Robert Piccamiglio – Ensemble, Jésus et moi

extrait de « Chemin sans croix » ed Encres et lumières 2005
Nizzar Qabbani – tout livre traitant des prophètes
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J’essaie -depuis mon enfance- de lire tout livre traitant des prophètes des Arabes,
Des sages des Arabes… des poètes des Arabes…
Mais je ne vois que des poèmes léchant les bottes du Khalife
pour une poignée de riz… et cinquante dirhams…
Quelle horreur!!
Et je ne vois que des tribus qui ne font pas la différence entre la chair des femmes…
Et les dattes mûres…
Quelle horreur!!
Je ne vois que des journaux qui ôtent leurs vêtements intimes…
Devant tout président venant de l’inconnu..
Devant tout colonel marchant sur le cadavre du peuple…
Devant tout usurier entassant entre ses mains des montagnes d’or…
Quelle horreur!!
en savoir un peu plus sur l »Nizzar Qabbani
Jean Tardieu – fantômes

Ce n’est pas tout à fait la terre
que connaît un chacun.
Je découvre mille mystères
Dans les coins, un par un.
Le train, c’est une histoire étrange
avec tout ces regards !
Aux braves gens les mauvais anges
sont mêlés tôt ou tard.
Une route se remémore
tous les pas disparus
Mais elle attend — et rien encore
n ‘est vraiment apparu.
Qu il faille un peu manger pour vivre.
On connaît bien cela
Mais je veux qu’un dieu noua délivre
de qui nous mangera.
J’ai vu souvent de longs passants
sur l’asphalte foncé :
Ce n’étaient que des vêtements
où loge la fumée.
Peut-être, étant assez distrait.
m’étais-je trompé d’heure
Et les ai-je vus de trop prés
Au moment où ils meurent.
Moi-même, un jour, prés d’un miroir
Je fus bien étonné
de ne plus rien apercevoir
Ni mon front, ni mon nez !
Le ciel passait à travers moi
Tout était calme et lisse
Et j’entendais le temps qui glisse
Sur le sol gris et froid.
1940
texte publié dans la revue « poésie 84 »
Lost ( RC )
Il n’ y avait plus de train,
Pour aller plus loin,
alors, je suis resté,
Parachuté ici,
Où tout y est miséreux,
Usé par le temps, crasseux,
écrasé des indifférences,
C’est comme enfiler des vêtements,
Qui ne sont pas siens,
Avec des plis irréversibles,
Des taches incrustées,
Et des mailles qui se lâchent…
Et emprunter une voie qu’on a jamais remarquée,
Une voie de garage, au sens propre.
Des odeurs tenaces de vieilles huiles,
Des odeurs étrangères,
Insérées dans les tôles bariolées du port,
Menant vers le plus inconnu encore,
A la lumière éteinte et des plages noires,
Au delà d’un horizon ourlé de gris,
Scandé d’échardes de grues rouillées.
Il y avait cet attroupement,
Et à voix basse, ce cercle de gens,
Aux bleus délavés,
Comme leurs yeux, noyés,
Dans les vapeurs de vodka,
Autour du corps défait d’un marin,
– Le sel faisait des cristaux sur sa peau.
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RC – 4 septembre 2013
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