Jean-Luc Sarré – qui sera son autel ce soir ?

Les oiseaux se sont tus, soudain, les vaches ont cessé de brouter, les filles ne fanent plus que d’un œil et les vieilles qui le croisent se signent, bourdonnent cinq Ave, pressent le pas... Dans le hameau où la pierre froide mêle son odeur à celle des bois il cogne aux portes, toque aux carreaux à travers lesquels il peut voir sur les murs ricaner le Christ, mais la Vierge demeure introuvable qui sera son autel ce soir ?
extrait de l’ouvrage » poèmes costumés avec attelages et bestiaire en surimpression »
Yannis Ritsos – Jusqu’à ce que
image, montage perso 2017
La tante Maritsa, la tante Katina avec leurs petits chapeaux,
avec leurs broches en or, avec leurs meubles entassés l’un sur l’autre,
avec les coffrets peints, les paires de draps brodés,
avec les mille cuivres de cuisine. A quoi bon
avoir amassé tout cela – disaient-elles –
nous n’avons même plus où nous asseoir. Et pourtant
elles continuaient à amasser bouts de ficelle, sacs en papier,
pinces à linge. Les cafards et les mites,
cricricri, à l’ouvrage. Jusqu’à une nuit
où leur maison a pris feu.
Les deux vieilles filles maigres
ont couru, déchaussées, à moitié nues dans la rue
avec leurs longues chemises de nuit blanches,
et elles sont restées ainsi abasourdies, tremblantes à regarder le feu,
gardant chacune à la main seulement un petit chapeau noir.
Athènes, 17. /. 88.
Jean-Claude Pirotte – on ignore quoi quelle attente
-peinture- Ch Soutine – route peu rassurante
on n’a jamais le temps l’hiver décoiffe ses villes au marché les petites pommes sont vieilles
il faudrait raconter à l’ami qui est loin que ce n’est pas le froid qui nous épuise
ni le poids des nuées la pauvreté soumise mais on ignore quoi quelle attente ou quel signe
entre les bouleaux nus dans le bois délabré ou dans les yeux des chiens quand ils vont au hasard
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