Souvenir d’école – ( Susanne Derève) –

Une fleur de papier qu’on fixait à la toile
ou l’aile d’un moineau
le froissement du crépon sur la peau
la soie délicatement abandonnée
au point de colle
… un souvenir d’école
Et dans la cage de l’oiseau l’éblouissement du vol
vertige funambule l’éclipse des pinceaux
un frémissement d’ailes
le vert brillant des plumes
l’ocelle noire de deux yeux affolés
et sous le fin duvet le cœur désordonné
de l’oiseau
petit corps tiède entre mes mains
qui me disait la vie dans une histoire sans paroles
l’air de rien
Chauve-souris – (Susanne Derève) –

Attrape-songes, souris aux mains ailées ,
j’ouvrirai grand portes et fenêtres
à ton vol effaré, petit cerf-volant éperdu de chair et d’os,
vers les toits glacés de la nuit,
noir accent circonflexe griffant la lune rousse
et je m’endormirai légère
d’avoir lesté de rêves tes ailes fragiles
Miguel Veyrat – La terre s’ouvre au soleil
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La terre s’ouvre au soleil
Une rivière qui n’en finit pas
La chanson qui brûle dans l’air
s’évapore de larmes
La lumière ne peut brûler
Lorsque ,à l’écart des temples
Vole libre, sans colonnes
Chaque mot nu.
© Miguel Veyrat (« Babel sur la Lune » / » bouche d’ombre « Calima 2005)
TIERRA que al Sol se abre
río que nunca acaba
canto que arde en el aire
lágrima que se evapora:
Luz que no puede quemarse
cuando lejos de los templos
libre vuela sin columnas
en cada palabra desnuda.
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Robert Piccamiglio – Midlands – 06 – Plus tard ( 02 )
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L’argile du cœur broyé par l’indifférence. La peur. La haine.
Aux pieds des frénésies du pouvoir toujours en marche.
Ce pouvoir je l’ai senti
sur les scènes du monde entier.
Je n’étais alors ni le troupeau
ni l’infime sillon. ni le berger anonyme.
J’étais comme cette terre riche de feu. Fusion éternelle. Longue course vers l’infini.
J’étais le ciel heurtant les saisons. L’amant.
La maîtresse habillée de gestes vifs. Insoumise.
J’étais ce fils
que je n’ai pas connu.
Ce Cavalier maintenant égaré.
J’étais cette tille que je n’ai pas eu. Cette Reine oubliée. Cette Fée d’éternité.
Le pouvoir je l’ai senti comme la rivière charriant le sang.
Puis le fleuve emportant les cadavres d’où venait le sang.
Je restais immobile.
Triomphant.
A l’image de ces volatiles
qui Jamais ne se posent.
Qu’importe la saison. .
L’odeur de l’herbe ou de la pluie.
Jamais ils ne suspendent leur vol.
Même les blés accueillant. Ou l’arbre tendant ses bras aux douceurs zénithales ne leur font refermer leurs ailes.
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Midlands est publié aux éditions Jacques Bremond, qui utilisent très souvent du papier recyclé « artisanal »….
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Michel Leiris – avare
- art peinture; Patricia Watwood vanité
peinture: Patricia Watwood: vanité
Avare
M’alléger
me dépouiller
réduire mon bagage à l’essentiel
Abandonnant ma longue traîne
de plumes
de plumages
de plumetis et de plumets
devenir oiseau avare
Ivre du seul vol de ses ailes
Michel Leiris
(poème écrit en 1944, paru dans Haut Mal, Poésie/Gallimard, 1969)