Jean-Claude Xuereb – Nadur
photo perso – Ardèche
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extrait de la SUITE GOZITANE (fragments)
NADUR
L’étranger qui voudrait pénétrer dans l’une de ces demeures n’aurait nul besoin d’en forcer la porte. Les clés reposent à l’extérieur sur la serrure de l’entrée. Les occupants trouveraient incongru que quelqu’un, mû par un réflexe précautionneux, les leur rapportât.
Ingénuité ou fatalisme ? Sans doute entendent-ils plutôt signifier qu’il demeurent fidèles à une tradition d’hospitalité, tout en invitant le passant, libre de s’en prévaloir, à n’en point abuser
Persistance de symboles au seuil de ces maisons dont un dauphin figure le heurtoir.
Et si la peur, qui ailleurs arme les verrous, n’avait d’autre effet que d’exacerber jusqu à l’effraction la hâte de posséder et le goût de détruire…
Au cours de notre quête d’introuvables registres, une porte entrouvre la pénombre sur un couloir au glacis de silence.
L’air raréfié retient ici la respiration d’êtres dont le corps étiolé ne doit guère plus peser que l’âme.
Ils nous détaillent leurs maux à voix basse.
Sur le marbre de la cheminée, statuettes et images pieuses se pressent autour de portraits surannés.
Deux veilleuses à la flamme ivre d’huile achèvent de se consumer au pied d’une madone Nous avons hâte d’aller boire à nouveau la brûlure du soleiL
D’autres façades ne nous retiennent pas : celles qui arborent, à l’effigie du kangourou, le luxe arrogant de fortunes australiennes, dans l’étrange proportion d’un îlot à un continent.
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Katica Kulavkova – troisième soleil
photo: enggul
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Troisième soleil : Leo
– rising sun –
A qui confies-tu les cadenas, père ?
A qui les symboles ?
Remémore-toi :
Il est mauvais le destin du Suprême
et le lever est nocturne.
L’étranger profitera
de la générosité du ciel
entrera par des portes souterraines
et nous aspergera de venin
Scorpius-Ophiucus.
Mort prolongée.
Fais une offrande
antidote
accorde-nous une parole vive.
Venge le trône de la liberté
apaise la passion de Vénus.
Que le pécher nous réchauffe.
Mouille avec ta langue le fossé
entre l’index et le pouce
ce monde-pour-soi
cette force invisible
l’amour-pour-l’amour
rien d’autre.
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Que chacun reste à sa place – (RC )
montage perso 2012
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Je me méfie des signes
Clignotant dans la nuit.
Ce sont peut-être des phares,
Guidant les marins vers le port,
Ou des feux sournois qui égarent…
Je me méfie des symboles,
Et des grandes formules;
Des lions ailés sur les drapeaux,
Des discours et grandes phrases,
De bavards, et de l’emphase.
L’image peut-être trompeuse,
Et celui qui l’utilise,
Le fait souvent habilement,
L’abondance nous cerne,
Ce qu’on appelle « prendre des vessies pour des lanternes ».
Que chacun reste à sa place,
Et vénère ou non, un dieu.
Je n’ai rien contre les convictions,
Le parcours de l’imaginaire.
Chacun est libre, les pieds sur la terre,
De percevoir entre les nuages,
Les murmures des oracles,
Et de croire aux miracles,
De lire des figures
Dans le marc de café…
Chacun ses choix.
Quant à en faire une loi,,
Imposer ce qu’il faut croire,
Permettez que je doute,
Je ne partage pas avec la planète,
Mes hallucinations.
Je ne suis pas conforme,
Et pas fait pour les dogmes.
Et j’ai quelque suspicion,
Envers la politique, et la religion.
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RC – sept 214