou de nous, désormais
habite l’envers des choses ?
qui sait, et qui ignore ?
affrontés comme ces sphynx
qui gardaient l’entrée des cités,
face contre face nous témoignons
de l’immobile mystère
en attendant que le jour
plie
Sylviane Dupuis
piblié dans Anthologie poésie poètes d’aujourd’hui
et à l’origine – ds La Revue des Belles Lettres Genève 2007 poème 144
A thought seems
open
like a lotus flower in the water, the curtain of greenery discovering, riding hours, so fine, so fine, and long lesions, élongated surrounded by invisible molecules, an experience, new laws, extended relaxed, fragment of the day , wander the first sphinx buckwheat, transparent voice which expand in the day, scissor silence, to make heard the silence, in an ephemeral truth this distension, against any season, the mind swims oil on mist, towards time that can not prevent, I feel the wind and your name, water and brown insects, bevel prompt hours, the feeling of the compass, the act of hours
I am rooted, the modesty of crushed leaves, idleness concentrates, a range of leaves lost in the abundance of smooth music, these nodes wood among substances details that swarming, I fooled, the corridor thinking on the lines, inaction but your voice, the voice that I miss, the hook, your stomach fluid, time deposits, your eternity arms, tiny lights, the infinite that can not be extinguished, this infinity we can not hug, and we lose the ability to be, and we lose the ability to be free, I feel thought to excess coincidences, I have nothing but the orifice, the cave to polish my mind thinking, through rings, silver grains, the point of your voice, corridors come from elsewhere, enlargement of you. And my heart between breasts ?
And then ? Cyclopean sky.
_
Trance-planted
–
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