Une île d’écriture – ( RC )
Il y a bien un moment, où le bateau,
à force de dériver, accoste à une île.
Je suis d’abord méfiant, puis y risque quelques pas,
on ne sait quel sera l’accueil.
> Je laisse passer du temps.
On apprivoise l’île et ses occupants,
animaux, végétaux et humains
( s’il y en a ).
Inversement l’île apprivoise,
on dirait qu’elle veut m’inclure dans elle,
faire connaître ses humeurs,
à travers ses mangroves, ses lianes,
ses singes et insectes .
Les fruits exotiques sont mon apéro,
et j’ai trouvé un abri
pour les jours de pluie.
Bientôt je vais me greffer aux arbres,
je serai leurs racines,
et une extension de feuillage,
comme si avant j’étais une chose morte,
et qu’alors j’eusse renoncé à l’inutile.
C’est ainsi que j’ai abordé l’île d’écriture,
porté par les alizés,
et maintenant je fleuris d’encre .
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RC – oct 2017
Suivre ses propres traces ( RC )

photo: maison-boutique abandonnée Arizona
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Le vent habite le village désert,
Les portes se sont refermées sur le silence,
La vie est partie ailleurs.
Je passe au travers de palissades,
Et de jardins encombrés de broussailles,
Les bassins d’où l’eau s’est évaporée.
Des pompes d’un autre âge, gardent la station service
Végètent d’antiques véhicules
Aux pneus affaissés
Aucun chien errant ne vient plus
Aboyer sur mon passage,
Où les végétaux se referment lentement.
Juste des empreintes de pas,
Conservées dans la boue sèche,
> Leur taille correspond à la mienne.
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RC- 24 juillet 2013
tentative de traduction
The wind inhabits the deserted village
Doors closed on the silence,
Life has gone elsewhere.
I pass through fences,
And cluttered brush gardens
The Pools wherefrom water has evaporated.
Pumps of another age, keeping the gas station
Languish antique vehicles
Tires sagged ,
No wandering dog no longer comes
Barking on my way,
Where the plants are closing slowly.
Just footprints,
Kept in dry mud,
> Their fits are like mine.
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Il y a tout à apprivoiser, du présent ( RC )

peinture: Sandro Botticielli; la naissance de Vénus 1490
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D’abord fermer les yeux et les ouvrir ailleurs.
Et puis s’efforcer de la suivre « à l’instinct »
Comme sauter à pieds joints dans un autre monde.
Couleurs déplacées, ombres allongées, végétaux inconnus.
Elle ne connaît d’attraction terrestre,
qu’un pied léger, posé sur le jour qui naît…
Les combinaisons de soi , à elle
les mots qui lui parviennent, ne sont plus les mêmes
Chargés de sens et d’irisations multiples
Un ensemble silencieux, refermé sur son mystère,
Peut-être à contourner, faute d’avoir les clés du passé.
J’ai ouvert les yeux, finalement, à l’audace d’une fusion,
A l’harmonie d’un jour auquel elle accorde des touches de soie,
Comme la naissance de Vénus, de Botticielli,
Ayant l’évidence d’une éclosion, unique et attendue, à nos yeux neufs,
…. Il y a tout à apprivoiser, du présent.
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RC – 26 mai 2013
Autres usages d’un temps ( RC)
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( impressions d’un cheminement dans le temps décalé : en Afrique Noire )
Suivant l’âne et Charles avec sa carriole
Le chemin se serpente à travers la brousse
Et l’après-midi file à l’ombre épaisse des manguiers
Jusqu’aux portes des concessions
Eparses dans les champs craquelés de sec
Les histoires de la vie quotidienne
Les échos d’une fête lointaine
Dans la matière palpable de la nuit
Se sentir ailleurs – et sentir l’ici
D’autres usages d’un temps
Sans électricité et artifices
Sous les étoiles si pures
Qu’on pourrait relier en touchant du doigt
Par quelques années lumières
En rencontres possibles des mondes et galaxies
Sentir ailleurs – l’ existence dans le hasard.
Sentir l’ailleurs ici, à cheval sur un présent
Et des traditions millénaires
Ouvertes aux végétaux de majesté
Et l’occident – improbable
D’abstraction , à capturer la fatalité
Et la poussière d’espaces
En espoir de pluie nourricière.
Destin de saisons et d’inéluctable
Sous la voûte des tropiques
Et l’arbre à palabres.
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RC 20-mai 2012
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