Le logis de la cartomancienne – ( RC )

Tout en haut de l’escalier
d’une maison délabrée
à façade grise
c’est le logis
de la cartomancienne…
–
Un chat blanc
à la tête couleur de suie,
veille, avec indifférence
sur une boîte en osier
devant l’entrée
qui reste ouverte
en permanence:
jamais il ne sommeille;
–
C’est à cet animal
qu’on pose les questions
sur le palier
comme c’est l’usage:
-petit sphynx, petit lion-
–
Le consulter,
est comme regarder
dans une boule de cristal…
Dans son oeil
se reflètent d’étranges lueurs
où dansent les présages.
–
Si tu vas chez la cartomancienne,
tu n’y accèdes qu’à pied :
tu repéreras l’escalier:
il est peint de deux couleurs
en rouge et en bleu,
ce qui égaie un peu les lieux:
–
Quand le chat est à l’intérieur,
c’est elle qui t’accueille
en habits de deuil,
assise, comme toujours
dans le fauteuil de velours .
–
Il faut suivre le protocole :
elle a les phrases lentes
et peut s’endormir
après quelques paroles
décisives sur l’avenir,
car elle est un peu voyante.
–
En fin de journée
ses mains sont transparentes.
Tu devras la laisser
méditer sur ton cas
ou bien c’est avec le chat
qu’il faudra dialoguer.
.
Ivan V. Lalic -Lieux que nous aimons
–
Les lieux aimés n’existent que par nous,
L’espace détruit n’est qu’apparence dans le temps durable,
Les lieux aimés nous ne pouvons les abandonner,
Les lieux aimés ensemble, ensemble, ensemble.
Et cette chambre est-elle chambre ou caresse,
Et qu’y a-t-il sous la fenêtre : la rue ou les années ?
Et la fenêtre n’est-elle que l’empreinte de la première pluie
Que nous avons comprise, et qui sans cesse se répète ?
Et ce mur n’est-il pas la limite de la chambre, mais peut-être
de la nuit
Où le fils vint dans ton sang endormi,
Le fils comme un papillon de feu dans la chambre de tes miroirs,
La nuit où tu eus peur de ta lumière.
Et cette porte donne sur n’importe quel après-midi
Qui lui servit, à jamais peuplé
de tes simples mouvements, lorsque tu entrais
Dans ma seule mémoire, comme le feu dans le cuivre;
Quand tu es absente, derrière toi l’espace se referme comme l’eau ;
Ne te retourne pas : il n’est rien en dehors de toi,
L’espace n’est que temps visible d’autre manière;
Les lieux aimés nous ne pouvons les abandonner.
–
Ivan V. LALIC
« Temps, feu, jardins » (Éd. Saint-Germain-des-Prés, 1973)
–
Ivan V. Lalic – Lieux que nous aimons
Lieux que nous aimons
Les lieux aimés n’existent que par nous,
L’espace détruit n’est qu’apparence dans le temps durable,
Les lieux aimés nous ne pouvons les abandonner,
Les lieux aimés ensemble, ensemble, ensemble.
Et cette chambre est-elle chambre ou caresse,
Et qu’y a-t-il sous la fenêtre : la rue ou les années ?
Et la fenêtre n’est-elle que l’empreinte de la première pluie
Que nous avons comprise, et qui sans cesse se répète ?
Et ce mur n’est-il pas la limite de la chambre, mais peut-être de la nuit
Où le fils vint dans ton sang endormi,
Le fils comme un papillon de feu dans la chambre de tes miroirs,
La nuit où tu eus peur de ta lumière.
Et cette porte donne sur n’importe quel après-midi
Qui lui servit, à jamais peuplé
de tes simples mouvements, lorsque tu entrais
Dans ma seule mémoire, comme le feu dans le cuivre;
Quand tu es absente, derrière toi l’espace se referme comme l’eau ;
Ne te retourne pas : il n’est rien en dehors de toi,
L’espace n’est que temps visible d’autre manière;
Les lieux aimés nous ne pouvons les abandonner.
Ivan V. LALIC « Temps, feu, jardins » (Éd. Saint-Germain-des-Prés, 1973)
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N’ayant pas égaré ma plume – (RC)
N’ayant pas égaré ma plume, au clair de la brume,
Dans mes forêts , mon marécage, toi ton bocage
Je n’ai pas oublié que le pouvoir des mots
Aidait chacun à sortir de sa cage,
Du désert, ou de l’urbain étalage de bitume
Les mots sont l’aide d’un bruit silencieux,
Ceux ci nous disent l’exister, et l’approche des lieux
La vie, comme souffle , paroles et partage
Au delà des contraintes et orages.