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Métaphore d’un confinement – ( RC )


projet « Forest City » Malaisie

Le temps languit, étiré
en toute liberté,
croit-on…

Il n’y a pas de barreaux à nos fenêtres,
le cœur profane de la ville
est encore vide
et la pensée ne s’encombre plus
d’une pluie battante

les voix du monde
se sont arrêtées
sur une muraille de verre
car même l’orage est confiné
derrière une grande barrière :

il ne reste plus qu’à compter les jours,
détacher les brins de laine
pris dans la peine et les barbelés
de nos chemins.

Eux s’en vont bien quelque part,
retrouver les sommets,
les cheveux des fougères :

( peut-être qu’ailleurs coulent les rivières,

comme se rassemblent les larmes
d’une multitude de ruisseaux
à la suite d’un crime métaphorique )
emportant avec lui l’espoir
et les désirs avec le temps.

Le temps est toujours innocent.
Il ne connaît pas l’enfermement,
les murs de l’appartement.
Puisque tu es immobilisé…

tu peux toujours sortir de ta tanière
par la voie de l’imaginaire…


Nature morte au verre, à l’orange et aux citrons – ( RC )


peinture  Marsden Hartley – nature morte aux citrons – 1928

Grande joie de lumière
dans la toile rectangulaire
dès qu’on ouvre la porte :
une nappe plissée,
quelques fruits disposés,
un verre , et la musique du silence
en couleurs complémentaires :
c’est ce qu’on pense
être une nature morte…

Trois citrons aux ombres vertes,
attendent sur une assiette.
Aucun des fruits ne bouge,
personne ne les dérange
dans leur écrin rouge
voisin du verre à pied
où transparaît la valse des bleus
dans leur savant camaïeu.

Juste une orange isolée
dans le coin droit,
dépourvue de pesanteur
attend qu’on la mange.
Avant qu’on l’attrape
elle répercute un peu de couleur
sur le verre vide
dont la matière limpide
se dresse sur la nappe.

Le côté gauche est plus incertain:
il est probable
qu’on devine un coin de table :
– on a négligé le reste du festin
pour concentrer notre attention
sur la composition -,
les courbes qui se répondent
et les formes rondes
de la nature morte aux citrons.

RC – Août 22


Mona(-s) désacralisée (s) – ( RC )


montage RC

J’en connais certaines
qui dépassent du tableau
et survivent aux vernis
comme si des couches de fards
parvenaient à gommer les rides
et les années.

Seraient-elles allongées
telles Olympias
sur le divan du psychiatre,
reproduites à l’infini
en carte postale,
parées de moustaches,

« les Mona » de Vinci
ont maintenant de la concurrence
avec les Marylin de Warhol,
qui finiront à leur tour
bien esseulées
dans un musée,

parées de robes de verre
à l’épreuve des balles.
– On ne sait jamais :
qu’on veuille s’en emparer
les cacher sous un lit –
( pour satisfaire son appétit
– …d’images)


Marc Hatzfeld – n’oublie pas…


Si l’herbe casse sous le regard du vent
Et si le vent dérape sur le seuil de ce soir
Si le soir se dérobe et tâtonne
N’oublie pas de leur dire:
«Retournez aux pages blanches de vos cahiers perdus
Retournez au lit de feuilles sèches
Retrouvez le chemin d’une étoile.»
N’oublie pas de leur dire
De retrouver la bulle d’air égarée
Dans la bille de ver
re
Libellule à l’envers.
N’oublie pas.


L’oeil éteint du gardien invisible – ( RC )


photo Alecio de Andrade

Je suis entré dans le palais désert,
les portes se sont ouvertes
sans que je les pousse,
un gardien invisible portait un masque :

un visiophone ouvert
sur l’indifférence…

J’étais seul dans un univers sans issue,
entouré de somptueux tableaux,
protégés par d’épais panneaux de verre.

Un sol de marbre lisse
renvoyait leur reflet.

Des sculptures aux gestes figés
tentaient de prendre leur envol,
mais le poids exagéré de la pierre
les maintenait au sol :
aucune n’avait de couleur.

Elles avaient dû la perdre
dans leur effort
pour s’échapper ainsi de l’espace clos,
où seule une lumière grisâtre
parvenait du plafond.

Mes pas , tournant sur eux-mêmes,
ont résonné
dans le dédale des salles,

Je me suis aperçu
qu’elles s’ouvraient sur celles
que j’avais déjà parcourues.

Je n’ai croisé aucun visiteur,
à qui j’aurais pu demander
la sortie.

J’ai fini par confondre
tous les tableaux,
toutes les couleurs,

sous l’oeil éteint
du gardien invisible :
pressentant que jamais,
je ne sortirais du palais…


Strass – (Susanne Derève) –


Pierre Soulages – Etude 04 B

.

Ce ne sont que petits éclats

de verre de strass  de mica *

que recouvrent les pas

que ternissent les ombres

qu’engloutissent les nuits

.

Est-ce un rayon de lune

un diamant désuni  ?

Un soulier sonore  

claque sur le bitume  …

.

Qu’a t il trahi  de rêves

celui qui foule aux pieds

et passe sans les voir 

ces étoiles pâlies,

ces perles égarées,

.

petits éclats de verre

de strass ou de mica *

qu’enserre  le granit

et qu’étreignent  les pas

.

* emprunt à  Jean Claude Pirotte


Béatrice Douvre – A l’hiver du feu


Afficher l’image source

Le visage traversé
Dans des jardins à jambes de verre, et de roses
Quand recommence la mer tendue
Des lampes, et le froid
Et que l’on tient, dans les mains, le dernier monde
Rêve, et à l’avant du rêve un corps l’éclaire
J’ai peur de ces troupeaux dans le progrès des lampes
Peur de la terre des pas
Près de la porte où penche
La nuit lourde de l’aile Il y a ce péril
Des lampes dans la maison
Ce désir
Comme un taureau dans l’or
Un feu de bois de rose
Coupé par l’hiver


Un sonnet d’après l’absinthe – ( RC )


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peinture: E Degas –  le  verre  d’absinthe

Jo tombe à l’eau
dans le port de Saint-Malo…
on peut aussi se noyer dans un verre de vin,
            ( tu le prends, je te le tiens ):

A Saint Malo, il y a une semaine j’y étais;
les nuages flottaient au-dessus des quais,
c’est juste en front de mer,
que j’ai avalé le dernier verre

( puis la lumière s’est éteinte…
il n’y avait plus d’absinthe )…
c’est une histoire d’eau un peu trouble

tout à fait décente
mais ,  qu’il est difficile de remonter la pente
            ( je crois que j’y voyais double !) .


Andreï Poliakov- Débarquement chinois (59-60)


 

Nicolas de Stael. Nature morte au verre 1954 50x63

   Nicolas de Staël – Nature morte au verre

 

 

        Tu ne demandes donc pas grand-chose

à la muse étrangère ?

         tu lui dis, permets-moi de pleurer tout cela,

et elle ne pleure toujours pas ?

 

 

 

 

Elle ne pleurera pas

 tant

         que tu es vivant

et respires

dans l’envers de ton sommeil glacé,

         tant que tu fais tourner

avec une seule main  –

         comme un mot  –

         un petit verre,

et avec

ton autre main,

        comme un petit verre  –

        un mot ! »

 

 

 

Débarquement chinois

editions Novoje izdatelstvo , Moscou.

Revue Rumeurs Novembre 2018 (extraits)

traduction Katia Bouchoueva

 

 


Luis Aranha – Poème Pythagore 11


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Après un tableau
Une sculpture
Après une sculpture
Un tableau
Anti-anatomique
Trait de vie sur une toile morte
Extravagant
Je voudrais être peintre !
J’ai dans mon tiroir des esquisses de bateaux
Je n’ai réussi que les marines
Nous sommes les primitifs d’une ère nouvelle
Egypte art synthétique
Mouvement
Excès de lignes
Bas-reliefs de Thèbes et de Memphis
Partir en Egypte
Comme Pythagore
Philosophe et géomètre
Astronome
Je découvrirais peut-être le théorème de l’hypothénuse et la table de multiplication
Je ne me rappelle plus
J’ai besoin de retourner à l’école
Le ciel est un grand tableau noir
Pour les enfants et pour les poètes
Circonférence
Le cercle de la lune
De Vénus je trace une tangente lumineuse qui va toucher quelque planète inconnue
Une ligne droite
Ensuite une perpendiculaire
Et une autre droite
Une sécante
Un secteur
Un segment
Comme la Terre qui est ronde et la lune une circonférence
il doit bien y avoir des planètes polyèdres des planètes coniques des planètes ovoïdes
Evoluant parallèlement elles ne se rencontrent jamais
Trapèzes de feu
Les astres décrivent dans le ciel des cercles des ellipses et des paraboles
Les ronds s’adossent les uns aux autres et tournent comme les roues dentées de machines
Je suis le centre
Autour de moi tournent les étoiles et voltigent les corps célestes
Toutes les planètes sont des ballons de baudruche colorés que je retiens par des ficelles entre mes mains
Je tiens dans mes mains le système planétaire
Et comme les étoiles filantes je change de place fréquemment
La lune pour auréole
Je suis crucifié sur la Croix du Sud
Avec dans le cœur
L’amour universel
Globules de feu
Il y a des astres tétraèdres hexaèdres octaèdres dodécaèdres et isocaèdres
Certains sont des globes de verre opaque avec des lumières à l’intérieur
Il y en a aussi de cylindriques
Les coniques unissent leurs pointes en tournant en sens contraire autour de l’axe commun
Prismes tronqués prismes obliques et parallélépipèdes lumineux
Les corps célestes sont d’immenses cristaux de roche colorés qui tournent dans tous les sens
La chevelure de Bérénice n’est pas une chevelure
Le Centaure n’est pas un centaure et le Cancer n’est pas un crabe
Musique colorée qui résonne dans mes oreilles de poète
Orchestre fantastique
Timbales
Les cymbales de la lune
Claquement des castagnettes des étoiles !
Elles tournent sans cesse
Furieusement
Il n’y a pas d’étoiles fixes
Les fuseaux filent
La voûte céleste est le hangar de zinc d’une usine immense
Et la laine des nuages passe dans l’engrenage
Trépidations
Mon cerveau et mon cœur piles électriques
Arcs voltaïques
Explosions
Combinaisons d’idées et réactions des sentiments
Le ciel est un vaste laboratoire de chimie avec cornues creusets tubes éprouvettes et tous les vases nécessaires
Qui m’empêcherait de croire que les astres sont des ballons de verre pleins de gaz légers qui se sont échappés par les fenêtres des laboratoires
Les chimistes sont tous des imbéciles
Ils n’ont découvert ni l’elixir de longue vie ni la pierre philosophale
Seuls les pyrotechniciens sont intelligents
Ils sont plus intelligents que les poètes car ils ont rempli le ciel de planètes nouvelles
Multicolores
Les astres explosent comme des grenades
Les noyaux tombent
D’autres montent de la terre et ont une vie éphémère
Astéroïdes astérisques
Fusées de larmes
Les comètes se désagrègent
Fin de leur existence
D’autres explosent comme des démons du Moyen Âge et des sorcières du Sabbat
Feux d’antimoine feux de Bengale
Moi aussi je me désagrégerai en larmes colorées le jour de ma mort
Mon cœur vaguera dans le ciel étoile filante ou bolide éteint comme maintenant il erre enflammé sur la terre                        Etoile intelligente étoile averroïste
Vertigineusement
En l’enroulant dans le fil de la Voie Lactée
J’ai jeté la toupie de la Terre
Et elle vrombit
Dans le mouvement perpétuel
Je vois tout
Bandes de couleurs
Mers
Montagnes
Forêts
Dans une vitesse prodigieuse
Toutes les couleurs superposées
Je suis seul
Grelottant
Debout sur la croûte refroidie
Il n’y a plus de végétation
Ni d’animaux
Comme les anciens je crois que la Terre est le centre
La Terre est une grande éponge qui s’imbibe des tristesses de l’univers
Mon cœur est une éponge qui absorbe toute la tristesse de la Terre
Bulles de savon !
Les télescopes pointent le ciel
Canons géants
De près
Je vois la lune
Accidents de la croûte refroidie
L’anneau d’Anaxagore
L’anneau de Pythagore
Volcans éteints
Près d’elle
Une pyramide phosphorescente
Pyramide d’Egypte qui est montée au ciel
Aujourd’hui elle est intégrée dans le système planétaire
Lumineuse
Son itinéraire calculé par tous les observatoires
Elle est montée quand la bibliothèque d’Alexandrie était un brasier illuminant le monde
Les crânes antiques éclatent dans les parchemins qui se consument
Pythagore l’a vue quand elle était encore sur terre Il a voyagé en Egypte
Il a vu le fleuve du Nil les crocodiles les papyrus et les embarcations de santal
Il a vu le sphynx les obélisques le temple de Karnak et le bœuf Apis
Il a vu la lune à l’intérieur du caveau où se trouvait le roi Amenemhat
Mais il n’a pas vu la bibliothèque d’Alexandrie ni les galères de Cléopâtre ni la domination anglaise
Maspero découvre des momies
Et moi je ne vois plus rien
Les nuages ont éteint ma géométrie céleste
Sur le tableau noir
Je ne vois plus la lune ni ma pyrotechnie planétaire
Une grande paupière bleue tremble dans le ciel et cligne
Un éclair farouche zèbre le ciel
Le baromètre annonce la pluie
Tous les observatoires communiquent entre eux par la télégraphie sans fil
Je ne pense plus car l’obscurité de la nuit tempétueuse pénètre en moi
Je ne peux plus mathématiser l’univers comme les pythagoriciens
Je suis seul
J’ai froid
Je ne peux écrire les vers dorés de Pythagore!…


Sylvia Plath – Je me croyais invulnérable


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art: Raoul Ubac  –  le  combat de Penthésilé

 

Je me croyais invulnérable,
Je me croyais à tout jamais
Inaccessible à la souffrance –
Bien défendue contre la douleur intérieure,
Le tourment.
Le monde était tout illuminé de soleil de mars
Mon esprit traversé d’éclats verts et or
Mon coeur plein de joie, et pourtant si sûr
De cette douleur douce et aiguë que seule cache
La joie.
Mon esprit volait plus vite que la mouette,
Qui sillonne les hauteurs à perdre le souffle
Et de ses ailes de grand voilier
Raye l’étendue faussement bleue
Du ciel.
( Comme le coeur de l’homme doit être faible,
Un pouls qui bat, quelque chose qui tremble,
Un instrument fragile et brillant,
Un instrument de verre qui un jour chante et
Un jour pleure.)
Et brusquement le monde est devenu gris,
L’obscurité a chassé la joie.
Et il n’est resté que le vide sourd et douloureux
Que des mains inattentives avaient touché
Détruit
Mon filet tout argenté de bonheur.
Les mains se sont arrêtées, interdites,
Comme elles m’aimaient, elles ont pleuré,
Quand elles ont vu mon firmament tomber,
En lambeaux.
( Comme le coeur de l’homme doit être faible,
Un pouls qui bat, quelque chose qui tremble,
Un instrument fragile et brillant,
Un instrument de verre qui un jour chante et
Un jour pleure. )

Sylvia Plath.


Génie du verre ( RC )


Photo Anders Petersen:  tomorrow  started

Photo            Anders Petersen:           tomorrow started

Génie du verre

 

 

 

Il est un génie,
Qui surgit ,
Au fond  du verre de whisky,

Lorsque le froid descend,
Comme une  chape de plomb,
Sur la ville et le portrait de Marylin,

Se dopant aux amphétamines,
….Et la musique  titube,
Avec elle, se déchire,

La voix de Joplin,
( Janis pour les intimes )
Les cheveux sales au matin livide,

Les pavés retiennent encore la nuit,
Aux façades, les traînées de suie,
Les fils électriques, et leur calligraphie,

Une journée  va encore  brûler,
Les vêtements tremblants commencent à puer,
Et la bouteille est vide…

RC – 4 septembre  2013

voir  sur même thème cet article…

ainsi que le texte  d’Edith,  dont je suis parti pour  en faire  « l’écho »…

et mon auto-traduction…

Here is a genius,
That arises,
In the glass of scotch

When the cold descends
As a lead blanket,
On the city and the Marilyn’s portrait,

Doping with amphetamines,
And the music …. staggers,
With her, tears away,

The voice of Joplin,
( Janis for short )
Dirty hair in  livid morning,

The cobblestones still catches the night
Soot trails , on the facades,
Electrical cables, and their calligraphy,

A day will still burn,
Trembling clothes start to stink,
And the bottle is empty …

 

Résultat de recherche d'images pour "janis joplin portrait" Janis Joplin – dessin Cindy-jo Dietz


Ménagerie de papier – ( RC )


( un hommage  à Tennessee Williams, et  Chr Boltanski )

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installation:  Chr Boltanski

 

 


             Petit zoo miniature,
de la ménagerie …
objets de prix,
en villégiature
     deux par deux
se suivent à la queue leu-leu,
sur les étagères…
petites choses en verre…

          Vous auriez pu choisir,
pour parader à loisir
entre deux pots de bière,
une autre matière:
       celle un peu plus malléable
que l’on trouve sur la table,
juste des morceaux de papier,
que je pourrais plier.

         Trente millions d’amis,
tous en origami,
certifiés d’origine,
occupant la vitine,
en état de marche:
            tout le bestiaire,
à l’abri des courants d’air :
–      une nouvelle arche.

         Comment s’est-elle échouée là
à côté de la penderie,
la vitrine de la ménagerie
où se reflète le matelas
et deux ou trois caisses ?
les restes d’un naufrage:
l’arche après l’orage
( et toute la chambre en détresse ).

         En fait, vous avez compris,
j’occupe mes nuits
à transformer les légendes,
en une sorte de sarabande,
où l’hiver se tient au chaud,
quand je découpe aux ciseaux
tout un parc arboré, et un zoo,
pour tous ces animaux.

         Ce sont des rêves fragiles,
qui dérivent comme les îles
que je prélève dans un cahier
en faisant des bandes de papier :
promis à la déchirure,
où la part de l’écrit se disloque elle-même
on dira que les poèmes
trouvent une seconde nature.

       Mais les rêves refusent de se faire attraper,
dragons et tigres de papier
ont pris leur indépendance
( quand le chat n’est pas là, les souris dansent ! ),
          si on regarde toutes ces bêtes,
la nuit leurs ombres se projettent
sur le plafond
et comme il se doit, le manège tourne en rond.

Les corbeaux et les canards
partagent le cauchemar,
du cahier sur la table:
          le château sera de sable
un souffle, une petite averse,
et tout se renverse,
sans même un cri,
         ( rêves en confettis ).

        C’est la fin de la procession :
cela tourne à l’obsession:
le manège occupe maintenant la malle,
et tout ce petit monde s’emballe,
aussi,    le matin,        de bonne heure,
quand tout le monde semble dormir
je me transforme en inquisiteur,
et décide de l’avenir .

         Ce sera bien un drame
quand je livrerai aux flammes
pieds et poings liés
ce monde de papier…
       Souhaitons qu’une autre matière
puisse échapper à l’enfer:
Choisissons-la moins éphémère
–        une ménagerie de verre fera l’affaire         –


RC – août 2017

 


le marbre blanc, d’où s’est retiré mon sang – ( RC )


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Photo:  Mimmo Judice

 

 

C’est un incident malencontreux
qui fendit ma joie
de tout mon poids :
en quelque sorte ,   un désaveu.
          Je suis tombé de ma hauteur
mon socle a vacillé, par malheur:

             L’avenir est bien étroit :
il suffit d’être maladroit,
         et me voila par terre :
mon sourire en éclats,    comme du verre
qu’il faudrait qu’on recolle :

Ils sont sur le sol :
avec mes émois
        – quelque chose de froid
dans le marbre blanc
d’où s’est retiré mon sang:
                  comme par erreur…
Il faudrait retrouver le sculpteur …


RC – nov 2017


Une ville dont je connais les artères – ( RC )


C’est une ville dont je connais les artères,
je les ai parcourues, en tout sens,
il y a longtemps,
et je trouvais mes repères ,
devenus familiers,
à la façon d’un jeu de pistes.

Je suis retourné,
dans ma ville natale,
les places ont bien le même nom,
mais les immeubles n’ont plus le même aspect,
leur aspect est devenu froid,
débordant de béton et de verre.

Les rues ont le même tracé,
mais je ne les reconnais plus .
Elles ont perdu leur familiarité,
leur intimité.
Elles sont des lieux de passage,
et pourraient être ailleurs.

L’ailleurs s’est importé,
décalqué, en quelque sorte
sur les quartiers, que je traversais à pied.
La ville que je connaissais
s’est dissoute peu à peu, comme un souvenir
auquel je n’accède plus.

Elle n’a de nom que géographique .
La ville de mon enfance
avait son charme désuet,
ses rues encombrées,
mais je pouvais lui parler.
Mais si je le fais aujourd’hui, personne ne répond.


RC  – janv 2017


Deux volumes et deux bouteilles ( presque un Morandi )- ( RC )


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photographe non identifié

 

C’est comme un aria,
          un brin suspendu ,
avant l’extrémité du parcours de l’archet…. ,

La lumière chatoie,
comme vibre encore la corde :
l’eau reste attentive dans la carafe,

L’épaisseur du verre          soupire,
hésite à donner de l’ombre sur le mur,
– ou alors si légère –

une pâte              qui entoure le creux,
immobilisée,   – fusion de la silice –
participe           au léger grain du fond :

ainsi le ferait le bourdon,
soutenant l’envol des voix…
posées             comme les deux objets

aux rayures noires,        régulières ,
–   légèrement ironiques – .
De taille semblable,

ils sont insolemment lisses,
ronds,               mais sans rouler,
contrepoint musical

On pourrait imaginer les voir
quitter le sol,
se mettre          en mouvement

perturber le liquide ,
sautiller en désordre
dans cet accord          trop parfait

auquel seuls croient
les gris cristallins
de la photographie .


RC avr 2017


Socrate – ( RC )


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peinture: J L David: la mort de Socrate

 
En suspens sa phrase commencée
il peut reprendre son haleine
au bord de la falaise, avancé
il n’est pas au bout de sa peine :

personne ne voit que s’interrompt la ligne :
le discours peut reprendre
les dieux lui font signe
le temps peut se suspendre

nul n’attend son départ
quand il porte à ses lèvres le verre :
il peut savourer le nectar,
et bientôt voir à travers :

Baisse le niveau du breuvage
comme la mer se vide
découvrant la plage
une étendue livide

Passant du verre au bronze ancien
pas de vin écarlate
ni le sirop du pharmacien,
mais le poison offert à Socrate

Tu peux le voir, inclinant son calice,
les compagnons détournant la tête,
et lui, boit – comme avec délice
( on l’imaginerait bientôt « pompette »)

tout cela sans qu’il confesse
l’idée même d’une vie interrompue
dans la curieuse ivresse
donnée par la cigüe

comme quoi on ne sait pas où mène
une simple boisson :
l’accompagnant comme pour la Cène
( ce dernier repas manquait de cuisson )

C’est à mesure que tu bois,
que tu t’éloignes des bords,
>       c’est ainsi que l’on se noie,
et qu’on trinque avec la mort.

RC – oct 2016


Pépites, étoiles, boule de cristal – ( RC )


0002de DA.jpg
Montage: RC

Dis, t’as vu comme est petite
la terre, dans la boule de cristal  !
Tu la secoues, et des étoiles
comme autant de pépites.

Se posent sur tes paupières,
teintes d’un léger bleu :
et dessus,         tes yeux…
( je te vois ainsi à l’envers )….

Un peu de neige volète
mais  il ne fait pas aussi froid
qu’on le croit :
elle retombe sur ta tête .

Puis se repose
éparpillée sur ton image.
C’est ton visage
sous des pétales de rose .

Ceux-ci sont blancs .
Mais ce n’est pas l’hiver,
dans la boule de verre :
il y fait toujours printemps.

Et même si les saisons changent .
Il ne peut pas mourir
avec ton sourire .
Lui,  a quelque chose de celui d’un ange …

RC- septembre  2016

D’après  « pas vu ça ».. de R Desnos


Question d’électricité – ( RC )


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peinture:  Andy Warhol  –   electric chairs

Question d’électri-cité
voilà qu’une nuit éructe
haut voltage
des plumes et des néons.
Ils se confondent avec obstination
avec le brouillard des âmes.
Et ce sont des encres,
les plus indélébiles,
imprimant sarabande :
la ville obtuse
fait la sourde oreille
à la moiteur des nuées.
Aussi éveillées que peuvent l’être
les avenues désertes
jusqu’à ce que la lumière artificielle
soit dissoute dans l’ aube violette.
Je vois les indociles
qui pensent que le jour
n’est qu’un détour
accrochés aux barreaux :
la prison les ronge
dans quelques mètres carrés.
Ils n’ont que les murs grisâtres,
et la peau décolorée.
La langue fourbue,
la parole féroce,
une cuvette en émail
la lueur alternative
de la publicité lumineuse,
les maillons du mensonge,
le macadam des rues
marqué d’ombres vertes
comme de fer rouge.
Le reprise du trafic,
le grondement des rames,
les sirènes de police
pour lancer des conjectures.
Le sol est en verre pilé.
Qui ose s’y risquer pieds nus ?
Tu vas deviner l’heure..
( on éxécute mieux à l’aube) –
quand on viendra te chercher
pour te conduire
selon le protocole officiel
à la chaise électrique .


RC – avr 2016


Henry Miller – Vin


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C’est un vin qui glisse comme du verre fondu,
et qui coule dans les veines comme un feu fluide, lourd et rouge,
dilatant le coeur et l’esprit. On se sent à la fois lourd et léger ;
leste comme l’antilope et pourtant incapable de bouger.
La langue rompt les amarres, le palais s’épaissit agréablement,
les mains décrivent des gestes larges et lâches, de ceux qu’on aimerait tirer
d’un crayon gras et tendre. On aimerait peindre tout à la sanguine ou au rouge pompéien,
avec de grandes éclaboussures de fusain et de noir de fumée.
Les objets s’élargissent et se brouillent, les couleurs sont plus vraies et plus vives,
comme pour le myope quand il ôte ses verres.
Mais par-dessus tout, c’est un vin qui réchauffe le cœur.

Henry MILLER « Le Colosse de Maroussi » (Ed. du Chêne, 1948)


Le tracé lumineux des écarts – ( RC )


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Se lancer comme un projectile, à travers les espaces,              à la manière d’une fusée destinée à explorer d’autres mondes,           et dont elle ne sait rien encore..

Ainsi les étoiles seraient bien reliées entre elles,      par des fils ténus cheminant de l’une à l’autre,

Ce serait l’équilibre des pensées, reflétées,      ou renvoyées ( une balle au rebond), sur la perpendiculaire d’un mur de verre, invisible, .

Le tracé lumineux fixé dans les écarts, et dont on tire de l’invisible, l’écrire,

( comme un souffle vital que l’on expulse).

Le libre intervalle entre l’immobile, et le moment où court la plume, chantournant les mots.

Toujours en équilibre instable .

Ce serait ainsi que l’on parcourt l’univers

                                ( en le construisant au fur et à mesure ).

RC – mai 2015


Ange empêché – ( RC )


Image associée

peinture:  Odilon Redon ( l’ange déchu )                                    

 

L’ange  s’est , d’un coup de prière
Déplacé du vitrail,
Accompagnant de rayons,

Les âmes sombres,
Là où la lumière renonce,
A  aller plus loin….

Car la porte  du ciel était close,
Sur ce qui suinte,
Davantage  que les larmes,

– celle des cierges –
Vite figées comme ce qui transpire
Des  confessionnaux.

L’ange assistant aux offices,
Aux  cérémonies,et rites
N’émit pas  d’opinion,

Sur ce qui est factice
Dans la religion,
Et sa pratique hypocrite,

La crainte des démons,
La morale  et ses sermons,
Contrition et pénitence…

Malgré une infinie patience,
Finit par abdiquer,
Et,     de guerre lasse,


Voulut reprendre sa place,
En laissant à d’autres,
La lourde tâche

De laver les péchés
– et autres tâches-
méritant l’absolution,

celles dont les  prêtres s’acquittent,
avec l’habitude,
qui sied à leur profession.

Notre ange fut pourtant empêché,
De rejoindre dans l’air pur,
( peint  d’un traditionnel azur ),

Les autres figurant
Un saint Sacrement,
porté dans les airs,
dessiné sur le verre…

Le vitrail étant fêlé,
Peut-être par un jour de tempête ,
Ou bien une figure ailée,
L’ayant heurté de la tête

On avait remplacé,
Le morceau cassé …
La fenêtre maintenant fermée,

Avec du verre armé,( anti-reflets )
Ne permet plus de voir,
La couleur  de l’espoir,
Même à l’aide  d’un chapelet.

Ne pouvant  contempler le ciel,
L’ange ,           sur terre  enfermé,
Est maintenu prisonnier,

Comme lorsque  le gel
Empêche, de nuit comme de jour,
A la vie, de suivre  son cours…

Ainsi suspendue
A la morte saison,
Qu’elle  sangle  et ficelle ;

Ayant comme Icare, perdu ses ailes,
Et avec elles, la raison,
Il fut,          avec les  hommes,       confondu…

Peut-être est-il des nôtres :
–             On ne sait rien de lui …
Peut-être  hante-t-il
les lieux,   la nuit,

avec une  sébile
En appelant aux  apôtres
et autres  saints :

Ceux  qui sont  envoyés ici-bas
Dans le plus grand  anonymat,
et que rien ne distingue des humains :

C’est sans doute chez eux  qu’il faut chercher
( dans les  âmes  grises,
              plutôt que les  églises ).

On dit  que l’ange y est caché,
Ou bien, derrière les esprits, pacifiés..
Préférables  à ceux  qu’on a crucifiés  …


RC – juin 2015

photo ci-dessous  : Lady Schnaps

ange ds l'église


Luc Berimont – Si le jour est venu


Maya Figurines Preclassic Period 1800 BCE-250 CE (8) 411522480

sculptures:   têtes  ( art Maya )

 

Si le jour est venu dans un jet d’étendards
Le soir s’en est allé avec la proie de l’ombre
Mes frères, les humains, qui veillez sur le tard
Je n’ai connu de vous que l’amitié du pain.

Je penche mon visage à dormir sur ma main
J’entends gonfler des voix dans le gras des collines
Les piverts ont cloué des forêts de sapins
Le feu n’avait plus faim de mes arbres de verre
Une horloge battait à la tempe du temps.

Mes frères, les humains, qui veillez sur la terre
– Maraudeurs accoudés dans le verger des lampes –
Jetez-moi vos fruits d’or jusqu’au frais du matin
Couvrez-moi de vos cris, de soupe, de chaleur
Que je brave la peur, la lune et les feuillages.

 

LUC BERIMONT « Poésies complètes »


un furtif passage – ( RC )


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Quelle  est cette  lumière  étrange
Qui  ici, soudain,  règne ?
Est-ce  la parole de l’ange,
qui , tout – à – coup,  saigne,
Dans  cette pièce austère
Où rien ne bouge,
Au fond du verre
aux reflets  rouges ?

J’y vois un mur transpercé,
L’éclair fendant les nuages  ;
Ton image inversée,
Celle de ton visage.
L’arrondi des sourcils…
Le reste se fond dans l’obscur,
Une vision, du reste ,          bien fragile,
Qui se dissout lentement dans le mur.

C’est  peut-être un vestige  de la pensée,
Certains y verraient un mirage,
Un fantôme tentant la traversée
des apparences, – comme en furtif passage…

RC – oct 2015


Abdallah Zrika – J’ai apporté le vin … les dattes


peinture:  Volodia Popov

peinture:
Volodia Popov

 

 


J’ai apporté le vin
sans la peau du verre

J’ai apporté les dattes
fraîchement cueillies d’un mamelon

Je suis venu à vous
Je ne suis pas venu
Et vous n’êtes pas venus à moi

Je suis ainsi
vif-argent
comme le courant de la volupté

Je vous ai apporté
le minaret
pour appeler d’en-bas à la prière
Puissent les morts m’entendre

Je suis venu à vous mort
pour que vous m’aimiez davantage
et que vous disiez de moi
tout ce qui m’agrée

J’ai apporté des fleurs
pour ceux d’entre vous
qui ont proclamé leur folie

Je suis venu fou
pour comprendre le fou
tordre ce qui est droit
comprendre le fleuve
le serpent
Fou
pour aimer les échelles
devenir sage
comme chacun voudrait que je sois

Je vous apporté des choses inestimables
Les petits cailloux avec lesquels je joue
Des formes
qui ne ressemblent qu’aux animaux imaginés
dans la volupté

Du parfum
pour ouvrir vos narines
à la sauvagerie du plaisir

De l’or
que je répands
chaque fois que j’atteins la jouissance

Et vous ô femmes
je vous ai apporté un bâton d’or
qui ravit la lumière de la vulve

J’ai apporté
plusieurs copies de moi-même
Aucune
ne ressemble à l’autre

J’ai apporté
des nombres impressionnants de moi-même
Aucun nombre ne ressemble à l’autre

J’ai apporté
la soif
pour les lèvres humides

extrait de « Bougies Noires « aux Éditions de la Différence
traduit de l’arabe par Abdellatif Laâbi


Vue du pays de dedans – ( RC )


 

Il se balance,

comme s’il chutait immobile,

cloué dans l’espace,

accroché au silence.

 

Les grands buildings sont une forêt

plantée sur ses reflets de verre.

 

A leurs pieds se faufilent péniblement

des files d’autos sous des fumées grises

répondant aux paraboles lumineuses

de nuages en chou-fleur.

 

C’est un entre-deux

 

où circulent des courants d’air,

et peut-être le fil de la mémoire,

traçant ses courbes

jusqu’à l’horizon des rêves.

 

Je remonte en biais

les heures perdues,

me nourrissant du temps,

photographie passagère,

 

s’effaçant peu à peu

avec le jour naissant,

au pays du dedans .

 

RC  – janv  2015


Federico García Lorca – ruches


 

photo: façade d’immeuble à Hong-Kong

 

Ruches

Nous vivons dans des cellules
de verre,
dans des ruches d’air!
Nous nous embrassons à travers
du verre.
Merveilleuse prison,
dont la porte
est la lune! 
 
(Trad: Colo) – dont il faut signaler  le blog franco-espagnol

 
Colmena
 
 

F. García Lorca

¡Vivimos en celdas
de cristal,

en colmena de aire!

Nos besamos a través

de cristal.

¡Maravillosa cárcel,

cuya puerta

es la luna!